Retraites : « Le rôle du gouvernement sera de convaincre les Français que cette réforme est juste »

Dans une tribune au « Monde », des macronistes de gauche estiment que l’enjeu de la réforme des retraites portée par le rapport Delevoye n’est pas de reculer l’âge de départ à la retraite, mais d’augmenter le nombre d’actifs pour générer plus de cotisations.

Publié aujourd’hui à 06h00 Temps de Lecture 4 min.

Article réservé aux abonnés

« La réforme devant se faire à enveloppe budgétaire constante, il y aura des transferts entre les catégories professionnelles et donc des gagnants et des perdants ».
« La réforme devant se faire à enveloppe budgétaire constante, il y aura des transferts entre les catégories professionnelles et donc des gagnants et des perdants ». Letizia Le Fur/Onoky / Photononstop

Tribune. Contrairement à ce que l’on dit souvent, les Français ne sont pas opposés aux réformes. En réalité, ils sont prêts à les soutenir, à condition qu’elles leur semblent justes. C’est tout l’enjeu de la réforme des retraites.

Le rapport Delevoye (« Pour un système universel de retraite », voir lien PDF) propose un régime universel par répartition et par points. Un euro cotisé donnera les mêmes droits, quel que soit le métier exercé. Ce sera la fin des quarante-deux régimes actuels, qui ont chacun leurs règles, ce qui crée des différences de traitement importantes entre les cotisants, différences injustifiées et, donc, incomprises par les Français. Certes, des spécificités subsisteront pour tenir compte des particularités, comme celles des indépendants, par exemple, et c’est pour cela qu’il s’agit d’un système universel et non pas unique, mais les mêmes principes s’appliqueront à tout le monde. C’est indiscutablement un net progrès vers plus de justice sociale.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Age d’équilibre » à 64 ans, fin des régimes spéciaux : ce que préconise Delevoye pour la réforme des retraites

Dans le détail, le rapport contient de nombreuses avancées sociales : la garantie à 100 % des droits acquis, le maintien du dispositif des carrières longues, l’indexation de la valeur du point sur les salaires à terme (et non sur l’inflation), le principe d’un minimum de pension (fixé à 85 % du smic), une majoration pour enfant dès le premier enfant, un objectif de maintien du niveau de vie de la personne veuve pour la réversion et l’intégration des primes des fonctionnaires et des agents des régimes spéciaux dans l’assiette.

La réforme devant se faire à enveloppe budgétaire constante, il y aura des transferts entre les catégories professionnelles et, donc, des gagnants et des perdants. Le danger est que, comme dans toute réforme, les gagnants trouvent cela normal et les perdants s’opposent à la réforme. Qui seront ces perdants ?

Les fonctionnaires pénalisés

Il convient d’être prudent en l’absence de toute simulation effectuée, ou en tout cas publiée. Pour autant, il est indéniable que les affiliés aux régimes spéciaux feront partie des perdants puisqu’ils seront soumis au régime de droit commun et ne pourront plus partir à la retraite avant 62 ans. Mais ce n’est que justice. Comment, en effet, justifier une telle inégalité de traitement en leur faveur ?

Les fonctionnaires seront pénalisés par le fait que le niveau de leurs pensions ne sera plus indexé sur leurs rémunérations des six derniers mois, mais sur les rémunérations de toute leur carrière. L’intégration des primes dans l’assiette des points de cotisation compensera cette perte en totalité, en partie ou pas du tout, selon les corps de fonctionnaires. Les fonctionnaires de Bercy devraient s’y retrouver ; en revanche, les enseignants y perdront beaucoup.

Retraites : « L’aspect le plus controversé du nouveau système est celui de l’âge pivot »

L’économiste Adrien Fabre estime, dans une tribune au « Monde », que la réforme des retraites contient d’importants écueils, même s’il note des efforts louables de simplification et de lisibilité de l’ensemble du système.

Publié aujourd’hui à 06h00 Temps de Lecture 5 min.

Article réservé aux abonnés

« Le rapport Delevoye confirme que les catégories désavantagées par le cœur du système actuel sortiront gagnantes de la réforme : c’est le cas des femmes, qui connaissent en moyenne moins de progression de carrière que les hommes » (Photo: Jean-Paul Delevoye  et le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, le 28 juillet à Paris).
« Le rapport Delevoye confirme que les catégories désavantagées par le cœur du système actuel sortiront gagnantes de la réforme : c’est le cas des femmes, qui connaissent en moyenne moins de progression de carrière que les hommes » (Photo: Jean-Paul Delevoye  et le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, le 28 juillet à Paris). DOMINIQUE FAGET / AFP

Tribune. Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire à la réforme des retraites, a remis ses préconisations pour un système universel de retraites. Ce système fusionnera les quarante-deux régimes (à l’exception des indépendants) et appliquera les mêmes règles à (presque) toutes les professions. Le système à points permettra de corriger une injustice du système actuel, qui favorise les carrières ascendantes par rapport aux carrières plates.

