Les Européens trouvent un accord pour mieux protéger les travailleurs des plates-formes

Les Européens trouvent un accord pour mieux protéger les travailleurs des plates-formes

Laborieusement, les Européens sont enfin parvenus, lundi 11 mars, à s’entendre sur le sort des travailleurs des plates-formes numériques, comme Uber ou Deliveroo. Il aura fallu plus de deux ans de négociations pour qu’une majorité qualifiée de quinze Etats membres, représentant 65 % de la population du Vieux Continent, soutienne un texte qui oblige désormais les Vingt-sept à créer une présomption légale et réfutable de salariat dans leurs droits respectifs, en les laissant libres d’en définir les conditions.

Le vote formel aura lieu dans quelques jours mais les ministres des affaires sociales, qui se réunissaient lundi à Bruxelles, ont, à cette occasion, exprimé leur position, et son issue ne fait plus de doute.

Avec l’essor des plates-formes, les Européens souhaitaient harmoniser et améliorer les conditions de travail d’un secteur peu régulé qui emploie aujourd’hui 28 millions de personnes – en 2025, ils devraient être 43 millions – et les fait travailler, dans 90 % des cas, avec le statut d’indépendant sans que celui-ci soit toujours justifié.

Passage au salariat

Selon la Commission, aujourd’hui, 5,5 millions de chauffeurs et autres livreurs répertoriés non salariés devraient en réalité l’être, au vu de la relation de subordination qui les attache à leur employeur, et accéder ainsi aux droits afférents en termes de salaire, de congés, d’assurance-maladie ou encore de droits à la retraite et au chômage.

En décembre 2021, la Commission avait proposé de créer une présomption de salariat dès lors que certains des critères qu’elle avait retenus (niveau de rémunération, supervision à distance des prestations, horaires imposés, obligation d’accepter une mission, port d’un uniforme ou encore interdiction de travailler pour une autre entreprise) étaient remplis.

Lire aussi la chronique du juriste Francis Kessler Article réservé à nos abonnés « L’Union européenne se penche sur le statut des travailleurs des plates-formes »

Mais les deux colégislateurs – le Parlement européen et les Etats membres – ne sont pas parvenus à s’entendre sur cette logique. Les eurodéputés souhaitaient assouplir les conditions de la présomption de salariat par rapport à ce que prévoyait l’exécutif communautaire quand les Vingt-sept voulaient les durcir.

La Belgique, l’Espagne ou les Pays Bas, où les indépendants sont nombreux et où les contentieux en justice sur ce sujet ont bondi, étaient favorables à la proposition de la Commission. L’Allemagne, faute d’un accord entre les partenaires de la coalition d’Olaf Scholz, avait prévenu qu’elle s’abstiendrait, rendant plus difficile l’obtention d’une majorité qualifiée parmi les Etats membres.

Paris, isolé

Quant à la France, qui est le pays européen où il y a le plus de plates-formes, elle défendait un dispositif sur le modèle de ce qu’elle fait à domicile : la revalorisation des droits des indépendants plus que la requalification de leur contrat de travail, alors que le statut de salarié dans l’Hexagone est relativement rigide. Paris a finalement accepté la logique d’une présomption de salariat, mais a, en contrepartie, exigé des critères plus stricts que ceux de la Commission.

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LJD

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