« Au XIXe siècle, la solidarité avec les travailleurs étrangers est une question cruciale pour le mouvement ouvrier »

« Au XIXe siècle, la solidarité avec les travailleurs étrangers est une question cruciale pour le mouvement ouvrier »

Ouvriers polonais dans un atelier de broyage de scories phosphatées, dans le nord de la France, en 1922.

Chercheur au Centre d’histoire de Sciences Po, ­Nicolas Delalande, spécialiste de l’histoire de l’Etat, des solidarités et des inégalités, est l’un des maîtres d’œuvre d’Histoire mondiale de la France (Seuil, 2017). Il publie en janvier 2019 un livre sur ­l’internationalisme ouvrier de 1864 à 1914 (La Lutte et l’Entraide, Seuil).

Vous avez étudié la période de la fin du XIXe siècle et du début du XXe. Y a-t-il, à cette époque, dans le mouvement socialiste, des débats sur les migrations ?

Entre la création de la Ire Internationale, en 1864, et la première guerre mondiale, cinquante ans plus tard, la solidarité avec les travailleurs étrangers est une question cruciale pour le mouvement ouvrier.

D’abord parce que cette époque correspond à une phase d’intense mondialisation : en raison de la baisse des coûts du transport, la mobilité de la main-d’œuvre européenne et asiatique est très forte.

Ensuite parce qu’apparaissent, dans ces ­années-là, le syndicalisme et les premières grandes mobilisations ouvrières, notamment en Angleterre : pour briser les grèves, certains patrons font venir de Belgique ou d’Allemagne, parfois pour quelques semaines, une main-d’œuvre étrangère que les ouvriers anglais appellent les black legs et les ouvriers français les « sarrasins ». Ces travailleurs étrangers sont accusés de faire le jeu des capitalistes en acceptant des salaires plus bas et des conditions de travail difficiles.

Quelle est la position des socialistes face à cette mobilité ?

Les internationales (la IIe est fondée en 1889) sont favorables à la mobilité, mais à condition qu’elle profite aux ouvriers, pas aux capitalistes. Pour Karl Marx et Friedrich Engels, l’internationalisme est la clé du succès de la lutte des classes : puisque les capitalistes se coordonnent à l’échelle internationale, il faut que les ouvriers en fassent…

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LJD

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