La reconversion professionnelle séduit de plus en plus les entreprises et les salariés

Lorsque le club de remise en forme où elle travaillait comme esthéticienne a brusquement fermé ses portes, Emilie Cornette, titulaire d’un CAP d’esthétique, a décidé de changer d’orientation. Après deux ans comme hôtesse d’accueil dans une société de recherche médicale, elle répond à une annonce pour un poste d’« office manager ». « Je ne savais pas ce que cela voulait dire, mais j’avais envie d’évoluer, de faire des choses nouvelles », avoue-t-elle. Les entretiens se passent très bien et, en décembre 2009, la voilà recrutée en CDI chez Michel & Augustin.

Par la suite assistante des dirigeants, Emilie est devenue responsable des services généraux et chargée des projets en ressources humaines de la société, qui a bien grandi. Outre le CAP de pâtissier – un passage obligé pour les employés de Michel & Augustin –, elle a suivi plusieurs formations pour assumer ses nouvelles responsabilités.

La reconversion ne concerne plus seulement des changements radicaux de filière, comme l’ouverture d’une chambre d’hôtes par un ex-banquier, qui faisaient sourire ou inquiétaient l’entourage. Elle se banalise pour le bonheur de ceux qui choisissent cette voie, et pour celui des entreprises, qui tentent d’attirer ces candidats au changement vers les métiers les plus en tension, et assument de les former. « A la quête de sens, à la recherche de nouveaux équilibres entre les vies privée et professionnelle qui ont suivi la pandémie liée au Covid-19, se sont ajoutées les transitions numérique, écologique et générationnelle. Cela a relancé la reconversion », explique Catherine Beauvois, directrice du projet Compétences 4.0 de France Travail (ex-Pôle emploi).

Selon le baromètre 2024 de la formation et de l’emploi de Centre Inffo, une association de service public sous tutelle du ministère du travail, la moitié des actifs préparent (21 %) ou envisagent (28 %) une reconversion, un chiffre élevé, mais qui demeure stable depuis 2021. Les moins de 35 ans et les personnes sans emploi sont de loin les profils les plus attirés par la reconversion.

Pas de regrets

Dans le numérique, le besoin de recruter massivement au cours des prochaines années a multiplié les écoles et les associations comme M2i, 42, Simplon, Diversidays, Wild Code School, qui proposent des formations rapides, aident au montage du financement et affichent des taux d’insertion professionnelle en moyenne de 80 %. Mais le parcours est loin d’être facile. Isabelle Dauchel s’est ainsi vu refuser sa demande de financement par Pôle emploi au prétexte que, titulaire d’un bac + 5, elle n’était pas prioritaire.

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La liberté d’expression politique du salarié

Droit social. Les élections politiques suscitent régulièrement des litiges sur l’expression politique du salarié. A priori la question est simple : « Toute personne a droit à la liberté d’expression », nous indiquent tant l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme que l’article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Sauf, précise la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, « à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi ». Ainsi, la liberté d’expression du salarié peut avoir des limites, notamment sur le lieu de travail où s’exerce le pouvoir d’organisation et de discipline de l’employeur.

La première limite s’applique à l’employeur. L’article 1121-1 du code du travail précise qu’il « ne peut pas apporter des restrictions à la liberté d’expression qui ne seraient pas proportionnées au but recherché dans l’intérêt de l’entreprise et justifiées par la nature des tâches accomplies par le salarié ».

Si la loi « travail » du 8 août 2016 a permis d’introduire, dans le règlement intérieur, l’outil qui précise notamment les règles de discipline à l’entreprise, une clause de neutralité interdisant par exemple le port de tout signe politique, celle-ci n’est toutefois admise que pour les salariés qui sont en contact avec la clientèle (Cour de justice de l’Union européenne, grande chambre, 14 mars 2017, aff. C-157/15 et C-188/15 ; Cass. soc., 22 nov. 2017, n° 13-19.855).

Pour le salarié, l’appréciation de l’abus de la liberté d’expression se fait au cas par cas. Dans un arrêt de la cour d’appel de Toulouse du 4 mars 2011 (n° 09-6144), les juges ont admis le licenciement d’un salarié qui avait fait preuve d’un militantisme politique actif pendant ses heures de travail, dans un établissement pour personnes âgées. Il récoltait auprès d’elles des chèques au profit d’une association de collecte de fonds qui finançait la campagne électorale d’un homme politique. Les litiges sur le prosélytisme politique reposant sur la liberté d’expression restent pourtant rares.