Une note de l’IPP (Institut des politiques publiques), montre que, par rapport au système à points, le système actuel aboutit à des pensions environ 25 % plus faibles pour les 20 % aux salaires (cumulés le long de la carrière) les plus faibles. Cette injustice touche le cœur contributif du système actuel de retraites, et est en partie compensée par les dépenses de solidarité qui rendent l’ensemble du système véritablement redistributif.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Retraites : « Le schéma présenté est très cohérent avec l’intention initiale »

Mais le rapport Delevoye confirme que les catégories désavantagées par le cœur du système actuel sortiront gagnantes de la réforme : c’est le cas des femmes, qui connaissent en moyenne moins de progression de carrière que les hommes.

Vers une capitalisation individuelle

Outre l’égalité de traitement entre cotisants, le système à points garantit l’équilibre financier du système de retraites. En effet, le montant d’une pension d’un retraité sera calculé en fonction de l’espérance de vie de sa génération, du nombre de points accumulés et des recettes totales du système, de sorte que le total des retraites versées corresponde aux cotisations prélevées sur la période. Les Economistes atterrés pensent que cet équilibrage automatique est une façon de baisser les retraites en catimini, ce qui conduirait les gens à se tourner vers une capitalisation individuelle.

En effet, si les pensions et l’âge de départ semblent peu affectés dans le rapport, c’est qu’il simule le système actuel avec un recul progressif de l’âge du taux plein, pourtant non inscrit dans la loi. Pour autant, le système universel est peut-être la meilleure façon d’assurer la pérennité du système par répartition, puisqu’il annihile le spectre récurrent d’un déficit à résorber.

Huit applications pour trouver un job étudiant

Pour les étudiants à la recherche d’un job d’été de dernière minute, « Le Monde » a sélectionné quelques applications qui promettent de trouver un emploi en un clic.

Par Publié aujourd’hui à 05h45

Temps de Lecture 4 min.

Article réservé aux abonnés

« Toutes ces applications sont disponibles sur iOS et Android. Les réfractaires à Google peuvent aussi télécharger la plupart en format APK. »
« Toutes ces applications sont disponibles sur iOS et Android. Les réfractaires à Google peuvent aussi télécharger la plupart en format APK. » Philippe Turpin / Photononstop

Trouver un job étudiant alors que les vacances d’été sont déjà bien entamées, c’est possible. Aujourd’hui, une myriade d’applications promettent de trouver un emploi en quelques clics, dans la restauration, les services à la personne… Le Monde a sélectionné quelques-unes d’entre elles. Pour mettre toutes les chances de son côté néanmoins, mieux vaut faire feu de tout bois et ne pas négliger les sites de recherche d’emploi classiques ! Toutes ces applications sont disponibles sur iOS et Android. Sur ordinateur, les réfractaires à Google peuvent aussi télécharger la plupart en format APK, via ce lien, par exemple…

CornerJob : « Rechercher un job doit être aussi simple et rapide que de louer une chambre pour un week-end », fait valoir David Rodriguez, le PDG de CornerJob. Née en 2015, cette application, qui s’est depuis bien installée sur le marché de l’emploi, fait valoir sa simplicité d’utilisation. Après avoir enregistré son profil, l’étudiant candidate aux annonces qui l’intéressent et reçoit une notification lui indiquant si sa candidature est retenue ou non. Le cas échéant, il peut alors passer un entretien directement avec le recruteur via un chat intégré. Des entreprises comme Subway, Manpower, Total… passent par CornerJob, qui revendique 60 000 offres publiées par mois. Et les annonces semblent effectivement nombreuses : en faisant une recherche « test » pour un emploi de serveur à Argenteuil, nous avons trouvé une vingtaine de postes à pourvoir.

Lire aussi Les jobs d’été bénéficient-ils d’une exonération fiscale ?

Job Hopps : à la recherche d’un job pour la rentrée ? Les étudiants désireux de travailler à côté de leurs études peuvent s’enregistrer sur Jobhopps, une application spécialisée dans le travail complémentaire. Fondée par Hopps Group, une entreprise spécialisée, entre autres, dans la distribution de prospectus, elle compte comme partenaires des entreprises ayant largement recours aux salariés à temps partiel, comme O2, Burger King ou encore Pénélope. Les emplois proposés sont plutôt sur du long terme : l’application affichait fin juillet un peu plus de 7 000 CDI à mi-temps sur toute la France. Elle offre toutes les fonctions classiques de ce type d’application : géolocalisation, enregistrement du profil, envoi des candidatures…

Intérim en ligne

Une opération à La Pitié-Salpêtrière avec Da Vinci, le robot au service de la chirurgie

Automatisation des métiers (3/3). Quel est l’impact de la robotisation sur le monde du travail ? Dernier épisode de notre série avec un reportage sur une opération menée avec un robot chirurgical à La Pitié-Salpêtrière. Les Hôpitaux de Paris se sont dotés, fin 2018, de neuf robots de dernière génération.

