« L’engagement d’Emmanuel Faber en faveur de la RSE pourrait bien avoir aussi attiré… les investisseurs activistes »

« L’engagement d’Emmanuel Faber en faveur de la RSE pourrait bien avoir aussi attiré… les investisseurs activistes »

Tribune. Vingt-neuf mois avant le retrait d’Emmanuel Faber du poste de PDG de Danone, Paul Polman, PDG d’Unilever depuis plus d’une décennie, démissionnait à la suite, lui aussi, d’une rébellion de ses actionnaires.

Les turnovers de dirigeants dus à l’insatisfaction des actionnaires sont légion, mais ceux d’Emmanuel Faber et de Paul Polman ont en commun une résonance très actuelle, puisque les deux PDG faisaient la part belle à la responsabilité sociale et environnemental (RSE), au capitalisme responsable et à un modèle multipartite.

Paul Polman s’était notamment positionné en fer de lance d’un plan décennal qui devait dissocier la croissance économique d’Unilever de son empreinte environnementale et promouvoir la santé et le bien-être d’un milliard de personnes à travers le monde. Emmanuel Faber s’était lancé dans des initiatives ambitieuses du même acabit chez Danone, dans l’espoir de transformer la façon de produire nos aliments, de rendre Danone neutre en carbone et d’améliorer la santé d’un maximum de personnes.

L’entreprise « dépense »

Les PDG ont une réelle influence sur les activités de leur entreprise en matière de RSE, comme le montre une étude réalisée auprès de 1 199 PDG à la tête de 819 sociétés aux Etats-Unis (« How much influence do CEOS have on company actions and outcomes ? The example of corporate social responsibility », Christophe Boone, Miha Sajko et Georg Wernicke, Academy of Management Discoveries, 15 janvier 2021). Près de 30 % de la variation totale des actions écoresponsables d’une entreprise découlent de la politique managériale de son PDG.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Valse des grands patrons dans l’agroalimentaire

Selon certains investisseurs, Paul Polman et Emmanuel Faber avaient donc le profil idéal pour orienter leurs entreprises vers une lente transition « verte » et tenaient compte des besoins de tous les acteurs de leurs entreprises, et non seulement de leurs actionnaires, et permettaient aussi d’attirer des investisseurs orientés vers la RSE.

Cependant, l’engagement fort de Paul Polman et d’Emmanuel Faber en faveur de la RSE pourrait bien avoir aussi attiré… les investisseurs activistes qui les ont évincés. Analysant les campagnes de 506 investisseurs activistes aux Etats-Unis, une étude a démontré qu’une entreprise qui investit dans le développement durable peut également attirer l’attention non désirée d’investisseurs qui considèrent qu’un tel engagement est un signal d’alerte indiquant que l’entreprise « dépense » au lieu de maximiser la valeur de l’action à court terme (« Why Activist Hedge Funds Target Socially Responsible Firms : The Reaction Costs of Signaling Corporate Social Responsibility », Mark DesJardine, Rodolphe Durand et Emilio Marti, Academy of Management Journal, 22 avril 2020).

Il vous reste 58.81% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Avatar
LJD

Les commentaires sont fermés.