Le podcast « Au turbin ! » s’interroge sur la santé des télétravailleurs
Evoquer les effets du télétravail sur le management et les risques professionnels, en s’adressant à ceux qui y veillent au quotidien : c’est le choix fait par la sociologue Amandine Mathivet dans son podcast « Au turbin ! ». La série de quatre épisodes, « Attention danger télétravail ? », fait parler des acteurs qui scrutent les conditions de travail : des inspecteurs du travail, des médecins du travail et des syndicalistes reviennent sur la manière dont ils ont exercé leurs missions durant la période de télétravail massif et imposé, et comment ils ont réussi ou échoué à protéger ou rester en lien avec les salariés.
La productrice et réalisatrice de ce podcast mensuel sur la vie au travail dresse des portraits, et structure ce bilan de la période Covid en quatre étapes. Amandine Mathivet s’intéresse en premier lieu à l’inspection du travail et aux 2 000 agents de contrôle en France, qui se rendent dans les entreprises pour contrôler les employeurs, rappeler les règles et le droit. Carole et Aurore, toutes deux inspectrices du travail en Ile-de-France, déplorent le manque de considération du gouvernement durant la crise, qui a freiné leurs interventions de contrôle dans les Ehpad, en raison d’une pénurie de masques pour le personnel, et les a mobilisés par la suite, pour faire la chasse aux salariés qui se rendaient de nouveau sur leur lieu de travail.
Les inspecteurs du travail se sont surtout sentis démunis face à un télétravail total qui a subitement concerné un quart des salariés. Mais les accords d’entreprises ont manqué au bon fonctionnement des organes de contrôle. Le travail à distance a donné lieu à de nombreux facteurs de dégradation des conditions de travail – durée du travail augmentée, contrôles abusifs des manageurs, troubles musculo-squelettiques dus à un manque de matériel adapté, chocs psychologiques – que les inspecteurs n’ont pu constater.
Les nouvelles approches des médecins du travail
Les deux inspectrices interviewées pointent aussi du doigt les décisions unilatérales des directions d’entreprise, alors que les recommandations gouvernementales n’avaient pas de valeur normative : « La seule valeur normative qui prévaut c’est l’obligation d’évaluer tous les risques professionnels auquel est confronté un travailleur, et de les limiter. » Inexorablement, pourtant, l’employeur a moins affaire aux risques professionnels lorsque ses salariés ne sont pas sous ses yeux, et il est compliqué de faire reconnaître des accidents du travail sans témoins.
Les inspectrices et la sociologue, qui invitent à inscrire les droits du télétravailleur dans le code du travail, pointent aussi la diversité des situations vécues : Carole et Aurore disent avoir été saisies de façon très contradictoire par des salariés qui ne télétravaillaient pas assez, car leur employeur les en a empêchés dès la sortie du premier confinement, ou d’autres au contraire télétravaillaient trop et se sentaient délaissés.
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