Les acquis sociaux, des conquêtes menacées
Histoire d’une notion. Intangibles, immuables, intouchables, inattaquables, immortels, ils sont gravés dans le marbre, arborés sur le fronton du syndicalisme. Ce sont les acquis sociaux, ces droits collectifs inscrits dans la loi, voire dans la Constitution, ou dans des accords d’entreprise ou des conventions collectives, auxquels tous les gouvernements, de droite et même de gauche, ont été soupçonnés de vouloir porter atteinte.
Ils peuvent concerner tous les salariés ou une partie d’entre eux. Ils dépendent d’un contrat de travail à durée déterminée ou indéterminée ou ils relèvent d’un statut, comme dans la fonction publique ou dans les entreprises publiques. Les syndicats en sont les gardiens intransigeants.
Il y a deux catégories d’acquis sociaux, ceux qui ont été arrachés de haute lutte par les syndicats, à l’issue d’une grève, de manifestations ou d’une négociation qui permettra à tous les salariés, et pas seulement à ceux qui sont syndiqués, d’en bénéficier, et ceux qui ont été octroyés par la puissance publique, lorsqu’elle prenait les devants pour éviter un mouvement social.
Rapport de forces
Symboles des progrès de la condition ouvrière, ces trophées font partie du patrimoine syndical. « Je crois à la négociation perpétuelle, aux petites améliorations grignotées chaque jour », assurait André Bergeron, ancien secrétaire général de Force ouvrière (1963-1989) et promoteur, durant les « trente glorieuses », du « grain à moudre ».
Un bon nombre d’acquis résulte d’un rapport de forces favorable aux syndicats. Il en est ainsi de la loi de 1919 instaurant la journée de 8 heures de travail et la semaine de 48 heures, revendication de la CGT, et, la même année, de la création de conventions collectives. Certains droits sont le fruit d’une conjonction entre des demandes syndicales et l’orientation progressiste d’un gouvernement comme sous le Front populaire avec les congés payés et la semaine de 40 heures. Toutes les avancées en matière de réduction de la durée du travail, jusqu’aux lois Aubry de 1998 et 2000 sur les 35 heures, découlent, peu ou prou, de combats syndicaux.
Il en est de même pour ce qui touche à la protection sociale, avec la création en 1945 de la Sécurité sociale, inscrite dans le programme du Conseil national de la Résistance, œuvre de tous les partis et des syndicats CGT et CFTC. Même si c’est le régime de Vichy qui a mis en place, en 1941, la retraite par répartition, les syndicats ont agi avec constance pour l’abaissement de l’âge de la retraite, leur principale victoire étant la retraite à 60 ans, en 1983, sous la présidence de François Mitterrand.
Il vous reste 52.25% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.