Télétravailler de l’étranger est aujourd’hui un luxe et à terme un risque de délocalisation d’emplois

Télétravailler de l’étranger est aujourd’hui un luxe et à terme un risque de délocalisation d’emplois

La crise sanitaire l’a prouvé : le travail à distance fonctionne. Le télétravail est même devenu un argument de séduction pour les recruteurs. « En entretien d’embauche, un candidat sur deux demande à être en télétravail permanent », explique Jonathan Astruc, cofondateur de Digitevent, un éditeur de logiciels pour organisateurs d’événements, qui emploie vingt-cinq salariés en France.

Dans son entreprise, trois ou quatre salariés ont formulé la même demande, pour partir notamment vivre en Irlande ou au Brésil. Car les salariés y ont pris goût : ainsi, d’après une étude d’Hellowork publiée en septembre, déjà 11 % des personnes interrogées envisageraient de s’installer à l’étranger pour télétravailler.

« Dès lors qu’il devient possible de travailler sans mettre un pied dans l’entreprise, pourquoi les directions n’embaucheraient-elles pas directement en télétravail à l’étranger, notamment dans des pays où le coût de la main-d’œuvre est plus faible ?  »

Dès lors qu’il devient possible de travailler sans mettre un pied dans l’entreprise, pourquoi les directions n’embaucheraient-elles pas directement en télétravail à l’étranger, notamment dans des pays où le coût de la main-d’œuvre est plus faible ? Le risque d’une nouvelle vague de délocalisations est bien là.

Au tour des cols blancs

Après avoir touché d’abord les emplois peu qualifiés, puis les centres d’appels et le secteur informatique, la délocalisation pourrait concerner davantage de cols blancs. Un phénomène que confirme Matthieu Rosy, délégué général de la Fédération Syntec, qui représente plus de 3 000 entreprises du numérique, du conseil, de l’événementiel et de la formation professionnelle : « Le phénomène n’est pas nouveau dans notre secteur, mais il touche de plus en plus des postes à haute valeur ajoutée. »

En France, l’assureur-crédit Coface estime, d’après les chiffres de l’Union européenne (UE), que 35 à 40 % des emplois seraient télétravaillables. « Les conditions sont là pour une transformation de long terme, reconnaît Marcos Carias, économiste chez Coface et coauteur de l’étude « Télétravail : les risques et les opportunités de la délocalisation virtuelle », publiée en juin. Mais, aujourd’hui, beaucoup d’entreprises sont dans l‘urgence et cherchent avant tout à rétablir un lien avec leurs salariés, avec le travail hybride. »

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Thierry Tisserand, secrétaire général de la fédération CFDT Banques et assurances, le dit clairement : « Pour le moment, le souci est de préserver les collectifs de travail. » « Une chose est sûre, à terme la délocalisation virtuelle va prendre de l’ampleur, notamment pour les métiers ayant peu d’interactions avec le client », précise Marcos Carias.

Des métiers tels que ceux de comptable, ingénieur, développeur Web, data scientist, designeur, gestionnaire de paie, ceux des fonctions support, etc. pourraient quitter l’Europe pour des pays émergents. Parmi les secteurs les plus exposés : la banque et les assurances, dont 92 % des emplois sont télétravaillables en France, l’information et la communication (79 %) et le conseil (67 %).

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