Droit au respect de la vie privée

Dans une affaire plus récente, un employeur avait prononcé une sanction au motif « qu’est fautif le salarié ayant des agissements de prosélytisme politique vis-à-vis de subordonnés, dans un cadre non dépourvu de tout lien avec la vie de l’entreprise ».

Cette motivation a été jugée insuffisante par une cour d’appel, approuvée en cela par la Cour de cassation (Cass. Soc. 29 mai 2024, 22-14.779). En l’espèce, les documents politiques en cause avaient été remis par le salarié sanctionné à un salarié hors de l’enceinte de l’entreprise et, d’autre part, la remise du programme politique litigieux à une autre salariée était intervenue à l’issue d’une remise de trophées de l’entreprise à laquelle tous deux participaient, mais en dehors du temps et du lieu de travail.

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« Accumuler du béton, tracer des routes » : les infrastructures, ciment du capitalisme

La pensée écologique se formule par vagues. Après celle du vivant, la production se focalise ces temps-ci sur la matérialité du monde. Critique de la transition énergétique, généalogie de la production, question minière… A ce programme déjà fourni, il manquait Accumuler du béton, tracer des routes (La Fabrique, 304 pages, 18 euros), essai brillant de Nelo Magalhaes qui retrace l’histoire environnementale des grandes infrastructures de transport bâties en France depuis 1945. Le chercheur à l’Institut de la transition environnementale y décortique les rouages de cette « monumentale production d’espace » formée par cet ensemble d’autoroutes, de canaux, de carrières et de déchets, qui a transfiguré le visage du territoire hexagonal en quelques décennies.

Cette histoire en cache plusieurs : l’espace n’est pas seulement physique, il fige des rapports sociaux. Héritant du meilleur de la tradition critique, Nelo Magalhaes se lance donc dans une histoire à la fois matérielle, technique et idéologique. Dans cette intrication tient le geste capital de ce docteur en mathématiques et en économie, qui repolitise un sujet si longtemps laissé aux experts, dont la fausse neutralité enrobe le dogme modernisateur porté par les intérêts industriels. Deux chiffres vertigineux résument ce gigantisme : depuis 1945, 20 gigatonnes de gravier et 10 gigamètres cubes de terres et sédiments ont été mis en mouvement. « En même temps qu’il a modifié l’atmosphère, le capitalisme a transformé la topographie terrestre. »

« Extractivisme ordinaire »

L’époustouflante densité de son essai, sourcé par sept cents notes, retrace d’abord l’histoire technique de ces réalisations reposant sur des « mégamachines ». De la géotechnique routière au développement des chaux hydrauliques, de la « cimentisation de la France » à l’épaississement généralisé du réseau, Nelo Magalhaes déroule une minutieuse histoire matérielle, sur laquelle il pose des outils critiques. « Abstraire les sols, c’est les détruire » : ces dynamiques sont captées en rapatriant des notions utilisées pour des territoires exotiques. La France est grêlée d’un « extractivisme ordinaire », qui balafre ses sols et violente le corps social, comme d’une logistique fondée sur un « échange écologique inégal », qui aspire les ressources lointaines tout en externalisant les dégâts.

Ce monde de béton cimente donc des dominations. La rematérialisation proposée par Nelo Magalhaes s’inspire évidemment du célèbre auteur de La Production de l’espace (1974), le philosophe marxiste Henri Lefebvre. Mais cette histoire ne se contente pas du rétroviseur : Accumuler du béton, tracer des routes assume son explosivité. D’abord, en se posant dans une conflictualité intellectuelle : l’essai s’achève par une critique frontale du Soin des choses (La Découverte, 2022), de Jérôme Denis et David Pontille, et du concept de « redirection écologique » porté par Diego Landivar. Ensuite, en revendiquant de chercher à muscler le logiciel des luttes actuelles. « Les Soulèvements de la Terre sont lefebvriens », affirme l’auteur. Seront-ils bientôt « magalhaesiens » ?

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Les très petites entreprises sont toujours les plus concernées par les difficultés de recrutement

Les demandeurs d’emploi adhèrent-ils à la formule « small is beautiful » ? A première vue, non, selon une étude de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministre du travail, publiée le 19 mai 2024 : les très petites entreprises (TPE) – qui emploient de un à neuf salariés – affichaient en 2023 un taux d’emplois vacants de 6,3 %, contre 2,3 % pour celles comptant dix salariés ou plus.

Les 247 000 postes à pourvoir dans les TPE représentaient à eux seuls 40 % du total des vacances, toutes tailles d’entreprises confondues, sur l’ensemble du secteur salarié privé. Pour ne rien arranger, le taux d’échec des recrutements est aussi plus important dans les TPE, constate la Dares.

