RATP : quatre jours de travail pour 303 stations de métro

Carnet de bureau. A la station Miromesnil, sur la ligne 9 du métro parisien, où a commencé, il y a tout juste un an, la première semaine de quatre jours à la RATP, l’assistant d’exploitation Ravinder Antoine, 52 ans, trente-deux ans de maison, commence sa journée à 5 h 20 ou à 6 h 30, selon la fonction qu’il occupe « postée » ou « en équipe de contrôle ». Mais ce qui ne changera plus désormais ce sont les « quatre réveils matinaux, au lieu de cinq ou six » dit-il, avec un sourire à la mesure de sa satisfaction.

Lancée il y a un an dans le cadre de l’accord qualité de vie et conditions de travail signé en février 2024, la semaine de quatre jours avait le double objectif de « minimiser le nombre de trajets domicile travail » et de proposer aux salariés « des horaires de travail plus adaptés aux contraintes » en respectant un double mot d’ordre de la direction : « à moyens constants » et « à durée du travail constante ».

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Ce sont les enquêtes de satisfaction qui ont convaincu la RATP de déployer son expérimentation de la semaine de quatre jours aux 303 stations de métro et à toutes les lignes de RER à partir du dimanche 9 février : 79 % d’agents se disaient « satisfaits » après la première phase menée au printemps 2024, après les Jeux olympiques (JO) de Paris, 90 % étaient prêts à « recommander à leurs collègues d’adopter la semaine de quatre jours », 94 % affirmaient que leur état de fatigue avait diminué.

La complexité d’un réseau ferroviaire

Quant à l’attractivité des métiers, « les 1 000 recrutements attendus en 2024 ont été réalisés, et les JO se sont très bien passés », note Jérôme Heine, responsable ressources humaines de la direction opérationnelle SEM RATP Groupe, qui un an plus tôt soulignait que la régie faisait face à 1 000 démissions par an. La CGT n’a toutefois pas signé le dernier accord, du 6 janvier, pour l’intégration des rythmes de travail, car le syndicat ne conçoit pas une semaine de quatre jours sans réduction du temps de travail.

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Retraites : la Cour des comptes espère que son diagnostic financier sera « indiscuté »

Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes, à Paris, le 12 mars 2024.

Pierre Moscovici sait qu’il avance en terrain miné. A la demande du gouvernement, le premier président de la Cour des comptes doit rendre un « état des lieux » sur les caisses de retraite qui, « espère[-t-il], sera indiscutable et indiscuté ». Cette formule prudente, employée vendredi 7 février lors d’un entretien à Sud Radio, suggère qu’il a un petit doute sur la manière dont sera accueilli son diagnostic. Celui-ci doit servir de base à la négociation que les acteurs sociaux vont engager sur la question, mais le risque existe qu’il soit contesté, surtout s’il intègre des hypothèses économiques moins favorables que celles qui avaient été privilégiées jusqu’à maintenant.

En remettant en chantier la réforme de 2023, qui a repoussé à 64 ans l’âge légal de départ à la retraite, François Bayrou a voulu que la réflexion collective s’appuie sur des chiffres robustes. Le premier ministre a, dans cette optique, saisi la Cour des comptes pour une « mission flash », dont les conclusions devraient être dévoilées le 19 février. Elles permettront de se forger une opinion sur les besoins en crédit de notre système par répartition, à « l’horizon » 2035 et 2045, a précisé, vendredi, M. Moscovici.

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« L’impact de l’IA sur la main-d’œuvre est positif, même pour des professions souvent classées comme vulnérables à l’automatisation »

La révolution de l’intelligence artificielle (IA), et plus particulièrement le développement spectaculaire de l’IA générative, suscite des débats passionnés. Tandis que certains économistes redoutent un impact négatif sur l’emploi en raison de l’automatisation, nous pensons au contraire que cette révolution peut transformer positivement nos économies, à condition de s’y adapter avec les bonnes politiques publiques.

