Le spleen des « héros » du confinement

Le spleen des « héros » du confinement

Un agent d’entretien désinfecte un train au centre de maintenance de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis), le 7 mai.
Un agent d’entretien désinfecte un train au centre de maintenance de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis), le 7 mai. BERTRAND GUAY / AFP

Certains en seraient presque nostalgiques. « Nous aurions voulu que le confinement continue ! plaisante Jean-Pierre Lascary. Nous étions les rois de Paris ! Des dessins, des applaudissements… Nous étions acclamés comme des dieux. On n’avait jamais connu ça ! », raconte cet éboueur de la société Pizzorno, qui collecte dans le 15arrondissement de la capitale.

Au Super U d’Egletons (Corrèze), Laurence Gillet, responsable de rayon, évoque les « merci », « bravo à vous », « courage » laissés sur la page Facebook du magasin. Pierre Audet, chauffeur routier qui a poursuivi son activité de livraison de commerce alimentaire pendant tout le confinement, se souvient des SMS de soutien du maire de son village en Gironde et des applaudissements de 20 heures dans sa rue, dont des voisins lui ont signifié qu’ils étaient aussi pour lui. « Ça fait quelque chose », glisse-t-il.

Témoignages de sympathie, reportages… La crise sanitaire a mis en lumière nombre de professions d’ordinaire peu considérées, mais dont le confinement a révélé combien elles étaient indispensables au quotidien. Jusqu’au président de la République, qui avait rendu hommage à ces « deuxièmes lignes » – les premières étant les personnels de santé – dans son discours du 13 avril.

Depuis, la France se déconfine. Les applaudissements et les mots doux ont disparu. « C’est complètement fini. C’est les mêmes clients, les mêmes caprices », témoigne, amer, Yousri Boumalouka, directeur général adjoint d’un Monoprix à Paris, et secrétaire national FO de l’enseigne. « J’ai juste l’impression que les automobilistes nous mettent un peu moins la pression », estime Jean-Pierre Lascary.

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Les soignants, mobilisés depuis plus d’un an pour réclamer des moyens en faveur de l’hôpital public, ont obtenu, à l’occasion de la crise, le lancement, le 25 mai, d’un « Ségur de la santé », censé déboucher, d’ici à la mi-juillet, sur des propositions concrètes.

« Le système pouvait s’effondrer »

Cependant, « le Ségur du transport routier n’est pas prévu, que je sache, ironise Pierre Audet. On est déjà retombés dans l’oubli. Pas seulement les routiers. Tous les métiers du transport, les livreurs, les logisticiens. On est redevenus des camions pollueurs ».

Dès le 20 mars, le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, avait appelé les entreprises à verser une prime défiscalisée de 1 000 euros à leurs salariés « qui ont le courage de se rendre sur leur lieu de travail ». Mais son versement diffère selon les employeurs. A Paris, les éboueurs de Pizzorno et de Veolia ont touché une prime globale de 1 000 euros bruts quand les éboueurs municipaux qui collectent dans dix arrondissements reçoivent une prime à la journée travaillée de 35 euros nets. « Certains se sont exposés plus que les autres, appâtés par ce qui faisait figure de prime de risque », déplore un éboueur.

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