Osez le féminisme ! saisit les Prud’hommes contre Miss France
Protester verbalement, année après année, contre un concours considéré comme « rétrograde » et « sexiste » ne suffisait plus. Cette fois, Osez le féminisme ! passe à l’étape supérieure. Accompagnée de trois demanderesses (qui préfèrent garder l’anonymat), l’organisation féministe universaliste intente une action aux prud’hommes contre Miss France. La requête aux fins de saisine, envoyée vendredi 15 octobre au CPH de Bobigny, vise Endemol Productions, la société qui organise le concours et l’émission diffusée sur TF1 chaque année, ainsi que la société Miss France en tant que co-employeur. « Nous avons beau protester chaque année contre ce concours qui véhicule des valeurs sexistes, rien ne change jamais, justifie Alyssa Ahrabare, la présidente de l’association. Cet effort de sensibilisation ne suffisant plus, nous avons décidé d’utiliser le droit pour faire avancer la cause des femmes. » Les griefs d’Osez le féminisme ! sont triples : la participation au célèbre concours de beauté reviendrait à livrer une prestation de travail ; le règlement imposé par Miss France comporterait des clauses discriminantes ; postuler au poste de Miss France relèverait de la discrimination à l’embauche.
Du point de vue des requérantes, la relation contractuelle commencerait dès la signature du formulaire de participation à la préparation des spectacles à l’échelon local, lorsque les jeunes femmes prétendent remporter l’élection qui leur permettra de représenter leur région au niveau national. Dès ce stade, les candidates doivent donner de leur temps « sans rapport avec la vie privée » pour se prêter à des répétitions et des prestations qui, in fine, les mènera à la réalisation d’une « émission à valeur économique » – un « show ». Selon Violaine de Filippis-Abate, l’avocate d’Osez le féminisme !, la relation de travail entre les « meneuses de revue » (terme employé par Endemol), et la société de production (entité du groupe Banijay, géant français de la production audiovisuelle) devrait faire d’autant moins de doutes qu’un arrêt de la Cour de cassation de 2013 concernant « Mister France » – une compétition similaire réservée aux hommes – l’a déjà établi.
Autre élément tendant à prouver le lien de subordination : les candidates doivent se plier à un certain nombre d’obligations, y compris en dehors des répétitions ou des enregistrements
Autre élément tendant à prouver le lien de subordination : les candidates doivent se plier à un certain nombre d’obligations, y compris en dehors des répétitions ou des enregistrements. Ainsi, elles sont sommées de ne pas boire d’alcool ou consommer des substances illégales en public, et, d’une manière générale, sont priées d’adopter un comportement qui ne soit pas « contraire aux bonnes mœurs, à l’ordre public ou à l’esprit du concours basé sur des valeurs d’élégance ». En cas de manquement, elles s’exposent à être disqualifiées.
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