Cela s’explique d’abord par les caractéristiques de ces petits employeurs, selon Eric Chevée, vice-président chargé des affaires sociales de la Confédération des petites et moyennes entreprises : « Ils tiennent à embaucher des gens immédiatement opérationnels car ils n’ont pas le temps de former. Etant plus exigeants, ils trouvent moins facilement. En outre, ce sont des chefs d’entreprise, pas des DRH : ils recrutent moins souvent, maîtrisent moins bien les processus de sélection et d’intégration. » D’où des erreurs de casting qui se soldent par des départs anticipés, occasionnant une nouvelle vacance de poste.

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Mireille Bruyère, enseignante-chercheuse en économie à l’université de Toulouse et au Centre d’étude et de recherche travail organisation pouvoir (Certop) du CNRS, pointe l’effet sectoriel : « Les secteurs qui ont des taux de vacance élevés liés à des conditions de travail difficiles, comme la restauration, sont ceux dans lesquels les TPE sont structurellement plus importantes. Et ils utilisent énormément les contrats de travail courts, donc il y a toujours des postes à pourvoir. » De fait, la Dares relève que les vacances pénalisent particulièrement les TPE du bâtiment et de l’hébergement-restauration.

Des problèmes administratifs et non de conditions de travail

Pour Laurent Barthélémy, président de la branche saisonniers de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie, qui représente les employeurs de l’hôtellerie-restauration, les difficultés des TPE de ce secteur à pourvoir les postes tient à des causes multiples : ces employeurs ne disposent pas de service RH, France Travail satisfait plus facilement les demandes des gros employeurs que des petits, et l’envol des prix de l’immobilier dans les régions touristiques dissuade les saisonniers de postuler quand ils ne résident pas déjà sur place.

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« Santé et travail, paroles de chômeurs » : être en recherche d’emploi, une « vallée de désespoir »

C’est un impensé des politiques publiques, mais aussi des cénacles de la recherche académique. La relation entre le chômage et la santé n’a jamais pu s’imposer comme un enjeu de santé publique digne d’attention, malgré des statistiques alarmantes : 14 000 décès seraient imputables au chômage chaque année, selon un rapport du Conseil économique, social et environnemental de 2016.

« Qui s’intéresse aux chômeurs ? (…) Que sait-on des vies qui se déroulent lors de ce temps de suspension de l’activité professionnelle ? » Palliant le manque d’intérêt pour le sujet, un ouvrage, Santé et travail, paroles de chômeurs (Erès), offre une plongée dans le quotidien des demandeurs d’emploi, fruit d’une recherche-action d’ampleur menée sur plus de deux ans.

Sous la direction de Dominique Lhuilier, professeure émérite en psychologie du travail, Dominique Gelpe, docteur en psychologie, et Anne-Marie Waser, sociologue, ces travaux nous proposent d’explorer cette « zone d’invisibilisation majeure », parfois associée hâtivement à une période d’oisiveté pour des « tire-au-flanc » qui « viv[raient] aux crochets de la société ». Les témoignages rapportés dans l’ouvrage mettent au contraire en lumière les douleurs et les doutes des demandeurs d’emploi, leur santé fragilisée, les impasses auxquelles ils font face, les addictions dans lesquelles, parfois, ils s’enferment.

Les auteurs font preuve de nuance. Ils évoquent, aussi, des cas où le temps du chômage peut être mis à profit pour « prendre soin de soi », trouver de nouvelles voies d’épanouissement personnel – temps passé avec des enfants, activités bénévoles… Bien souvent, toutefois, la souffrance domine. C’est le cas pour Paul, cadre de 55 ans, dont le corps, épuisé, a « lâché » à plusieurs reprises durant sa carrière, en raison d’un « surinvestissement au travail ». Il parle du chômage comme d’une « vallée de désespoir », un terrain d’« humiliation », où il a la sensation d’être « dans les pattes de la société », et d’ennuyer son entourage lorsqu’il évoque sa situation.

« Perte d’identité virile »

« Vous n’êtes plus le même bonhomme ! », juge-t-il. Une situation douloureuse à plus d’un titre : à la perte d’estime de soi qui accompagne l’absence d’emploi s’ajoute, pour certains chômeurs, la peur de retrouver le chemin de l’entreprise. « Je suis tétanisée à l’idée de retourner travailler », reconnaît une demandeuse d’emploi.

Les auteurs soulignent en outre que le chômage peut avoir des impacts variables en fonction du genre. « L’emploi est l’instrument de l’émancipation des femmes ; son absence ou sa précarité menacent l’autonomie et exposent à la dépendance économique », notent-ils. Elles sont tout particulièrement touchées par l’isolement social durant ces périodes. « La perte d’emploi au masculin est plus souvent liée à “la honte” », parfois synonyme de « perte d’identité virile ». « Je ne me sens plus un mec », explique Fabrice, 44 ans.