L’IA peut accélérer la croissance de la productivité de deux manières : en automatisant les tâches nécessaires à la production de biens et de services, mais aussi en facilitant l’innovation. Des études récentes confirment cette dynamique : par exemple, dans une entreprise américaine de service client, les employés utilisant un assistant IA ont vu leur productivité augmenter de 14 % dès le premier mois et de 25 % après trois mois. Ces gains de productivité ne se limitent pas aux emplois peu qualifiés. D’autres études montrent des bénéfices similaires parmi les consultants en entreprise ou les avocats, les travailleurs moins productifs bénéficiant des effets initiaux les plus importants, réduisant ainsi les inégalités au sein des entreprises.

En passant du niveau microéconomique de l’entreprise à l’échelle macroéconomique de l’économie dans son ensemble, nos travaux considèrent deux approches pour estimer l’impact de l’IA sur la croissance potentielle au cours de la prochaine décennie. La première approche exploite le parallèle entre la révolution de l’IA et les révolutions technologiques passées. Sur la base de cette approche, nous estimons que la révolution de l’IA devrait augmenter la croissance de la productivité agrégée de 0,8 à 1,3 point de pourcentage par an au cours de la prochaine décennie.

Une seconde approche s’appuie sur un modèle de taches développé par le Prix Nobel d’économie 2024 Daron Acemoglu, et reprend l’analyse à la lumière des données disponibles dans les études empiriques les plus récentes. Ce faisant, nous estimons que l’IA devrait augmenter la croissance de la productivité agrégée de 0,07 à 1,24 point de pourcentage par an, avec une estimation médiane de 0,68. En comparaison, Acemoglu projette une augmentation de seulement 0,07 point.

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A Lidl France, les syndicats appellent à une « grève illimitée » pour une revalorisation salariale

Un supermarché Lidl, à Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine), le 31 mai 2023.

Le discounter d’origine allemande Lidl traverse un début d’année 2025 houleux en France. Cinq organisations syndicales de l’entreprise – la CFTC, la CGT, la CFDT, la FGTA-FO et le SNCDD – CFE-CGC – ont appelé les salariés à « une grève illimitée » à partir du vendredi 7 février. Ces syndicats demandent notamment une « revalorisation des salaires » et une « amélioration des conditions de travail ». Ils s’opposent aussi à un projet de généralisation de l’ouverture des magasins le dimanche, selon un communiqué publié mercredi par la CFE-CGC.

Une réunion prévue mercredi dans le cadre des négociations annuelles obligatoires, portant notamment sur le thème de la rémunération, s’est « soldée par un échec », a précisé la CFDT, qui regrette une « faible augmentation générale » proposée et une dégradation des conditions de travail. De son côté, le premier syndicat de l’entreprise, l’UNSA, a déclaré privilégier « pour le moment le dialogue » à la grève.

Jeudi, l’enseigne a dit à l’Agence France-Presse proposer « des mesures permettant de maintenir le pouvoir d’achat de ses salariés malgré un contexte économique complexe » et assure que « l’ouverture généralisée le dimanche dans tous ses supermarchés s’accompagne de la majoration à 50 % des heures travaillées le dimanche ».

A la mi-décembre, un avis du comité social et économique central (CSEC) « approuvé à l’unanimité des membres élus » faisait état d’une situation sociale « qui empire », selon un précédent communiqué signé par la CFTC, la CGT, la CFDT, la FGTA-FO et le SNCDD – CFE-CGC.

Dégradation des conditions de travail

« A nouveau, le CSEC constate que les salariés sont la seule variable d’ajustement de l’entreprise, ce qui entraîne systématiquement un report de la charge de travail sur ceux qui restent, détériorant davantage leurs conditions de travail », disait les élus, appelant la direction à ne « pas compenser la baisse de la marge issue de la guerre des prix par la réduction de la masse salariale ». A la fin de janvier, la FGTA-FO avait déploré « l’inquiétante dégradation des conditions de travail des salariés ».

La direction a évoqué récemment l’hypothèse d’une généralisation du travail dominical, alors que seule une partie de son parc magasin le pratique actuellement, selon des informations de presse confirmées par des sources syndicales.

