Le gouvernement lance un laboratoire pour mesurer les effets de l’intelligence artificielle sur le marché du travail
L’automatisation détruit-elle des emplois ? Les manageurs seront-ils remplacés par des algorithmes ? Comment recruter avec l’intelligence artificielle sans discriminer ? La manière dont des « machines apprenantes », capables de traiter des quantités pharamineuses de données, se substituent peu à peu à l’analyse humaine dans les entreprises, suscite des questionnements « vertigineux », selon Elisabeth Borne.
La ministre du travail est revenue sur les conséquences encore mal mesurées de l’automatisation dans le monde du travail pour annoncer, vendredi 19 novembre, le lancement de « LaborIA », un laboratoire destiné à mesurer l’impact de l’intelligence artificielle sur l’emploi et les conditions de travail. D’après l’OCDE, 32 % des emplois sont amenés à être profondément transformés par l’automatisation.
Le ministère du travail s’est associé à l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) pour mettre au point ce programme de recherche afin de ne pas être pris de court par ce qui est annoncé comme la prochaine révolution industrielle. Prévu sur cinq ans, le projet est mené par l’institut Matrice, un incubateur et un centre de formation autour des nouvelles technologies.
Créations d’emploi
Plusieurs intervenants invités à s’exprimer sur le projet ont survolé les multiples bouleversements introduits par l’utilisation croissante de la data dans le monde du travail. Pierre de Sahb, cofondateur de l’entreprise de traitement des données UNiFAi, a tenu à rappeler que l’intelligence artificielle était aussi créatrice d’emplois : « On automatise 90 % du job pour les gens qui sont là, mais avec un rythme de croissance [des données] tel qu’on accompagne des créations d’emplois. »
Rappelant la nécessité de sensibiliser les travailleurs à l’utilisation des algorithmes, Salima Benhamou, économiste à France Stratégie, a souligné que le salarié « a besoin de comprendre comment s’élabore une donnée et comment elle s’inscrit dans le processus ; sinon, la data ne sert à rien ». Le gouvernement s’est fixé comme objectif de former au moins 3 700 étudiants spécialistes de l’IA d’ici à 2025.
Au-delà de l’impact sur les besoins en main-d’œuvre, plusieurs intervenants sont revenus sur l’utilisation des algorithmes dans le recrutement. Prenant l’exemple de l’expérimentation « la bonne boîte » menée par Pôle emploi, qui s’appuie sur un algorithme exclusif pour détecter les entreprises qui vont probablement embaucher ces six prochains mois, l’économiste Dominique Meurs a rappelé que les algorithmes utilisés à bon escient se révélaient des outils efficaces pour lutter contre le chômage : « Cette expérimentation a montré que cela marchait, en particulier pour les catégories les plus défavorisées. »
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