L’argot de bureau : le « nudge », une injonction qui ne dit pas son nom

L’argot de bureau : le « nudge », une injonction qui ne dit pas son nom

Lorsqu’il a collé au centre de chaque urinoir la photo d’une mouche, le responsable de la propreté de l’aéroport d’Amsterdam ne se doutait pas qu’il venait d’effectuer le « nudge » le plus célèbre de l’histoire. Cette incitation inconsciente à viser une cible a réduit les frais de nettoyage de 20 % !

En management, le « nudging » est une méthode « douce » fondée sur l’encouragement. Dans un stage de remotivation des équipes par le saut en parachute, Corinne, la directrice, choisit de ne pas donner une grande claque dans le dos de Jean-Michel, qui a le vertige. Imprégnée de « nudging attitude », au moment fatidique, elle lui inflige plutôt une poussette indolore, ce petit rien qui lui fera surmonter ses peurs et effectuer le grand saut. Le voilà qui s’élance en criant. Arrivé au sol, il sera pourtant fier de lui.

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Pour saisir le concept, il suffit de se tourner, comme souvent, vers l’origine du mot anglais : « to nudge » signifie « pousser du coude ». En économie comportementale, puis en marketing, en management et même en politique publique, ce « coup de coude » a progressivement acquis une connotation positive.

Oui à la proposition, non à l’injonction

Le but est de provoquer la bonne décision : discrètement, on persuade le salarié d’agir d’une manière raisonnée avec le savoir-faire qu’il possède. L’idéal est qu’il ne s’en rende pas compte et pense qu’il a eu l’idée tout seul. Le nudging joue donc sur les émotions, les instincts, et tous les « biais cognitifs » qui nous éloignent des comportements rationnels, pour que l’on soit plus efficace. Pour paraphraser le père de l’économie Adam Smith, on pourrait donc parler d’une « main invisible » du management.

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Le nudging fait le pari de l’accompagnement plutôt que celui de la subordination, et préfère la proposition à l’injonction. Il est souvent qualifié de « paternalisme libertarien », car il se dit bienveillant et non contraignant. Dans le métro lyonnais, une expérimentation datant de 2014 consistait à afficher des messages d’encouragement sur les marches d’escalier, comme : « Ta bonne santé est au bout de cet escalier »… Opération réussie, cela a permis de mettre « en panne » l’escalator plus souvent, et d’économiser de l’énergie.

L’art du changement inconscient

En entreprise aussi, les changements vertueux pour les salariés le sont surtout pour la boîte. « Le vrai paternalisme, c’est d’aimer les autres pour soi-même », disait Pierre Dac. La pratique vise à accroître l’engagement au travail.

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LJD

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