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Oups, mon collègue est devenu RN… ou la « ciottisation » de la vie professionnelle

Nous vivons un moment troublant de « ciottisation » de nos vies professionnelles. Président des Républicains – ayant proposé une alliance au Rassemblement national pour les élections législatives anticipées rejetée par les autres responsables du parti –, Eric Ciotti est emblématique de ces collègues que vous pensiez il y a peu encore indéfectiblement allergiques à l’extrême droite, et qui s’affichent désormais tout feu, tout flamme, pour le RN. « Une copine qui est AED [assistante d’éducation] dans un lycée pro de mon patelin est choquée : ce matin, elle a vu une enseignante de son bahut – une ancienne, expérimentée, respectée – quitter la salle des profs en lâchant bien fort à la cantonade “Vivement Bardella !” », rapporte le journaliste Olivier Cyran sur le réseau social X. D’après un sondage OpinionWay paru avant le 9 juin, un enseignant sur sept prévoyait de voter pour le parti d’extrême droite.

Bien entendu, chacun est libre de ses opinions mais, dans les faits, beaucoup d’entreprises ou d’institutions fonctionnaient jusqu’alors comme des cocons idéologiques, représentant des communautés de valeurs plus ou moins implicites. Cet entre-soi – questionnable, bien entendu – opérait également à une échelle catégorielle plus large : la sociologie du vote d’extrême droite, traditionnellement ancrée chez les employés et les ouvriers, a longtemps pu laisser penser aux membres de groupes sociaux plus favorisés que le RN, c’était ailleurs, que le RN, c’étaient les autres.

Depuis les résultats des élections européennes, le 9 juin, où la liste emmenée par Jordan Bardella a recueilli 31,6 % des suffrages, ce sentiment rassurant s’est dissipé : d’après une enquête Ipsos réalisée les 6 et 7 juin 2024, le RN a progressé, entre 2019 et aujourd’hui, de 13 % à 20 % chez les cadres, tout en renforçant son socle traditionnel. Le RN est ainsi devenu le premier parti des salariés (36 % des voix), dans le public (34 %) comme dans le privé (37 %). Croiser à la cafèt un type qui porte un tee-shirt « Jordan je t’aime » sous sa chemise n’est donc plus une hypothèse farfelue, et la suspicion est désormais de mise. « Là, j’ai la haine. Je me rappelle de mon collègue, ce fumier qui tenait des propos tendancieux, je suis sûr à 99 % qu’il a voté RN », s’énervait un utilisateur de X au lendemain des européennes.

Mue traumatisante

Cette mue traumatisante du collègue lambda en électeur d’extrême droite constitue la scène inaugurale de l’enquête prophétique Les Grands-Remplacés (Arkhê, 2020), de Paul Conge. Le journaliste y évoque notamment Joël, informaticien toulousain un peu gris, fils de socialistes, qui finit par se persuader que son monde est gangrené par l’immigration et le renoncement. Il se met alors à la muscu : « Happé progressivement par la propagande radicale de la “dissidence” sur Internet, il déroule désormais son “prêt-à-penser” sur ses collègues, ces “bobos” aux “corps de lâches”. »

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Salaires : une étude pointe les freins aux augmentations

Le constat est connu : en raison des revalorisations successives du smic intervenues depuis 2021, des millions de salariés situés juste au-dessus sur l’échelle des salaires se sont retrouvés « rattrapés » par le salaire minimum. Au 1er janvier 2023, 17,3 % des salariés du privé étaient ainsi rémunérés au smic, contre 12 % en 2021.

Lire le décryptage | Article réservé à nos abonnés Comment le smic a rattrapé des millions de salariés

Une mission a été lancée par Elisabeth Borne lors de la conférence sociale du 16 octobre 2023 pour trouver les explications à ce phénomène de nivellement par le bas des grilles de salaires. Parmi les principales thèses avancées par les économistes, celle de l’existence d’une « trappe à bas salaires ». Dès qu’on s’élève au-dessus du smic et jusqu’à un salaire équivalent à 1,6 smic, pour que le salarié touche 100 euros nets supplémentaires chaque mois, l’employeur doit débourser jusqu’à près de cinq fois plus, les cotisations sociales augmentant alors très vite. De sorte que les entreprises préfèrent ne pas augmenter les rémunérations de leurs employés – quitte à leur accorder des primes ponctuelles, non soumises aux prélèvements sociaux.