Par Publié aujourd’hui à 16h12

Temps de Lecture 7 min.

Article réservé aux abonnés

Opération avec un robot chirurgical, à l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière, à Paris.
Opération avec un robot chirurgical, à l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière, à Paris. NICOLAS LEPELTIER/LE MONDE

L’imposant robot s’approche du malade, étendu sur le flanc dans un bloc opératoire de l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière (AP-HP). Avec l’agilité d’une araignée, Da Vinci – près d’une tonne de technologies – déplie ses quatre bras articulés au-dessus de la table d’opération. « Incision ! », annonce le chirurgien, qui donne quatre petits coups de scalpel de moins d’un centimètre sur l’abdomen du patient. Arrimés à l’extrémité des membres du robot, une mini-caméra endoscopique haute définition et des instruments de chirurgie sont introduits dans le ventre du malade, opéré pour l’ablation d’un cancer du rein.

Le chirurgien décrit avec fluidité des gestes tantôt amples, tantôt précis et rapides

A quelques mètres de là, assis dos à la table d’opération, le professeur Morgan Rouprêt a maintenant les yeux plongés dans le binoculaire de la console de contrôle. Aux commandes de deux joysticks, les pieds posés sur des pédales, le chirurgien du service d’urologie de La Pitié décrit avec fluidité des gestes tantôt amples, tantôt précis et rapides : section du péritoine et des tissus graisseux, pose de clips chirurgicaux pour la « mise hors circuit » de la veine et des artères irriguant le rein malade, coagulation de saignements…

Les instruments (pince, ciseaux, etc.) introduits dans le corps du patient reproduisent avec précision les gestes dictés par le praticien, dont les éventuels tremblements seraient corrigés par le robot. Sur l’écran de la console, la vision en 3D amplifiée de l’intérieur de l’abdomen du patient est saisissante. « Là, vous voyez à gauche, c’est la rate. Ici, c’est le côlon », détaille le professeur, qui zoome, tout en écartant l’organe avec une pince, pour étayer sa démonstration.

Si vous voulez voir un extrait de l’opération assistée par robot (attention, ces images peuvent choquer) :

« Le confort pour le chirurgien est inégalé »

Les robots chirurgicaux font depuis une vingtaine d’années une entrée remarquée dans les blocs opératoires. Dominé par le groupe américain Intuitive Surgical, en situation de quasi-monopole, le marché mondial devrait atteindre 6,5 milliards de dollars en 2023, contre 3,9 milliards en 2018, selon une étude du cabinet MarketsandMarkets. L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) s’est dotée fin 2018 de neuf robots Da Vinci de dernière génération, pour un montant global de 52 millions d’euros finançant, sur sept ans, l’achat des équipements et des consommables, la maintenance et la formation des équipes médicales.

« Avec le robot de traite, je me sens plus éleveur qu’avant »

Automatisation des métiers (1/3). Quel est l’impact de la robotisation sur le monde du travail ? Premier épisode de notre série en trois volets sur l’automatisation des métiers avec un reportage dans la ferme d’un éleveur laitier en Haute-Saône

Par Publié aujourd’hui à 16h11, mis à jour à 16h27

Temps de Lecture 6 min.

Article réservé aux abonnés

L’éleveur laitier Benoît Boivin dans sa ferme à Angirey (Haute-Saône), le 8 mai.
L’éleveur laitier Benoît Boivin dans sa ferme à Angirey (Haute-Saône), le 8 mai. RAPHAEL HELLE POUR « LE MONDE »

Une ferme au milieu de la campagne haut-saônoise, quelque part entre Vesoul, Besançon et Dijon : 120 hectares, 70 vaches, taille moyenne. Une production de lait bio, et un peu de céréales. C’est le printemps et la saison des pissenlits bat son plein. Dans la pâture parsemée de jaune, une partie du troupeau broute. L’autre est restée dans l’étable et digère le fourrage. L’intérieur du bâtiment est silencieux. Un chien aboie contre un chat perché sur une poutre. Une petite radio diffuse sa musique, qui se mêle à la rumination des vaches.

