« Dissocier couverture universelle et assurance-chômage » risque d’aboutir à « une réduction de la valeur du travail »
Une nouvelle négociation de la convention d’assurance-chômage s’est engagée entre les partenaires sociaux – une réunion s’est tenue le 18 décembre à ce sujet. Elle a récemment pris un nouveau tournant, initié par le Medef, qui propose de dissocier d’un côté une couverture universelle gérée et financée par l’Etat, et de l’autre une assurance complémentaire obligatoire pilotée par les syndicats.
Cette proposition tire profit d’une double brèche ouverte par le gouvernement.
D’une part, la suppression des cotisations salariales d’assurance-chômage a changé la donne, puisqu’une partie du système d’assurance-chômage se trouve dorénavant financé par l’impôt (CSG).
D’autre part, le gouvernement s’est avancé sur le terrain d’un revenu universel d’activité, sans plus de précisions jusqu’alors.
Ceci traduit une certaine volonté de reprise en main par l’Etat du système de couverture des risques de carrières, qui conduit aujourd’hui le Medef à plaider, avec opportunisme, pour une remise à plat complet du système. Cela reviendrait à se calquer sur le système de retraite, qui combine un régime de base géré par l’Etat et un régime complémentaire d’assurance géré par les syndicats, ces derniers se désengageant donc du régime de solidarité.
Prudence de mise
Le système envisagé comporterait une nouvelle allocation unique se substituant à l’allocation de solidarité spécifique et potentiellement à d’autres minima sociaux tels que le revenu de solidarité active (RSA), à laquelle s’ajouterait une assurance-chômage complémentaire limitée dans son montant et sa durée.
Que penser d’une telle perspective ? La prudence semble devoir être de mise, afin d’éviter que la juxtaposition de deux systèmes, gérés indépendamment l’un de l’autre, ne conduise à réduire les incitations à l’emploi. Cet écueil est plus prégnant pour les travailleurs peu qualifiés, et plus particulièrement pour les jeunes les moins qualifiés.
La valeur de l’emploi relativement au chômage demeure en effet faible, au regard de la pénibilité du travail et de divers coûts connexes (transport notamment), pour les individus les moins formés et aux rémunérations proches du smic. A titre d’exemple, ce gain financier à travailler se chiffre à environ 300 euros par mois pour une personne sans enfant bénéficiaire du RSA qui reprend un emploi à mi-temps au smic, contre un peu moins de 200 euros précédemment sous le régime du revenu minimum d’insertion (RMI). Un effet positif de faible ampleur sur le taux de retour à l’emploi est ainsi imputé à la bascule du RMI vers le RSA. Cet effet reste toutefois fragile : à mesure que l’on rendrait les revenus d’assurance-chômage plus élevés que ceux du RSA, les incitations à travailler chuteraient.
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