Jean Pisani-Ferry : « L’horizon d’une “coalition d’action” sera probablement court »
Emmanuel Macron a clairement annoncé que seuls les partis ayant déjà gouverné, ensemble ou séparément – Parti communiste (PC), Europe Ecologie-Les Verts (EELV), Parti socialiste (PS), Ensemble ! et Les Républicains (LR) –, pourront faire partie d’une possible « coalition d’action », tandis qu’en seraient exclus La France insoumise (LFI) et le Rassemblement national (RN), qui n’ont jamais gouverné. Le programme de gouvernement va devoir faire rapidement se confronter les protagonistes de la campagne électorale à la réalité. Il va falloir, en effet, prendre la mesure des investissements indispensables à brève échéance, que ce soit en matière de transition écologique, de résilience économique, de restructuration du système énergétique, d’éducation, de santé ou de défense. Dans l’immédiat, il va falloir, en outre, accepter qu’on ne pourra pas faire entendre raison à un agresseur – la Russie –, prêt à réduire ses revenus de 20 %, si on ne peut pas supporter que les nôtres baissent de 2 %. Ainsi, tout cela impliquera une ponction notable sur le pouvoir d’achat.
C’est au gouvernement bientôt remanié qu’il appartiendra de fixer l’addition. Et il devra compter juste. La soudaine remontée des alarmes sur les taux d’intérêt publics est sans nul doute excessive, mais elle signale un risque de panique qu’il faut endiguer. La France, dans ce contexte, doit trouver le bon équilibre budgétaire : certainement pas replier bagage de manière précipitée, comme en 2011-2014. Pas non plus, cependant, oublier toute discipline, à la manière du « quoi qu’il en coûte » de la période 2020-2022, qui n’a en fait pas été si onéreux, mais qui a laissé une trace politique impérissable. La première ministre ne peut pas décemment exiger des partenaires potentiels de la « coalition d’action » de s’inscrire dans la seule logique du projet présidentiel, mais M. Macron a cependant fixé certaines limites à la possibilité de s’en affranchir.
Terrains de compromis
Quels sont alors les terrains du compromis ? Les écologistes seront jugés sur un seul sujet : l’ambition climatique et, au-delà, l’ambition écologique du programme. La France est gravement en retard sur l’horizon d’une réduction de 50 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030, et elle ne peut rattraper ce retard qu’en accélérant le déploiement des renouvelables et en misant sur la sobriété. Le nucléaire n’est pas un sujet à l’horizon 2030, mais, compte tenu de la composition de la coalition, il n’y a pas de planification écologique acceptable pour Ensemble ! et pour la droite qui exclut le recours à cette énergie. Le compromis énergétique se joue en fait entre LR, à condition qu’ils acceptent les renouvelables pour aujourd’hui, et EELV, à condition qu’ils acceptent le nucléaire pour demain.
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