Ce mouvement de grève survient quelques jours après l’annonce surprise du départ, au début de mars, du médiatique représentant de l’enseigne, Michel Biero. Arrivé à Lidl en 2001, il a été le directeur exécutif achats et marketing de Lidl France de 2011 à 2024, puis l’éphémère président et vice-président. Il a accompagné un important changement de stratégie de l’enseigne.

Depuis le début de la décennie 2010, l’enseigne est passée d’un modèle de hard-discount à davantage de qualité dans des magasins de format relativement réduit, avec moins de 2 000 références.

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Avec quelque 1 600 magasins et 46 000 salariés revendiqués à la mi-janvier en France, l’enseigne y est devenue au fil des ans un acteur significatif de la grande distribution alimentaire, dominée par E.Leclerc qui représente près du quart du marché.

Le Monde avec AFP

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Qu’est-ce que le harcèlement moral institutionnel ? Comprendre en trois minutes

En rejetant les pourvois formés par l’ex-PDG de France Télécom, Didier Lombard, et par son numéro deux, Louis-Pierre Wenès, le 21 janvier, la Cour de cassation n’a pas seulement définitivement condamné ces anciens dirigeants de France Télécom. Elle a aussi inscrit dans le droit une nouvelle mention, le « harcèlement institutionnel », qui pourrait faire jurisprudence.

Cette notion vient qualifier ce qui s’est déroulé au sein de France Télécom. A la suite de sa privatisation et pour résister à l’ouverture à la concurrence, l’entreprise a cherché, au début des années 2000, à faire des économies et à éponger ses dettes. Didier Lombard, le PDG de l’époque, a lancé le plan Next (pour « Nouvelles expériences des télécommunications »), qui prévoyait, entre autres, 22 000 départs en trois ans, soit celui d’un salarié sur cinq. Dans ce contexte, entre 2008 et 2011, plus de soixante employés se sont suicidés, et quarante ont tenté de mettre fin à leur jour, selon un recensement l’Observatoire du stress et des mobilités forcées (créé par les syndicats CFE-CGC et SUD-PTT).

Comment en est-on arrivé là ? C’est ce que nous expliquons dans cette vidéo. Pour approfondir le sujet, nous vous invitons à lire l’article ci-dessous.

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« Comprendre en trois minutes »

Les vidéos explicatives qui composent la série « Comprendre en trois minutes » sont produites par le service Vidéos verticales du Monde. Diffusées en premier lieu sur les plates-formes telles que TikTok, Snapchat, Instagram et Facebook, elles ont pour objectif de remettre en contexte les grands événements dans un format court et de rendre l’actualité accessible à tous.

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Protection sociale : des pistes pour améliorer les synergies entre l’économie et la « Sécu »

Des bureaux de l’administration de l’Assurance-maladie, à Arras, le 16 juin 2017.

L’Etat-providence peut faire bon ménage avec l’économie, à condition de s’appuyer sur des « stratégies bien choisies ». C’est l’un des principaux messages portés par le Haut Conseil du financement de la protection sociale, dans un rapport rendu public jeudi 6 février. Sur un sujet digne d’une thèse de doctorat, l’instance présidée par Dominique Libault se livre à une réflexion très approfondie qui aboutit à 56 recommandations concrètes, dont plus d’un tiers vise à améliorer le sort réservé aux travailleurs.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Le dérapage inéluctable du budget de la « Sécu »

Elle réaffirme, au passage, la nécessité de renforcer la prévention – dans le champ de la santé, entre autres – et de replacer les comptes de la « Sécu » sur une trajectoire de retour à l’équilibre, ce qui s’annonce ardu au vu des prévisions de déficit pour 2025 (environ − 22 milliards d’euros, selon le gouvernement).