Soudain, Jouvence se lève. D’un pas lourd, la montbéliarde se dirige vers une porte métallique. Un capteur lit le numéro inscrit sur son collier. Elle est autorisée à entrer dans la salle de traite. Là, un robot de plus de 2 mètres de haut, équipé d’un long bras articulé, l’attend. Jouvence hésite, mais le bruit des granulés qui tombent dans l’auge la convainc d’approcher.

Le bras du robot se met alors en action. Une caméra repère les quatre quartiers du pis avant que des « gobelets trayeurs » ne s’emboîtent dessus. Une première fois pour nettoyer et éliminer les impuretés, une seconde fois pour traire. Dans un petit bureau à côté, Benoît Boivin, l’éleveur du troupeau, regarde des chiffres et des courbes défiler sur son ordinateur. Il sait tout : ce que Jouvence est en train de produire, la qualité de son lait, ses derniers passages au robot…

Ici, la traite est en libre-service. Les vaches peuvent aller se faire traire vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sans assistance humaine.
Ici, la traite est en libre-service. Les vaches peuvent aller se faire traire vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sans assistance humaine. RAPHAEL HELLE POUR « LE MONDE »

La ferme de la Sourceline, accolée au petit village d’Angirey, est une ferme du XXIe siècle. Robotisée, numérisée, équipée de caméras, de capteurs, de portes intelligentes, de logiciels informatiques. Ici, la traite est en libre-service. Les vaches peuvent aller se faire traire vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sans assistance humaine.

Pour Benoît Boivin, c’en est fini de l’astreinte répétitive et harassante de la traite mécanique, chaque matin à 5 h 30 et chaque soir à 17 heures, tous les jours de l’année. Le « bagne », pour ce père de famille de 50 ans qui l’a pratiquée pendant dix ans : « Une petite partie du métier, mais une grosse épine dans le pied. » La technologie, dit-il, a transformé son métier.

La ferme de la Sourceline est une ferme du XXIe siècle : robotisée, numérisée, équipée de caméras, de capteurs, de portes intelligentes, de logiciel informatique.
La ferme de la Sourceline est une ferme du XXIe siècle : robotisée, numérisée, équipée de caméras, de capteurs, de portes intelligentes, de logiciel informatique. RAPHAEL HELLE POUR « LE MONDE »

La Sourceline fait partie des quelque 10 % d’exploitations laitières en France à avoir fait le choix de la robotique. C’était en 2005, au moment où les ventes de robots de traite commençaient à grimper. Au départ, Benoît Boivin n’y était pas favorable. Trop cher (150 000 euros, sans compter les travaux pour aménager les infrastructures) et trop risqué. « Ma crainte, c’était d’être dépendant des industriels. J’avais peur qu’ils nous imposent leur façon de faire, de perdre un peu la main. » Mais les problèmes articulaires de Bruno, son associé de l’époque, ne lui ont guère laissé le choix. « Il était à cinq ans de la retraite. Il m’a dit : “Je suis fatigué, j’ai trop mal au genou. Si on ne prend pas un robot, je partirai.” »

L’intelligence artificielle, nouvel outil pour faciliter le travail des avocats

Automatisation des métiers (2/3). Quel est l’impact de la robotisation sur le monde du travail ? Deuxième épisode de notre série en trois volets sur l’automatisation des métiers avec un reportage dans un cabinet d’avocats qui a recours à l’intelligence artificielle.

Par Publié aujourd’hui à 16h10

Temps de Lecture 6 min.

Article réservé aux abonnés

SÉVERIN MILLET

Sur son bureau, aucune pile de dossiers, pas l’ombre d’une chemise de papier. Seules quelques éditions du code civil posées sur une étagère en guise de décoration et une robe noire accrochée au portemanteau trahissent son métier. Nathalie Navon-Soussan est une avocate « augmentée ». Sur son bureau épuré, un ordinateur portable renferme un précieux logiciel d’intelligence artificielle, qui accompagne désormais cette avocate au barreau de Paris, spécialisée en droit de la famille et en droit social, dans chacun de ses contentieux.

L’outil, dénommé « Case Law Analytics », est une solution mathématique permettant d’estimer les chances de réussite d’un procès, le montant des indemnités escomptées, et même les arguments les plus à même d’influer sur la décision des juges. Concrètement, cette intelligence artificielle (IA) – née de la rencontre entre deux Français, l’un mathématicien, l’autre magistrat – fait travailler un millier de « juges virtuels » possédant chacun son raisonnement propre.

Entre 200 et 300 « start-up du droit »

Par cette simulation, un client engagé dans une procédure de divorce apprendra, par exemple, que 800 de ces « juges » lui accorderont une prestation compensatoire. Que, parmi eux, 200 décideront d’un montant de 100 000 euros, mais que 600 n’iront pas au-delà de 75 000 euros, pour telle ou telle raison (durée du mariage, état de santé, revenus…). « Si vous allez dix fois au tribunal, vous aurez dix décisions plus ou moins différentes. C’est cet aléa que notre outil va quantifier en donnant l’éventail des possibles », résume le mathématicien Jacques Lévy Véhel, l’un des deux créateurs de « Case Law Analytics ».

