« Le régime très spécial des danseurs de l’Opéra de Paris »

« Le régime très spécial des danseurs de l’Opéra de Paris »

Tribune. Alors que vient de reprendre le mouvement de grève à l’Opéra de Paris, et à force d’entendre des approximations sur le régime de ses danseurs, qui leur permet de partir à la retraite à 42 ans, il semble utile d’éclairer le public sur le déroulement de leur carrière. Ancienne danseuse de l’Opéra, je parle par expérience.

Lorsqu’un enfant, à 10 ans, décide de se présenter à l’Ecole de danse de l’Opéra, il sort du circuit normal de la scolarité pour suivre une formation à but professionnel. S’il est admis à l’école de danse à l’issue d’un stage de six mois, il entame un double cursus : école le matin, danse l’après-midi avec deux cours collectifs par jour, cinq jours par semaine, complétés pendant les vacances par des stages. Chaque année, il passe un examen pour éventuellement monter de division, ce qui occasionne un entraînement surintensif. Chaque année, il prépare des « portes ouvertes » et des spectacles (une douzaine de représentations). Il faut compter avec les blessures, les découragements, les sacrifices, les échecs et les réussites, les problèmes de croissance, d’adolescence, etc.

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A 16 ou 17 ans, tout se joue dans la « classe d’engagement », à l’issue de laquelle les élèves passent un concours pour intégrer le corps de ballet. Il y a de quatre à six places, rarement plus, pour deux classes (garçons, filles) de douze élèves. Ce concours d’entrée se passe, soit l’année précédant le bac, soit la même année. De ma génération, seuls deux élèves ont eu leur bac. Certains élèves renoncent à le passer pensant pouvoir le préparer une fois embauchés dans le corps de ballet, mais abandonnent l’idée faute de temps. D’autres, comme moi, ratent le concours d’entrée, complètent leur formation ailleurs, et rentrent sur audition quelques années plus tard.

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Une fois engagé à 16, 17, ou 20 ans, on est professionnel : cours le matin, répétitions l’après-midi, spectacle le soir (180 spectacles par an, environ 90 par danseurs), week-ends et jours fériés compris – les spectacles du 24, 25, 30, 31 décembre, du 14 juillet sont très prisés – et le dimanche souvent « matinée-soirée », c’est-à-dire deux spectacles dans la même journée. Tous nous adorons notre métier – les spectacles, les créations, les tournées (même si enfiler les pointes après 16 heures de vol n’est pas une partie de plaisir) – même si nous sommes tous inévitablement confrontés un jour à des blessures, nécessitant ou pas une chirurgie réparatrice. Certaines danseuses ont le courage de faire des enfants (je me rappelle encore les sauts du deuxième tableau du Sacre du printemps, huit semaines après l’accouchement par césarienne).

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LJD

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