Coronavirus : en France, l’activité économique est en chute de 35 %, selon l’Insee

Coronavirus : en France, l’activité économique est en chute de 35 %, selon l’Insee

Dans un hypermarché, à Givors, près de Lyon, le 13 mars.
Dans un hypermarché, à Givors, près de Lyon, le 13 mars. JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP

A crise exceptionnelle, communication inédite. L’Insee a publié, jeudi 26 mars, sa première estimation de l’incidence de la crise sanitaire sur l’activité économique en France. Une publication précédée d’une introduction inhabituelle rédigée par le directeur général de l’institut de conjoncture, Jean-Luc Tavernier. Ce dernier précise avoir « cependant hésité avant de donner son feu vert » à la diffusion de cette estimation, en raison à la fois du côté « dérisoire » de tels calculs dans la période vécue et de l’aspect « fragile » des statistiques affichées. « Quoi qu’il en soit, pour incertain et imprécis qu’il soit, il m’a semblé que donner ce premier ordre de grandeur était préférable à ne rien dire du tout », conclut M. Tavernier.

Et les chiffres annoncés sont plus pessimistes encore que ceux qui ont pu être publiés par d’autres instituts de prévision : l’activité « instantanée », mesurée cette semaine par rapport à une semaine dite « normale », est en recul de 35 %, et un confinement d’un mois aurait un impact « de l’ordre d’une douzaine de points de produit intérieur brut [PIB] trimestriel en moins, soit 3 points de PIB annuel ». Deux mois de confinement auraient un effet deux fois plus important, soit la perte de 24 points de PIB trimestriel, correspondant à 6 points de PIB annuel.

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L’Insee souligne que « cet ordre de grandeur semble cohérent avec les premières informations disponibles sur la situation des salariés » : un tiers environ en activité sur leur lieu habituel de travail, un tiers en télétravail et le dernier tiers au chômage partiel. Il est également « compatible » avec la diminution observée de la consommation d’électricité, actuellement d’environ 20 % par rapport à une situation ordinaire.

Situations différentes selon les secteurs

Volontairement, l’Insee ne livre pas d’estimation de croissance pour 2020. « Cela dépendra notamment de la durée de cette période de confinement, que nous n’avons aucune légitimité ni aucune compétence à prévoir, précise Jean-Luc Tavernier. C’est peu de dire que ce que nous présentons aujourd’hui est fragile, susceptible d’être révisé. D’abord, parce que nos méthodes, dans une telle situation, ne sont pas éprouvées : c’est inédit dans l’histoire de l’Insee. C’est fragile aussi parce que la situation elle-même est très évolutive. »

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L’institut souligne également une grande différence de situations selon les secteurs. Certaines activités telles que les transports, l’hôtellerie et la restauration ou les loisirs sont très sévèrement touchées, alors que d’autres le sont moins, comme les télécommunications et les assurances par exemple. Environ les deux tiers des services marchands sont maintenus, estime l’Insee.

Dans l’industrie, environ la moitié de l’activité est maintenue, alors que les activités agricoles « devraient se poursuivre seulement un peu en deçà de la normale ». A noter également que dans certaines activités industrielles et dans les travaux publics, « l’activité reprend après s’être interrompue », alors que dans d’autres secteurs, par exemple dans les services aux entreprises, « le creux n’est sans doute pas encore atteint ».

Effondrement de la consommation des ménages

Cette très forte baisse de l’activité du pays résulte en grande partie de l’effondrement de la consommation des ménages, conséquence normale du confinement et de la fermeture des commerces. Les dépenses de textile, d’habillement, de matériel de transport sont réduites à leur plus simple expression, avec une baisse comprise entre 90 % et 100 %. D’autres dépenses comme l’électricité se maintiennent, tandis que la pharmacie, elle, est en hausse de 5 %. Au total, « nous estimons que la consommation totale des ménages français s’établit actuellement à 65 % de la normale », souligne l’Institut de la statistique.

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L’Insee complète ces éléments de conjoncture avec des notes sur le climat général des affaires : ce dernier perd dix points (à 95 points), soit « la plus forte baisse mensuelle de l’indicateur depuis le début de la série, en 1980 ». « En octobre 2008, après la faillite de Lehman Brothers, l’indicateur avait chuté de 9 points. » L’indicateur de climat de l’emploi connaît également sa plus forte chute depuis le début de la série, en 1991. Il perd 9 points pour atteindre 96 points.

Dans tous les secteurs, l’indicateur du climat des affaires se dégrade fortement, à l’exception toutefois de celui du bâtiment. « Cela confirme que ces indicateurs sont à lire avec prudence, ce mois-ci, souligne Jean-Luc Tavernier. Ils reflètent sans doute l’opinion des chefs d’entreprise début mars plutôt que fin mars. » Comprendre : le pire est plutôt à venir.

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