Coronavirus : le monde de la nuit crie au secours
Dans les loges du Moulin-Rouge, les effets personnels éparpillés des danseuses témoignent d’un départ précipité. Sur les coiffeuses en bois, le gel hydroalcoolique côtoie depuis longtemps les trousses de maquillage. Romane, dont le costume orné de milliers de strass et de plumes repose dans le casier, a « tout laissé en plan ». « Je pensais vite revenir. »
Depuis le 13 mars, le mythique cabaret et ses 800 places sont plongés dans le silence et l’obscurité. « Nos portes n’ont jamais été closes aussi longtemps, rappelle Jean-Victor Clerico, son directeur général. Même pendant la seconde guerre mondiale, l’établissement continuait d’accueillir du public. » La moquette rouge n’est foulée que par le personnel de maintenance et de sécurité, qui œuvre à la réouverture du lieu.
Quand ? La nuit se lamente de ne pas entendre un bruit. Ou alors des rires : ceux des députés lorsque l’un des leurs, Christophe Blanchet (LRM, Calvados), alerta pour la première fois à l’Assemblée sur le statut des discothèques, grandes absentes du processus de déconfinement. C’était le 19 mai. Neuf jours plus tard, le premier ministre, Edouard Philippe, les évoquait, pour dire qu’elles resteraient fermées au moins jusqu’au 21 juin. « Si on est capable de donner une date aux professionnels, cela leur donnera un espoir, insiste M. Blanchet. Il leur faut une réponse. Même si ça doit être septembre. »
Les loyers parfois à cinq chiffres, la difficulté de négocier avec les banques car le métier a mauvaise presse, il connaît : avant d’être député, il fut patron de boîte de nuit pendant vingt-quatre ans. Avec 38 collègues, il a écrit, mardi 16 juin, au chef du gouvernement pour alerter sur la nécessité « d’envisager une réouverture très rapide de ces établissements », avant l’été.
Vendredi 19 juin, le ministre de la culture, Franck Riester, a annoncé qu’il recevrait « très prochainement » des représentants du secteur des discothèques pour « trouver des solutions avec eux ». « Les conséquences sont dramatiques, c’est tout un secteur de l’économie qui est sinistré, avec une dimension culturelle puisqu’il y a toute la musique électronique qui est pénalisée par ce virus », s’est inquiété Franck Riester sur RTL.
Interdiction de fumer et contrôle d’alcoolémie
Le monde de la nuit revendique 42 000 emplois directs, souvent des jeunes dont le pécule accumulé l’été paiera le loyer et les études. Il craint une hémorragie, qui accélérerait l’érosion du secteur. Il reste 1 600 discothèques en France, moitié moins qu’il y a trente ans et 400 de moins que lors de la dernière étude de la Sacem, en 2013.
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