Pour vérifier l’impact réel de cet « effet socio-fiscal » sur les politiques salariales, l’institut économique Rexecode s’est livré, à la demande du Haut Conseil du financement de la protection sociale, à une étude de terrain. Selon ce travail mené avec Bpifrance auprès de 3 000 entreprises de toutes tailles, publié le mercredi 19 juin, les causes de la smicardisation sont plus complexes que le seul effet de « trappe à bas salaires ». Seules 8 % des entreprises consultées le citent comme le principal frein à l’augmentation salariale de leurs employés. En réalité, il va plutôt « amplifier les problèmes existants », souligne Olivier Redoulès, directeur des études de Rexecode.

Thème de la campagne électorale

Quels sont ces « problèmes existants ? ». En premier lieu, les contraintes purement économiques, comme la marge ou la trésorerie de l’entreprise. Ensuite, les donneurs d’ordre jouent un rôle essentiel dans les politiques salariales de leurs entreprises prestataires, notamment dans les services à faible valeur ajoutée. « Dans un certain nombre de secteurs, comme la sécurité, le nettoyage, l’entretien, les acheteurs regardent uniquement le prix du service proposé, explique M. Redoulès. Ce type de comportement des acheteurs conduit les entreprises à pressurer les salaires pour pouvoir emporter les marchés. » Voire à recourir à la sous-traitance en cascade. Et ce n’est pas que le fait du privé. La commande publique est aussi responsable.

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Relations amoureuses en entreprise : une affaire privée non sans risques de dérives

Le DRH « aurait dû révéler à son employeur sa relation amoureuse », dit un arrêt de la Cour de cassation publié le 29 mai. Faute d’avoir déclaré sa romance avec sa collègue syndicaliste, il a été licencié pour « faute grave ». C’était en Ardèche, dans l’entreprise de soierie et de textile synthétique Payen. Ce responsable des ressources humaines avait noué une relation intime avec une représentante du personnel.

Durant plusieurs années, les négociations s’étaient poursuivies entre direction et syndicats, sans que cette idylle ait été dévoilée. Dissimulation jugée coupable. Peu importe qu’un préjudice pour l’entreprise ait été ou non établi, la Cour de cassation a confirmé pour le DRH un licenciement pour « manquement à son obligation de loyauté ».

Sans être la norme, les relations amoureuses en milieu professionnel sont courantes, mais pas sans risques. « Tout le monde en parle à sa petite échelle. Mais à un niveau macro, personne n’en a vraiment la mesure », pointe le cabinet de conseil Technologia, expert en risques psychosociaux. Il n’existe pas de statistiques sur la fréquence de ces amours, mais de régulières enquêtes d’opinion menées par l’IFOP évaluent la part des couples qui se sont formés au travail autour de 15 %, selon l’IFOP. « La part des salariés qui déclarent avoir ou avoir eu une romance au travail est toujours entre 30 % et 50 %. Certains secteurs atteignent des records, comme celui de l’hôtellerie », indique le sociologue Jean-François Amadieu, spécialiste des organisations du travail.

Dans la récente étude « La romance au travail. Amour sexe & autres histoires », coréalisée par Technologia et l’université Paris-I-Panthéon-Sorbonne d’octobre 2023 à janvier 2024, les amoureux déclarent qu’en général tout se passe bien, mais témoignent de « risques importants » ou « très importants » de rumeurs (89 %) évidemment, de jalousies et coups bas en cas de rupture (88 %), de manque d’équité (82 %), de relations professionnelles biaisées (81 %), voire de mise à l’écart (76 %). Des dérives qui, après avoir affecté la qualité du travail, sapé l’autorité des manageurs, voire écorné l’image de l’entreprise, finissent parfois aux prud’hommes.

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Des implications professionnelles accompagnent toutes les étapes de la « belle histoire ». Quand le consentement est absent, des sollicitations inopportunes peuvent entraîner un salarié sur le terrain du harcèlement sexuel ou des agissements sexistes.

Durant la romance elle-même, d’abord une formidable machine à potins, cela risque d’être une source de favoritisme et de perte d’autorité qui peuvent mener à la sortie de l’entreprise. Le licenciement d’un responsable d’équipe de Transdev Ile-de-France a ainsi été confirmé par la Cour de cassation, parce qu’il avait envoyé des SMS à caractère déplacé et pornographique à une subordonnée durant leur relation. Ce comportement lui a fait « perdre toute autorité et toute crédibilité dans l’exercice de sa fonction de direction », indique l’arrêt qui précise que ces faits se rattachant à la vie de l’entreprise pouvaient justifier un licenciement disciplinaire.

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