« On a beau être combatif, vient un moment où on s’écroule » : la détresse des petits patrons face à la crise

« On a beau être combatif, vient un moment où on s’écroule » : la détresse des petits patrons face à la crise

Ricardo Blanch, 64 ans, patron de Paris Querido Voyage. Aubervilliers.

BRUNO FERT POUR « LE MONDE »

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Publié aujourd’hui à 01h12, mis à jour à 10h18

Des crises, ces chefs d’entreprise en avaient pourtant traversées. Mais aucun n’aurait imaginé connaître pareille déflagration. « Vous avez beau vous débattre dans tous les sens, ne plus dormir, chercher toutes les solutions, vous ne pouvez rien contre une activité qui ne repart pas et des banques qui refusent de vous aider », lâche Roger (qui a souhaité conserver l’anonymat), visage marqué, seul au milieu des scies à panneaux et des plaqueuses empoussiérées, dans ses grands entrepôts déserts.

Voilà sept mois que les machines de sa société d’événementiel, spécialisée dans la conception de stands pour les foires et salons, sont à l’arrêt, et que son équipe de vingt et un salariés est au chômage partiel. Avec l’interdiction des grandes manifestations, son secteur est l’un des plus sinistrés par la crise liée au Covid-19. Celle-ci a frappé « au pire moment » : l’entreprise réalise 70 % de son chiffre d’affaires entre février et juin. Sept mois que le dirigeant niçois de 58 ans frappe à toutes les portes pour tenter d’obtenir des aides et stopper cette descente aux enfers. En vain. Trésorerie exsangue, dettes qui s’accumulent, refus du prêt garanti par l’Etat (PGE) par les banques, assignation d’expulsion du bailleur… Au pied du mur, Roger vient de déposer le bilan.

Une hausse des défaillances se profile – de l’ordre de 21 % d’ici à 2021

Sur près de quatre millions de petites et moyennes entreprises (PME), combien sont-ils, ces dirigeants qui, en ce moment, livrent une bataille à corps perdu pour tenter de « sauver la boîte » ? Alors que peu de procédures ont été engagées durant le confinement et que les entreprises étaient assez protégées de la faillite par différents dispositifs, une hausse des défaillances se profile – de l’ordre de 21 % d’ici à 2021, selon un rapport de l’assureur-crédit Coface publié début juin. Evénementiel, restauration, tourisme, artisanat… autour de lui, Roger ne compte plus ceux qui se préparent à mettre la clé sous la porte.

Lire aussi : « Près de 100 000 sociétés pourraient disparaître d’ici la fin de l’année »

A Armentières (Nord), Rousselle Industrie, petite société quasi centenaire qui fabrique des machines pour la chimie, y a échappé de peu. Après des mois à remuer ciel et terre, Eric Plaisant a fini par arracher les accords de prêts qui conditionnaient le redémarrage de son activité. Reste à ce que les fonds soient versés. Soulagé, le patron de 59 ans est aussi « à genoux » : « Six mois comme ça, c’est l’équivalent de trois ans. On a l’impression qu’on ne verra jamais le bout », dit-il. La société se relevait à peine de la crise de 2008 et d’un plan de continuation sur dix ans. L’homme, lui, a encore besoin de somnifères pour trouver le sommeil.

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