Le site d’information américain est déstabilisé par son modèle gratuit.
Les salariés de BuzzFeed ont reçu mercredi 23 janvier un mail de leur PDG dont l’objet, « changements difficiles », n’augurait rien de bon. Jonah Peretti, le créateur du site américain mêlant divertissement et journalisme, leur a confirmé la rumeur d’un large plan de licenciement. Selon plusieurs médias outre-Atlantique, l’entreprise s’apprête à supprimer 15 % de ses effectifs, soit entre 220 et 250 personnes. Ces limogeages interviendront dès la semaine prochaine, et devraient affecter l’ensemble des éditions internationales de BuzzFeed.
Ce n’est pas la première fois que le site est obligé de tailler dans ses effectifs. Fin 2017, la direction s’était déjà séparée de 20 personnes au Royaume-Uni et 100 aux Etats-Unis, soit 8 % de ses équipes. En juin 2018, BuzzFeed a décidé d’arrêter sa filiale française, entraînant le licenciement de 14 salariés parisiens. Mais alors que les journalistes avaient jusque-là été plutôt épargnés, la branche « information » du site devrait cette fois être touchée par ces nouvelles coupes.
Débuté en 2006, ce média en ligne gratuit s’est bâti sur les revenus tirés de la publicité, et en particulier sur le « brand content », ces contenus produits sur-mesure pour les annonceurs et prenant l’apparence d’articles ou de vidéos effectués par ailleurs par la rédaction. Mais ce format a très vite été adopté par ses concurrents et par la presse traditionnelle, tirant les prix de ces publicités vers le bas. Surtout, BuzzFeed a subi de plein fouet la captation des recettes publicitaires en ligne par Google, Facebook et de plus en plus Amazon.
Diversification
Pour joindre à cette fragilité, BuzzFeed, comme d’autres « éditeurs sociaux » (Vice, MinuteBuzz, Konbini, Melty…) a souffert du changement d’algorithme de Facebook. En janvier 2018, le réseau social a décidé de mettre en avant les contenus édités par les « amis » des utilisateurs, au détriment de ceux proposés par les médias professionnels.
Dans ce contexte, Buzzfeed s’attache depuis deux ans à trouver de nouveaux relais de croissance. « Tasty », son site consacré à la cuisine, vend ainsi des livres, des leçons de cuisine ou des ustensiles. L’entreprise a aussi investi massivement dans les contenus vidéo pour les revendre à des réseaux sociaux, comme Facebook et Snapchat, et à des chaînes de télévision.
Mais cette transformation n’a pas encore permis au groupe d’atteindre la rentabilité. « Malheureusement, la croissance des revenus en soi n’est pas suffisante pour réussir à long terme », écrit Jonah Peretti dans sa note aux salariés. Cette « restructuration » doit permettre à BuzzFeed de « réduire [ses] coûts » et de « contrôler [son] destin, sans plus jamais avoir besoin de lever des fonds », assure le PDG. De fait, le média vit sous la perfusion de ses actionnaires, au premier rang desquels le géant américain audiovisuel NBCUniversal, qui y a investi 400 millions de dollars (354 millions d’euros) depuis 2015.
Conversion au modèle payant
L’annonce de BuzzFeed illustre l’équation fragile que doivent résoudre les médias ayant opté pour un modèle gratuit sur Internet : faire valoir une audience toujours plus grande aux annonceurs pour que ceux-ci continuent à investir. Certains groupes de presse traditionnels ont dernièrement préféré instaurer un système donnant accès à un nombre limité de consultations (comme Libération et L’Express), ou étendre la partie payante de leur site (Le Monde et Le Figaro).
Une majorité de médias s’attacheront à faire de l’abonnement leur principale source de revenus en 2019 selon l’institut Reuters. C’est le cas de l’éditeur américain Condé Nast, qui a annoncé le 23 janvier qu’il allait basculer en 2019 tous ses titres dont Glamour, Vogue et GQ sur un modèle tout ou en partie payant. L’institut déclare toutefois que « la résistance des internautes risque d’être considérable » alors que « seule une petite minorité de personnes est prête à payer pour l’information ».
BuzzFeed semble pour l’instant éliminer de passer à un modèle payant. Fin novembre 2018, dans un entretien au New York Times, M. Peretti a plutôt évoqué l’idée d’une fusion avec d’autres médias en ligne, dont Vice et Vox Media, pour peser face à Google et Facebook dans les négociations avec les annonceurs. « Si BuzzFeed et cinq des autres [pure-players] s’unissaient dans un plus grand groupe de médias, on réussirait sans doute à être mieux payés », a-t-il estimé.
Le décalage de la croissance en 2018, qui avait conduit l’Insee à réviser ses prévisions pour le dernier trimestre, semble ne pas avoir eu de conséquence préjudiciable sur le marché du travail. Pas plus que le mouvement des « gilets jaunes », en dépit des besoins qu’il a engendrées dans le secteur du commerce et pour de nombreuses PME.
Grande diminution pour les jeunes
Une précision importante : l’évolution positive examinée au dernier trimestre 2018 résulte peut-être, pour partie, de raisons administratives. Le nombre de personnes relevant de la catégorie D (qui englobe celles dispensées de rechercher un poste parce qu’elles suivent une formation) s’est accru de 5,4 % durant les trois derniers mois de 2018 ; il n’est pas exclu que cette progression ait contribué à dégonfler les effectifs de la catégorie A.
Toutes les tranches d’âge profitent de l’amélioration constatée au dernier trimestre 2018. En métropole, le nombre de moins de 25 ans, en catégorie A, reflue de 2,9 % sur trois mois (– 1,3 % en un an). Idem pour les 25-49 ans, avec une baisse plus marquée en un an (– 2,1 %), et pour les personnes d’au moins 50 ans (– 0,1 % en douze mois).
Un grand point noir subsiste : le chômage de longue durée. Le nombre de personnes inscrites à Pôle emploi depuis un an ou plus, qui n’ont occupé aucun poste ou qui ont exercé une activité partielle, a encore augmenté : + 0,4 % sur les trois derniers mois (+ 5,1 %), sur l’ensemble du territoire.
A quoi faut-il s’attendre pour les mois à venir ? L’Insee a soutenu un début de réponse, dans sa dernière note de conjoncture diffusée en décembre 2018. Le taux de chômage sur l’ensemble du territoire (en incluant les outre-mer, sauf Mayotte) devrait diminuer très légèrement, pour s’établir à 9 % de la population active à la fin du premier semestre 2019, soit 0,1 point de moins qu’un an auparavant.