Les enseignes françaises Princesse Tam-Tam et Comptoir des cotonniers en restructuration
Au lendemain de la fin des soldes d’hiver, mercredi 4 mars, les salariés de Comptoir des cotonniers et de Princesse Tam-Tam en France ont été douchés. Connu pour ses magasins Uniqlo, le groupe japonais Fast Retailing a annoncé une restructuration des deux enseignes françaises d’habillement qu’il détient depuis leur rachat en 2005. D’après la CGT, un plan de sauvegarde de l’emploi porte sur « la suppression de 217 postes » au sein de Comptoir des cotonniers (sur un total de 517). « Il est trop tôt pour préciser le nombre d’emplois concernés », affirme cependant le porte-parole de Fast Retailing, Aldo Liguori, à Tokyo, sans toutefois démentir ce chiffre.
Cette saignée découlerait d’abord de la fermeture de 74 points de vente Comptoir des cotonniers. « Dont les 50 corners exploités au sein des grands magasins Galeries Lafayette et Printemps », précise la direction du groupe japonais. La chaîne de lingerie féminine Princesse Tam-Tam qui emploie 342 personnes « fermera 7 boutiques et 19 corners » au sein des grands magasins, décompte aussi Fast Retailing. Les boutiques devraient baisser le rideau entre août 2021 et mars 2022.
Contre-pied de la dentelle
Ces mesures doivent améliorer « la compétitivité », redresser les deux enseignes aujourd’hui déficitaires et accélérer leur mutation vers la vente en ligne, assure le groupe. Car il est loin le temps où Comptoir des cotonniers était une figure du commerce en centre-ville. Fondée en 1995, par un couple, Tony et Georgette Elicha, à Castelginest, près de Toulouse (Haute-Garonne), cette marque a séduit mères et filles dans les années 2000, grâce à des prix à mi-chemin entre ceux de Zara et de Gérard Darel.
Ses dirigeants, dont Frédéric Biousse et Elie Kouby, aujourd’hui à la tête du fonds d’investissement Experienced Capital, qui détient Le Slip Français, Balibaris et Sœur, ont aussi fortement contribué à la construction de son réseau de points de vente, avec l’aide de fonds, jusqu’à sa revente en 2005. Fast Retailing a alors mis la main sur ce fleuron en jurant vouloir exporter l’enseigne. Mais elle n’est aujourd’hui présente que dans huit pays. Et 191 de ses 252 boutiques sont situées dans l’Hexagone.
Toujours en 2005, pour environ 70 millions d’euros, le Japonais a repris une autre figure de la vente de mode sous enseigne, Princesse Tam-Tam. Cette marque de dessous féminins a été fondée par deux sœurs, Shama et Loumia Hiridjee. En 1985, elles débutent en coupant des culottes dans de la popeline de caleçons masculins. Princesse Tam-Tam sera le contre-pied de la dentelle d’Aubade et de Chantelle. Sans faire appel aux grands magasins ou à la franchise, les deux sœurs montent leur propre réseau de vente partout en France. Avec succès. Mais, depuis son rachat, le réseau ne s’est guère étoffé. Princesse Tam Tam exploite deux boutiques à l’étranger, sur un total de 118, soit une trentaine de plus qu’en 2005.
Un magasin gigantesque
Ces deux chaînes ne sont que deux petits poucets au sein de Fast Retailing : son réseau de magasins s’élève à 3 630 dans le monde − la plupart sont des Uniqlo. Leur restructuration n’est toutefois pas une surprise. En août 2020, le groupe présidé par son fondateur, Tadashi Yanai, avait fait état d’une dégradation de son résultat opérationnel de 42 % en un an et d’une chute d’activité de 12,3 % à 16 milliards d’euros.
Le groupe est présenté comme l’un des distributeurs de mode ayant le mieux résisté à la crise
En France, Fast Retailing explique la mauvaise passe de Comptoir des cotonniers et de Princesse Tam-Tam par « l’évolution du paysage commercial » et les « changements drastiques des comportements de consommation » depuis le début de la pandémie due au coronavirus. Le marché français a perdu près de 18 % de sa valeur, en 2020, selon l’Institut français de la mode. Mais, aux yeux de la CGT, la conjoncture n’explique pas tout. Le syndicat pointe « les choix inadaptés de l’actionnaire » à l’œuvre « depuis plusieurs années ». Depuis 2019, une styliste française, Nathalie Marchal, dirige la création artistique de Comptoir des cotonniers. Elle a succédé à une figure de la mode japonaise, Naoki Takizawa, ancien directeur artistique d’Issey Myake et d’Uniqlo, que Fast Retailing avait imposé en 2016, après deux stylistes françaises.
Fast Retailing demeure cependant ambitieux en 2021. Le groupe, qui est présenté comme l’un des distributeurs de mode ayant le mieux résisté à la crise, prévoit de réaliser un chiffre d’affaires de 2,2 milliards de yens en 2021, soit plus de 17 milliards d’euros. En France, le groupe japonais dit n’avoir aucunement revu le plan d’expansion d’Uniqlo. Il prépare l’inauguration d’un magasin gigantesque à Paris, rue de Rivoli, à la place de l’un des magasins historiques de La Samaritaine, détenue par LVMH.