L’expertise livrée jeudi répond à une commande passée en juin 2023 par Elisabeth Borne, alors première ministre. Celle-ci souhaitait une analyse consacrée « à l’ensemble de la relation entre production et redistribution », de manière à « bien positionner cette question dans le débat public ». Une telle démarche peut donner le sentiment qu’elle revêt surtout un intérêt académique mais il n’en est rien, en réalité, selon le Haut Conseil. L’enjeu, explique-t-il, est de sortir des discours manichéens qui assimilent la protection sociale à une charge insupportable pesant sur le portefeuille des employeurs.

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« A terme, l’Europe peut faire des directives sur la durabilité un atout face aux Etats-Unis ou à la Chine »

« Les choses vont bien pour nous », reconnaît Olivier Schiller, président-directeur général de Septodont, en ce matin du 31 janvier. Cette entreprise de belle taille – 440 millions d’euros de chiffre d’affaires, 2 200 salariés, 95 % de son activité à l’export – fabrique des produits innovants pour les dentistes. A une époque où le sourire ultrabrillant est de rigueur, tout va donc plutôt très bien. Tout, sauf une chose : l’entrée en vigueur progressive de la directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive, en anglais), qui établit de nouvelles règles de publication par les grandes entreprises d’informations liées à la durabilité sur le plan de l’environnement, du social et de la gouvernance.

C’est peu dire que cette directive, et sa sœur jumelle, la CS3D, qui porte sur la « diligence raisonnable des entreprises en matière de développement durable », font s’étrangler les chefs d’entreprise, tandis que de l’autre côté de l’Atlantique le duo Trump-Musk dérégule à tout-va. « La CSRD nous impose de renseigner 1 174 indicateurs différents, argumente Olivier Schiller, et pour chacun d’entre eux, il faut fournir une matrice de double matérialité – qui vise à donner une vision hiérarchisée des impacts de l’activité de l’entreprise sur son environnement –, mesurer les impacts et proposer un plan d’action. » A l’échelle de Septodont, la mise en place de la CSRD représente un coût initial de 500 000 euros, suivi chaque année de « dizaines de millions d’euros » de rémunération des consultants chargés du chantier, assure ce chef d’entreprise.

Dans le contexte du décrochage économique de l’Europe face à des Etats-Unis plus conquérants et puissants que jamais, les organisations patronales estiment que ce « délire bureaucratique », selon les termes employés par Jean-Laurent Bonnafé, directeur général de BNP Paribas, en novembre 2024, va mettre encore un peu plus en péril la compétitivité européenne. Un discours reçu cinq sur cinq par Stéphane Séjourné, vice-président de la Commission européenne chargé de la stratégie industrielle, et par le ministre délégué chargé de l’Europe, Benjamin Haddad. « Nos entreprises ont besoin de simplification, pas d’alourdissement administratif supplémentaire », a-t-il argumenté.

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L’IA générative dans les entreprises : le dialogue social se fait attendre

Logo de ChatGPT, l’outil d’intelligence artificielle générative développé par OpenAI.

Après le choc, le questionnement. Quand ChatGPT a été lancé, en novembre 2022, la banque Goldman Sachs estimait à 300 millions le nombre d’emplois pouvant être détruits dans le monde par l’irruption de cette technologie. L’heure était au catastrophisme. Depuis, l’intelligence artificielle (IA) est entrée dans les entreprises, mais les inquiétudes sur l’évolution de l’emploi demeurent et les questions sur le contenu du travail restent ouvertes. Ces dernières seront abordées lors du Sommet pour l’action sur l’intelligence artificielle, qui se tiendra à Paris les 10 et 11 février en présence de nombreux chefs d’Etat et de gouvernement, chercheurs, scientifiques, artistes, représentants d’organisations non gouvernementales.

La Commission de l’intelligence artificielle, dans son rapport de mars 2024, annonçait 5 % d’emplois « directement remplaçables » par l’IA dans un pays comme la France, avec des métiers plus vulnérables que d’autres, comme les professions intermédiaires administratives et commerciales. Deux mois plus tard, le cabinet de conseil McKinsey affirmait que, d’ici à 2030, plus de 30 % des heures travaillées en Europe et aux Etats-Unis pourraient être automatisées, accélérées par l’intelligence artificielle générative.

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