Faillites : environ 22 000 entreprises seraient « en sursis »
En dépit de la crise économique, la plus violente depuis la dernière guerre, la « vague » des faillites redoutée en 2020 ne s’est pas concrétisée. Leur nombre a même connu une chute historiquement faible, de 38 %, avec 31 500 entreprises seulement en dépôt de bilan. Un recul redevable aux mesures d’urgence et de soutien mises en place par le gouvernement, aux prêts garantis par l’Etat (PGE) et au dispositif de chômage partiel.
Mais, comme le rappelle l’assureur-crédit Coface dans une note publiée le 23 mars, « ce paradoxe laisse penser qu’il existe des défaillances manquantes », des entreprises non-viables dont la survie n’est liée qu’aux aides publiques. La France compterait, selon les projections, 22 000 entreprises dans cette situation, dont la faillite devrait « se matérialiser progressivement d’ici à 2022 ». Les difficultés apparaîtront avec la fin des aides, mais aussi lors du retour à la normale de l’ensemble des secteurs économiques, explique l’économiste Bruno de Moura Fernandes, car la reprise de l’activité nécessite des dépenses supplémentaires qui vont affecter la trésorerie de ces sursitaires.
Mais il est vraisemblable que ces faillites ne prendront pas la forme d’une vague, mais qu’elles se produiront plutôt sur longue période. « On suppose en effet que les aides seront retirées de façon graduelle et progressive », ajoute M. de Moura Fernandes. « Par ailleurs, les enquêtes montrent que les entreprises, notamment les PME, ne prévoient pas de rembourser les PGE par anticipation mais veulent plutôt étaler les remboursements au maximum. Il n’y aura donc sans doute pas de choc brutal sur la trésorerie des entreprises, mais une hausse étalée des défaillances ». C’est surtout lors du premier trimestre 2022 qu’elles devraient apparaître, selon l’expert. Leur matérialisation, surtout, sera « directement corrélée à la rapidité avec laquelle les mesures de restriction prendront fin » – qui découle elle-même de la vitesse des campagnes de vaccinations.
« Il n’y aura donc sans doute pas de choc brutal sur la trésorerie des entreprises, mais une hausse étalée des défaillances », Bruno de Moura Fernandes, économiste chez Coface
C’est le secteur de la construction qui serait, selon Coface, le plus concerné par ces défaillances « manquantes » . Un autre paradoxe alors que le BTP a retrouvé son niveau d’activité d’avant crise dès la fin de l’année 2020. Pourtant, pas moins de 8 600 entreprises de construction seraient aujourd’hui en sursis. Cela s’explique par le fait que les faillites sont structurellement bien plus fréquentes dans ce secteur, en temps normal : la construction compte d’ordinaire pour 26 % des défaillances en France. De plus, compte tenu justement du fait qu’elles ont pu retrouver rapidement un niveau d’activité normal, ces entreprises « ont reçu peu d’aides », précise M. de Moura Fernandes.
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