« Il faudrait bénéficier des modifications en cours dans les entreprises pour sécuriser les informations comptables »

« Il faudrait bénéficier des modifications en cours dans les entreprises pour sécuriser les informations comptables »

« La vocation des commissaires aux comptes  n’est pas d’apporter comme les experts-comptables une assistance ou un conseil, mais de contrôler et informer sur la qualité des informations qu’ils transmettent à leurs partenaires »
« La vocation des commissaires aux comptes  n’est pas d’apporter comme les experts-comptables une assistance ou un conseil, mais de contrôler et informer sur la qualité des informations qu’ils transmettent à leurs partenaires » Ade Akinrujomu/Ikon Images / Photononstop
La maîtresse de conférences en sciences de gestion montre que la vérité des comptes est le principal moyen pour percevoir la confiance des salariés.

La loi Pacte (Plan d’action pour la croissance et la changement des entreprises) optée définitivement le 11 avril a permis des avancées remarquables sur le plan social. Citons le renforcement de la reproduction des salariés dans les conseils d’administration, le comble des retraites chapeaux ou la communication de ratios d’équité sur les écarts de rétributions entre dirigeants et salariés. Malgré cela, ces mesures prometteuses ont laissé de côté un sujet de première importance pour défendre une gouvernance partenariale des entreprises : la garantie de clarté et de crédibilité des données comptables.

Quel est l’enjeu ? Prenons l’exemple d’une entreprise en pénurie ou confrontée à des mutations importantes, qui fait état de résultats financiers catastrophiques avant d’annoncer une réduction d’effectif. Les recherches que nous avons menées avec Marie-Anne Verdier, exposent qu’il est très probable que ses dirigeants aient minimisé délibérément ces résultats, voire créé faussement une perte – ce que font beaucoup de sociétés cotées – afin d’exciter un choc et mieux faire passer la pilule des suppressions de postes. « Les dirigeants gèrent-ils les résultats comptables avant d’annoncer une réduction d’effectifs ? Le cas des entreprises françaises cotées », (Revue Comptabilité – Contrôle – Audit 2016/3 (Tome 22), Marie-Anne Verdier et Jennifer Boutant).

Cette utilisation des comptes, moralement douteuse, est tout à fait légale et même assez simple. Il suffit de gonfler les postes de dépréciations et provisions, qui résultent d’appréciations opérées à la mesure des équipes dirigeantes. Les salariés et le grand public n’ont aucun moyen de limiter si ces charges annoncées correspondent ou non à des dépenses effectives dans l’année. Ils entendent le message qu’on souhaite leur faire passer : les résultats de l’entreprise sont mauvais ou tourmentés. Il faut résister. L’acceptation des suppressions de postes en est, dans une certaine mesure, facilitée.

Les manipulations comptables

Ces utilisations comptables sont spécialement redoutables car elles encouragent mécaniquement, l’année suivante, un rebond qui valide a posteriori l’intérêt des réductions d’effectifs. En effet, une fois les abandons de postes effectuées, rien de plus simple, que de rétablir dans les résultats les dévalorisations et provisions qui aussitôt n’ont plus lieu d’être, et d’octroyer le profit qui apparaît ainsi à une sage gestion.

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LJD

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