Coupes budgétaires : les politiques de l’emploi deux fois plus touchées que prévu
A Bercy, on aime faire des cachotteries. Les réductions de moyens touchant les politiques en matière d’emploi seront finalement deux fois plus importantes que ce que suggéraient les premières indications livrées, lundi 19 février, par le ministre délégué aux comptes publics, Thomas Cazenave. C’est l’une des surprises offertes par le décret des annulations de crédits, publié, jeudi, au Journal officiel, qui précise, poste par poste, les économies de 10 milliards d’euros annoncées par l’exécutif.
S’agissant de la mission Travail et emploi, la coupe dans les dépenses atteint quelque 1,1 milliard d’euros. Lundi, M. Cazenave n’avait divulgué qu’une partie du montant de l’addition : 200 millions d’euros en moins pour le compte personnel de formation (CPF), 200 millions d’euros soustraits des dotations pour les centres de formation d’apprentis (CFA) et 150 millions d’euros retirés au plan d’investissement dans les compétences (PIC) – un programme lancé en 2018 pour aider les chômeurs et les jeunes peu qualifiés.
L’écart entre les sommes inscrites dans le décret (1,1 milliard d’euros, donc) et celles évoquées, lundi, par le ministre délégué aux comptes publics (550 millions d’euros) tient au fait que celui-ci « a donné certaines des mesures à prendre », explique-t-on dans son entourage. Il appartient maintenant à Catherine Vautrin, la ministre du travail, « d’affiner et de documenter le quantum restant », ajoute-t-on à Bercy.
En dehors du CPF, de l’apprentissage et du PIC, quels seront les autres dispositifs soumis à un élagage ? Sollicité, le cabinet de Mme Vautrin a indiqué qu’il ne communiquera pas sur le sujet, pour le moment. « Ce que je comprends, c’est que les arbitrages ne sont pas encore faits », éclaire Stéphanie Rist, rapporteuse générale (Renaissance) de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.
« Des conséquences désastreuses »
Une chose paraît sûre : la mission Travail et emploi est l’une de celles qui est le plus touchée en valeur absolue. Toutefois, si on rapporte les crédits annulés à son budget total, l’amputation est de l’ordre de 5 %, ce qui est inférieur à d’autres secteurs, comme l’aide publique au développement (− 12,5 %) ou l’écologie et le développement durable (– 10,2%).
Plusieurs responsables syndicaux et patronaux se disent préoccupés. La contribution imposée au ministère du travail « est particulièrement lourde », déplore Yvan Ricordeau, numéro deux de la CFDT. Un tel effort pose un problème de cohérence avec « l’objectif affiché du plein-emploi en 2027 », ajoute-t-il : au moment où le marché du travail « n’est pas dans une bonne passe », tailler dans les crédits risque d’accentuer les difficultés. « On marche sur la tête, renchérit Michel Beaugas, secrétaire confédéral de Force ouvrière. Une fois de plus, ce sont les salariés qui vont faire les frais de la politique libérale du gouvernement, tandis qu’on ne demande rien aux entreprises. » Ces décisions n’obéissent pas à une vision claire, selon Jean-François Foucard, secrétaire confédéral de la Confédération française de l’encadrement-Confédération générale des cadres : le pouvoir en place agit « toujours en réaction, avec une seule constante, qui est de taper sur les faibles et sur ceux qui ne bougent pas ».
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