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Des « juges virtuels » pour désengorger les tribunaux

Voilà près d’un an que Me Navon-Soussan et ses associés de la société Avocap 2.2 se sont dotés de cet outil. « Nous avons eu le sentiment qu’il y avait urgence, qu’il fallait prendre maintenant le virage du numérique », explique l’avocate, qui affiche trente ans de métier. Car derrière les murs de son cabinet, situé dans le 7e arrondissement de Paris, une bataille commerciale fait rage. Celle des « legaltech », les start-up du droit. On en compte entre 200 et 300 en France, selon les sources, qui proposent des services allant de la rédaction d’actes à l’audit de contrats, en passant par ce qu’on appelle la « justice prédictive », permettant d’anticiper, à partir d’une grande masse de données et par un jeu d’algorithmes, l’issue d’un litige.

« Il faut tout faire pour que l’automatisation des métiers favorise l’émancipation de l’homme »

La robotisation va-t-elle faire disparaître des emplois, ou bien en créer ? Pour Stefano Scarpetta, directeur à l’OCDE, elle met surtout les sociétés au défi d’adapter leur scolarité et développer la formation.

Propos recueillis par Publié aujourd’hui à 16h09, mis à jour à 16h39

Temps de Lecture 5 min.

Article réservé aux abonnés

Selon le dernier rapport annuel sur les perspectives de l’emploi de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), publié le 25 avril, 14 % des emplois dans les pays de l’OCDE sont susceptibles de disparaître (16,4 % en France) et 32 % pourraient être profondément transformés (32,8 % en France) avec l’automatisation des tâches et la multiplication des machines dans le monde du travail au cours des vingt prochaines années.

Stefano Scarpetta, directeur de l’emploi, du travail et des affaires sociales de l’OCDE, estime qu’il est urgent d’adapter le système scolaire aux nouvelles réalités, et de donner aux travailleurs des occasions de développer de nouvelles compétences par la formation tout au long de leur vie professionnelle.

Des études prédisent la disparition de 400 millions à 800 millions d’emplois avec l’automatisation. D’autres prétendent au contraire que la robotisation va créer plus d’emplois qu’elle ne va en détruire. Pourquoi une telle différence d’appréciation ?

Certains jobs vont disparaître, d’autres vont changer de façon importante. En même temps, la technologie numérique va créer de nouvelles opportunités d’emploi, dans les hautes technologies notamment, en complément de ce que les machines pourront accomplir à l’avenir. C’est pourquoi nous pensons, à l’OCDE, qu’il y aura plus de changements de nature des tâches que de pertes sèches d’emplois. Nous ne sommes pas inquiets par la perspective de ce qu’on appelle « un chômage technologique de masse ».

Nous craignons davantage une forte augmentation des inégalités sur le marché du travail entre les personnes qui ont les compétences pour saisir ces nouvelles opportunités, et d’autres, faiblement qualifiées, qui ont des compétences limitées pour répondre aux évolutions de l’emploi qu’elles occupent et qui resteront cantonnées dans des fonctions peu intéressantes et mal payées.

Quels secteurs d’activité sont les plus concernés par la robotisation ? Et pour quels types d’emplois ?

Presque tous les secteurs sont concernés : principalement la manufacture, car c’est un secteur où les tâches sont répétitives ; l’agriculture également est en train de changer de façon assez spectaculaire, car, même s’il y a peu d’emplois, de plus en plus de tâches sont réalisées avec le soutien de la technologie numérique.

« Vivre deux licenciements en un peu plus d’un an, ça fait très mal » : le repreneur de Whirlpool Amiens mis en liquidation

Il n’y a plus d’avenir pour la société WN, qui avait repris 182 salariés de l’usine Whirlpool d’Amiens (sur 282) après sa fermeture le 1er juin 2018 due à la délocalisation de sa production de sèche-linge en Pologne. Ce mardi 30 juillet, le tribunal de commerce de la capitale picarde a prononcé la liquidation de WN. En quatorze mois, WN avait enregistré un peu moins de 300 000 euros de chiffre d’affaires et 5 millions d’euros de dettes, selon des sources proches du dossier.

