Cuisiniers, serveurs, animateurs… A la montagne, la foire d’empoigne pour recruter des saisonniers qualifiés
Depuis la mi-septembre, Alexandre Le Corre n’a qu’une priorité : trouver les douze personnes qui pourront, cet hiver, faire tourner sa taverne savoyarde. Et cette tâche lui donne des sueurs froides. « Il y a quelques années, quand je mettais une annonce sur Pôle emploi, j’avais cent CV, on pouvait vraiment sélectionner. Depuis le Covid, c’est complètement différent », raconte le patron de ce restaurant situé à La Plagne (Savoie). Les canaux de recrutement, les attentes et les profils des candidats ont changé.
Aujourd’hui, nombre de deals se nouent sur des groupes Facebook spécialisés dans ces emplois, sur lesquels le candidat propose ses services, précise ses disponibilités et ses conditions, photo et CV à l’appui. Certains postulent en couple, en groupes d’amis, d’autres posent en photo avec leur chien, qui voyagera avec eux. « Ensuite, c’est à nous de les démarcher, relate Alexandre Le Corre. J’y passe trois, quatre heures par jour depuis deux mois. Les meilleurs profils sont ultrademandés, le rapport de force n’est plus le même. »
Cuisiniers, serveurs, responsables de boutiques, animateurs dans les garderies, femmes de chambres, skimen, perchistes… Environ 80 000 personnes sont recrutées chaque année en tant que saisonniers à la montagne, avec un important turnover d’une année sur l’autre. Et alors que les stations s’apprêtent à accueillir les premiers vacanciers, les recruteurs affrontent, pour la seconde année, des difficultés inédites – même si la situation est un peu moins critique qu’en 2021, selon Jean-Luc Boch, le président de l’Association nationale des maires des stations de montagne.
« Ras-le-bol de ces conditions de vie »
A l’origine de ce trou d’air : la pandémie de Covid-19, qui a rebattu les cartes. Alors que les stations de ski ont été quasiment à l’arrêt pendant l’hiver 2020-2021, une partie des habitués des « saisons » ont profité de ces périodes de chômage pour trouver un travail plus durable, ou se reconvertir. « Les motifs sont multiples, des difficultés pour se loger aux horaires décalés », observe la direction générale de Pôle emploi.
Myriam Vazart est ainsi devenue caviste, après dix ans comme vendeuse en fromagerie ou serveuse à Avoriaz, Morzine (Haute-Savoie), Valloire, La Plagne, Tignes (Savoie)… Sans regrets. « En mars 2020, nous avons été brutalement chassés de stations que nous avions servies tout l’hiver, explique-t-elle. C’était la panique pour se confiner. Pour la plupart, nous n’avions pas d’adresse à nous ! A cela s’ajoutait le ras-le-bol de ce rythme effréné, de ces conditions de vie spartiates… Je me suis dit : trop pour moi, je raccroche. »
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