Déjà en avance, la Finlande devrait pérenniser le télétravail après la crise du Covid-19
Avant la pandémie de Covid-19, Johanna Holmström travaillait à la maison « un ou deux jours par mois au maximum ». Le 16 mars 2020, cette directrice financière d’une société immobilière suédoise en Finlande venait de se mettre en quarantaine, après une visite au siège social de son entreprise à Stockholm, quand le gouvernement, à Helsinki, a demandé aux Finlandais de travailler à distance. Depuis, elle n’est retournée que trois fois au bureau, « dont deux dimanches soir, pour faire des cartons, quand on a changé de locaux », précise-t-elle.
Comme Johanna, un million au moins de salariés finlandais, soit la moitié d’entre eux, sont passés au télétravail au printemps 2020 : un des chiffres les plus élevés de l’Union européenne. Les économistes y voient une des raisons de la résilience de ce pays de 5,5 millions d’habitants face à la crise sanitaire. Non seulement la Finlande est l’Etat qui a enregistré le moins de contaminations en Europe proportionnellement à sa population, mais son PIB n’a reculé que de 3,2 % en 2020.
Près d’un an plus tard, pour Johanna, l’heure est au bilan : « Mes collègues me manquent un peu. On essaie de se voir de temps en temps. Mais ce n’est pas comme si nous étions très sociables en Finlande », plaisante-t-elle. Pour le reste, elle est agréablement surprise : « Je suis aussi efficace ou même plus qu’au bureau. Personne ne vient me déranger, et je peux m’organiser comme je veux. Parfois, je fais des réunions en me promenant dehors. »
Plus de cols blancs
Elle n’est pas la seule à avoir apprécié l’expérience. Selon une enquête réalisée par un groupe de chercheurs de différentes universités finlandaises auprès de 1 164 salariés, dont deux tiers ne travaillaient jamais ou rarement à la maison avant l’épidémie, 85 % étaient très satisfaits en mars 2020, et 86 % en octobre. « En général, les gens ont le sentiment d’avoir augmenté leur productivité, tout en améliorant l’équilibre travail-vie personnel », résume Kirsimarja Blomqvist, professeure de gestion des connaissances à l’université de technologie de Lappeenranta, dans le sud-est du pays.
« En général, les gens ont le sentiment d’avoir augmenté leur productivité, tout en améliorant l’équilibre travail-vie personnel », Kirsimarja Blomqvist, professeure de gestion des connaissances
Le pays avait déjà pris une longueur d’avance avant l’épidémie. En 2018, selon le centre national des statistiques, 28 % des Finlandais travaillaient déjà régulièrement à la maison (59 % pour les CSP +). Ils n’étaient pourtant que 4 % en 1997. Pour Matti Vartiainen, professeur de psychologie du travail et des organisations à l’université Aalto (Helsinki), « la crise économique du début des années 1990 et la déconstruction créatrice qu’elle a entraînée » sont en partie responsables. Les entreprises ont modifié leur organisation du travail. Nokia, en plus de faire office de moteur de l’économie finlandaise, « a créé une atmosphère propice à l’innovation et au développement technologique », constate M. Vartiainen.
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