Le tribunal a validé, dans le même temps, la cession partielle de WN pour 6 euros symboliques à Ageco Agencement, une société d’aménagement en mobilier de magasins, créée en 2012 et déjà implantée sur le site, avec 52 salariés. Ceux-ci seront rejoints, dès le 19 août, par 44 ex-salariés de WN. Les 138 autres seront licenciés. « Vivre deux licenciements en un peu plus d’un an, ça fait très mal, souligne Antonio, un ancien délégué CGT de Whirlpool. Vingt personnes sont en arrêt maladie. Une cellule psychologique a été mise en place » par l’Etat en juillet, associée à Pôle emploi.

Lire aussi Un an après la reprise, la fin des illusions des ex-Whirlpool

« Leur entreprise peut être compétitive »

En septembre 2017, alors que Whirlpool avait déjà annoncé la fermeture de l’usine le 1er juin 2018, WN était apparu comme le sauveur, choisi par le géant américain de l’électroménager, propriétaire du site. Il indiquait avoir signé un accord avec l’industriel picard Nicolas Decayeux, le patron de WN et président du Medef de la Somme. Soulagés, les représentants syndicaux de Whirlpool avaient approuvé cette solution à l’unanimité. En octobre 2017, le président de la République Emmanuel Macron était venu apporter son soutien sans faille au projet.

Le président Emmanuel Macron visite l’usine Whirlpool d’Amiens, le 3 octobre 2017.
Le président Emmanuel Macron visite l’usine Whirlpool d’Amiens, le 3 octobre 2017. PHILIPPE WOJAZER / AFP

WN devait produire, notamment, des casiers réfrigérés connectés, appelés Shopping box, activité que reprendrait Ageco, qui a obtenu deux prêts de 1,7 million d’euros chacun de la part de l’Etat et de la région des Hauts-de-France. Ces box sont des boîtes métalliques dans lesquelles des livreurs déposent les commandes des clients qui viendraient ensuite les y retirer. Clin d’œil de cette histoire : Ageco Agencement commencera par rapatrier en France la partie de son activité « mobilier métal » sous-traitée jusqu’à présent en Pologne. Lors de l’audience, les dirigeants d’Ageco ont estimé que « les salariés sont compétents et que leur entreprise peut être compétitive », rapporte Daniel Valdman, administrateur judiciaire de WN.

La société n’a produit que quelques casiers et des pylônes pour ascenseurs. « On avait alerté le préfet de la Somme de l’époque sur l’inactivité du site dès octobre 2018, mais il est parti sans rien faire », déplore Antonio.

Tardivement, l’Etat a fini par réagir. Le 28 mai 2019, la préfète de la Somme, Muriel Nguyen, commandite un rapport qui révèle « une impasse de trésorerie très importante ». En clair, la caisse est presque vide. Pour elle, « la priorité, désormais, est de reclasser » les salariés. Un plan social se profile donc. Déjà, en mai, le régime de garantie des salaires (AGS) avait dû régler les paies des employés, la mise en redressement judiciaire intervenant le 3 juin. Elle paiera aussi celles de juillet.

« Qu’a fait Decayeux avec tout cet argent ? »

Pourtant, WN avait été bien dotée lors de la reprise : une subvention de 7,4 millions de Whirlpool et une de 2,5 millions de l’Etat. La région des Hauts-de-France avait payé 300 000 euros pour la formation. De quoi rassurer les salariés…

« Qu’a fait Decayeux avec tout cet argent ? », s’interrogent les salariés. Percevant leurs « interrogations », leurs « soupçons » lors de sa venue le 18 juillet, Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’économie, a commandité un audit sur les comptes de Wn, réalisé du 22 au 24 juillet par KPMG. Le rapport, présenté aux salariés jeudi 25 juillet et qui sera transmis au procureur en vue d’éventuelles poursuites, n’a calmé personne.

Lire aussi Ex-Whirlpool d’Amiens : le gouvernement annonce un audit sur l’utilisation de l’argent public

Sur 12 millions de recettes entre juillet 2017 et juin 2019, 5,3 millions ont payé les salaires, 4,8 les investissements et 1,8 les frais d’exploitation. Toutefois, des dépenses « à hauteur de 179 000 euros suscitent des interrogations quant à (…) leur lien avec l’intérêt social d’une entreprise en création », indique Bercy dans un communiqué. Il s’agit notamment, selon l’AFP, de location de logements, de voitures, d’une loge dans un stade de foot. « Les salariés sont super en colère et dégoûtés de voir que Decayeux a profité de cet argent », dénonce encore Antonio. M. Decayeux n’a pas répondu aux sollicitations du Monde.

L’expert prend la précaution, dans son rapport, d’indiquer que ses travaux « ont porté sur la comptabilité et les pièces justificatives, et pas sur l’opportunité des dépenses engagées ». « C’est consternant de voir que l’audit n’a pas été chargé de vérifier si les dépenses même justifiées par des factures correspondaient bien aux besoins de l’activité de WN ! », déplore Fiodor Rilov, l’avocat des salariés de WN.

