Haude Rivoal, sociologue : « Les codes de la virilité se transmettent au sein des entreprises »

Haude Rivoal, sociologue : « Les codes de la virilité se transmettent au sein des entreprises »

Dans l’ouvrage collectif Masculinités (éditions EPA), la sociologue et docteure de l’université Paris-VIII Haude Rivoal synthétise l’état de ses recherches, qui portent sur les liens entre travail et masculinités.

Vous écrivez que le « genre [du travail] perdure ». Pourquoi l’entreprise demeure-t-elle encore, à vos yeux, un univers masculin ?

Cela ne tient pas forcément à des stratégies conscientes des hommes pour maintenir leur domination, mais des éléments structurels leur permettent d’être favorisés – en matière d’évolution de carrière, de salaires, etc. C’est le cas, par exemple, dans l’encadrement. L’investissement et l’engagement professionnels exigés n’y sont possibles que si l’on se déleste du travail domestique et parental. Ce qui écarte aujourd’hui une proportion non négligeable de femmes.

De même, les métiers cadres valorisent des traits de caractère tels l’assurance, le goût du pouvoir, la compétition ou la capacité à affronter d’importantes charges de travail sans montrer ses faiblesses. Or, les hommes ont justement été majoritairement éduqués à travers les stéréotypes de l’homme endurant. Tout cela ne peut que contribuer à créer dans certains métiers des « boys clubs » et un entre-soi très masculin.

N’observe-t-on pas toutefois depuis quelques années des avancées, certes relatives, pour une meilleure prise en compte de la place des femmes dans l’entreprise ?

Il y a eu des évolutions positives, en effet. Des secteurs se sont féminisés, des femmes se sont organisées en réseau. On constate également certaines avancées, comme les congés menstruels. L’idée d’une norme égalitaire semble, par ailleurs, faire relativement consensus. C’est notamment le cas au sein de la jeune génération, où des hommes se démarquent de certains schémas : ils ne veulent plus être, comme leurs pères, des bourreaux de travail. Ceci étant, il reste des « poches de résistance » assez fortes, où la masculinité s’impose.

Notons également que, dans certains métiers, les femmes réussissent parce qu’elles acceptent de s’aligner sur des normes viriles – ce qui montre que, structurellement, les choses ne changent pas vraiment. Pour monter en responsabilité, les exigences sont telles qu’elles doivent embrasser certains stéréotypes liés notamment à la dévotion temporelle mais aussi géographique. Il faut, enfin, aussi noter que si la place des femmes peut parfois progresser il y a certains métiers où elles sont de moins en moins présentes.

Dans quels secteurs peut-on constater une diminution du nombre de femmes ?

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LJD

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