Coup de rabot budgétaire sur l’apprentissage
Le monde de l’apprentissage est soumis à une cure de sobriété budgétaire. Les crédits alloués aux organismes de formation vont être réduits en deux temps – de 5 % à compter du 1er septembre, puis d’un montant qui devrait être équivalent à partir du 1er avril 2023. C’est la conséquence de la délibération adoptée, jeudi 30 juin, par le conseil d’administration de France compétences, l’instance de régulation et de financement du secteur. Entre 750 et 800 millions d’euros d’économies sont attendues de ces arbitrages, qui ont été pris en concertation étroite avec l’Etat – à sa demande même, aux dires de plusieurs protagonistes. Une partie du patronat est mécontente, tout comme les responsables de structures accueillant des apprentis : ils craignent que ce double coup de rabot casse la dynamique favorable dont le système bénéficie depuis plusieurs années.
Si elle est controversée, cette décision ne constitue nullement une surprise. Elle résulte d’un processus engagé en décembre 2021 qui a consisté à passer en revue chaque financement – ou « niveau de prise en charge » – dédié aux contrats d’apprentissage. Un travail de bénédictin réalisé sur un peu plus de 42 000 valeurs.
L’un des buts de l’opération est de contribuer au renflouement de France compétences, dont le budget s’avère structurellement déficitaire : – 4,6 milliards d’euros en 2020, – 3,2 milliards en 2021… Cette année, le trou pourrait avoisiner les 6 milliards. Une situation synonyme d’« impasse financière », pour la Cour des comptes, qui a remis, le 23 juin, un rapport très documenté sur le sujet.
Primes exceptionnelles pour les patrons
Le problème est lié aux transformations profondes que l’apprentissage a connues durant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron. La loi de septembre 2018 « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » a cherché à promouvoir cette voie pour acquérir des qualifications en facilitant l’ouverture de centres de formation d’apprentis (CFA). Le texte a également bouleversé les modalités de financement : désormais, pour chaque jeune signataire d’un contrat, une somme est attribuée en fonction du « niveau de prise en charge » fixé par les branches professionnelles ou, à défaut, par l’Etat (sur proposition de France compétences). Parallèlement, des primes exceptionnelles ont été instaurées en 2020 au profit des patrons qui embauchent ce type de main-d’œuvre.
Toutes ces mesures sont à l’origine de l’essor impressionnant de l’apprentissage : en 2021, quelque 730 000 contrats ont été conclus, contre 290 000 cinq ans plus tôt. Revers de la médaille : France compétences n’a pas assez d’argent pour payer la facture. D’où les déficits récurrents, auxquels l’opérateur fait face à coups d’expédients (emprunts bancaires, subventions de l’Etat).
Il vous reste 63.9% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.