« WN a en réalité permis à Whirlpool de se débarrasser d’un conflit social, par le biais d’une reprise sans projet sérieux »

Ces derniers ont demandé à leur avocat une expertise des comptes menée par un cabinet indépendant. Pour Me Rilov, « WN a en réalité permis à Whirlpool de se débarrasser d’un conflit social, par le biais d’une reprise sans projet sérieux ». Pour tenter de le démontrer, il a assigné devant le tribunal de grande instance d’Amiens WN et Whirlpool, afin d’obtenir divers documents : plan d’affaire de WN, contrat de cession entre Whirlpool et WN ainsi que les correspondances entre les deux entreprises et les ministères concernés et l’Elysée. L’audience est prévue le 11 septembre.

Sur France Bleu Picardie, vendredi 26 juillet, M. Decayeux a livré sa version des faits. Embaucher dès le début 182 salariés, « ce n’était pas mon projet initial [qui était de] recruter 50 personnes, a-t-il dit. Mais on m’a très vite demandé de monter un projet pour 180 personnes. » « C’était une opération d’image pour Whirlpool et M. Macron, faite sur le dos des salariés », affirme leur avocat.

Réagissez ou consultez l’ensemble des contributions

La consolidation s’accélère en Europe dans la livraison de repas à domicile

Le néerlandais Takeaway.com rachète le britannique Just Eat pour contrer Deliveroo et Uber. Les deux sociétés combinées affichent une valorisation boursière de près de 10 milliards d’euros.

Par Publié aujourd’hui à 10h51

Temps de Lecture 3 min.

À Londres, en décembre 2017.
À Londres, en décembre 2017. BEN STANSALL / AFP

Dans la course à la livraison de repas, un concurrent vient de quitter la piste : le britannique Just Eat. Il a annoncé, lundi 29 juillet, son rachat par son rival néerlandais Takeaway.com. Les deux sociétés combinées affichent une valorisation boursière estimée à près de 10 milliards d’euros, pour un chiffre d’affaires proche du milliard d’euros.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi La livraison de repas suscite l’appétit des investisseurs

Ce montant illustre, à lui seul, l’appétit croissant des investisseurs pour ce secteur en pleine consolidation. « Sur ce marché fou, des acteurs récents lèvent des sommes colossales comme Uber Eats et Deliveroo. Just Eat et Takeaway.com ont réagi à cette concurrence en fusionnant », affirme Sébastien Forest, fondateur d’Allo Resto, pionnier du marché français créé en 1998 et racheté par Just Eat en 2012.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi L’insatiable appétit de l’ogre Deliveroo

Lors de sa dernière levée de fonds, en mai, le britannique Deliveroo a récolté 575 millions d’euros. Avec cette opération, le montant total collecté par l’entreprise fondée en 2013 atteint 1,53 milliard de dollars (1,37 milliard d’euros). Surtout, le nouveau tour de table était mené par le géant de l’e-commerce Amazon. La société fondée par Jeff Bezos avait lancé son propre service Amazon Restaurants en Grande-Bretagne avant de jeter l’éponge, fin 2018. Ses nouvelles ambitions restent toutefois soumises au feu vert de l’autorité de la concurrence britannique.

Amazon n’est pas le seul géant du Web à vouloir croquer une part du marché de la livraison de repas. Uber met les bouchées doubles avec son service Uber Eats, force de frappe financière à l’appui. De quoi mettre la pression pour imposer sa marque dans l’esprit du consommateur.

Uber Eats, qui a fait ses débuts en France en 2016, a choisi de miser plus de 30 millions d’euros pour être sponsor titre de la Ligue 1 de football pendant deux ans, poussant Conforama sur le banc de touche. Il a également décidé de s’afficher sur le maillot de l’Olympique de Marseille pour trois saisons.

Adapter l’offre

Face à cette concurrence redoublée, les start-up de la livraison de repas sont confrontées au dilemme : grossir, être mangées ou disparaître. Déjà certains pionniers ont été rayés de la carte, comme le belge Take Eat Easy. D’autres ont coupé ou cédé des pans entiers d’activité. A l’exemple de l’allemand Delivery Hero, qui a purement et simplement liquidé sa filiale française Foodora à l’été 2018 avant de céder son activité britannique à Just Eat et son pilier allemand à Takeaway.com pour 930 millions d’euros.

Les investisseurs qui misent des dizaines, voire des centaines de millions dans les start-up du secteur se grisent des prévisions de croissance du marché

Delivery Hero poursuit sa route dans les pays en voie de développement. Pour sa part, l’américain DoorDash, qui a levé 600 millions de dollars au mois de mai, se consacre à la conquête des Etats-Unis face à Grubhub ou Postmates.

C’est dans ce contexte que Just Eat et Takeaway.com ont décidé de faire cause commune. A l’issue de cette OPA à 5 milliards de livres (5,5 milliards d’euros), le nouvel ensemble sera détenu à 52 % par les actionnaires de Just Eat, siégera à Amsterdam et sera dirigé par Jitse Groen, fondateur et patron de Takeaway.com.

Les investisseurs qui misent des dizaines, voire des centaines de millions dans ces start-up se grisent des prévisions de croissance du marché. Pourtant, la plupart de ces entreprises ne dégagent aucun bénéfice. Just Eat fait partie des exceptions. Initialement, à l’image d’Allo Resto, le service consistait en une mise en relation entre clients et restaurateurs, sans service de livraison. Un exercice bénéficiaire. Même si Just Eat a dû, à son tour, évoluer vers la livraison.

Lire aussi En colère, les livreurs de repas se mobilisent de nouveau pour leurs conditions de travail

Chaque entreprise s’efforce en effet d’adapter son offre pour réduire ses pertes, conquérir les clients et séduire les restaurants. En particulier les chaînes de restauration rapide telles que McDonald’s ou Starbucks, prêtes à nouer des partenariats. Mais le modèle économique de ces sociétés a une autre fragilité, et de taille : le statut des livreurs fait l’objet d’âpres batailles juridiques. Les cyclistes ne veulent pas être la dernière roue du carrosse des start-up de livraison.

Réagissez ou consultez l’ensemble des contributions

« Le procès France Télécom nous enjoint de renforcer le rôle des représentants du personnel »

Syndicalistes ou inspecteurs du travail, ceux qui ont stoppé la « machine infernale » à France Télécom sont affaiblis par les réformes du code du travail, plaide, dans une tribune au « Monde », Sophie Taillé-Polian, sénatrice (Génération.s) du Val-de-Marne.

Publié aujourd’hui à 06h00, mis à jour à 10h47 Temps de Lecture 4 min.

Article réservé aux abonnés

L’ancien PDG de France Télécom Didier Lombard lors du procès de l’entreprise à Paris, le 4 juillet 2019.
L’ancien PDG de France Télécom Didier Lombard lors du procès de l’entreprise à Paris, le 4 juillet 2019. STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

Tribune. Le procès des anciens dirigeants de France Télécom qui s’est achevé le 11 juillet [le jugement doit être rendu le 20 décembre] a mis en lumière les conséquences dramatiques d’une politique d’entreprise tournée uniquement vers le profit des actionnaires. Le premier constat que l’on peut en tirer est celui de l’inadéquation des outils de détection à la réalité des risques professionnels. Le second est que ceux qui ont permis à la machine infernale enclenchée par la direction de France Télécom de s’arrêter ont été, depuis, considérablement affaiblis par les réformes du code du travail des trois dernières années.

Pas moins de 19 suicides ont été comptabilisés et 39 personnes ont été reconnues comme victimes au total. Les dommages sont évidemment bien plus étendus. On ne saura pourtant jamais avec précision combien a coûté en souffrances et en vies humaines le plan « Next » qui, au début des années 2000, visait à faire partir en moins de trois ans 22 000 salariés sur 120 000. En effet, les règles actuelles permettent d’occulter une très grande part des atteintes à la santé qui sont le fait du travail, plus particulièrement les troubles psychosociaux. Par exemple, la reconnaissance d’une dépression à caractère professionnel est aujourd’hui un véritable parcours du combattant.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi France Télécom : « Un immense accident du travail organisé par l’employeur »

Responsabiliser davantage les employeurs

Alors, combien de pathologies déclenchées ou aggravées par l’exposition au stress chronique ? Il est urgent de rendre effective la possibilité de faire reconnaître ces atteintes à la santé relevant du travail, afin de permettre la prise en charge et la réparation pour les victimes et, surtout, afin de responsabiliser davantage les employeurs. Le procès France Télécom nous a permis de penser ces vies brisées et d’en parler. Mais il nous faut aussi également parler des vies « sauvées ». Sauvées par qui ?

Sauvées par des agents d’abord, qui ont soutenu leurs collègues, solidaires malgré l’effrayant dispositif mis en œuvre pour diviser les collectifs de travail. L’appui des collègues est une protection qui a permis à de nombreux agents de tenir ou de ne pas sombrer.

Sauvées par certains manageurs, ensuite, qui ont résisté autant qu’ils le pouvaient aux injonctions de leur hiérarchie pour faire partir « par la porte ou par la fenêtre » les salariés, malgré la peur, malgré les primes offertes à qui obtiendrait le plus de départs… Ceux-là nous rappellent qu’il ne faut jamais céder à la « banalité du mal ».