« L’expérience du confinement a montré les limites du cadre juridique du télétravail »
Tribune. La pratique du télétravail, qui concernait un quart des salariés en mai selon le ministère du travail, n’a cessé de reculer depuis le déconfinement pour ne concerner plus que 17 % des salariés en juin, puis 10 % en juillet. La question est de savoir si elle ne va pas revenir à la situation antérieure à l’épidémie de Covid-19. En 2017, le télétravail régulier ne concernait que 3 % des salariés. En toute logique, avec le déconfinement, certaines entreprises ont abandonné le télétravail car elles n’étaient pas dotées d’un cadre permettant de structurer cette pratique.
Or, étant donné que le télétravail peut s’accompagner d’effets positifs aussi bien que négatifs, il est important que l’engagement d’une entreprise sur ce sujet soit réfléchi et débattu. C’est pourquoi un accord d’entreprise apparaît particulièrement adapté, d’autant que le cadre légal régit finalement assez peu certains aspects du télétravail. L’expérience du confinement a en effet montré les limites du cadre juridique actuel. Ce constat a entraîné des discussions entre les partenaires sociaux, qui pourraient aboutir à un accord national interprofessionnel (ANI).
Une fois passée cette étape, la négociation d’entreprise va progresser et le nombre d’accords de télétravail va augmenter de deux manières : de nombreuses entreprises dépourvues d’accord vont en conclure, et celles déjà couvertes par un accord souhaiteront l’adapter et dépasser certaines lacunes révélées par le confinement. Dans cette perspective, notre analyse de 125 accords d’entreprise sur le télétravail, conclus avant l’épidémie de coronavirus, nous permet d’identifier des évolutions souhaitables pour les futurs accords.
Distinguer plusieurs catégories de télétravailleurs
Tout d’abord, les critères d’éligibilité doivent être réévalués à l’aune du confinement. Il s’agit principalement du temps de présence et de l’ancienneté, et, dans une moindre mesure, de critères liés à la profession ou au service. Rarement définis, ces derniers sont laissés à la libre appréciation du manageur. Nous conseillons au contraire de les faire reposer sur des éléments objectifs afin d’assurer une égalité de traitement entre les salariés.
Les accords devraient également distinguer plusieurs catégories de télétravailleurs, basées sur les notions d’autonomie et de contrôle et intégrant les situations de travail et le descriptif des tâches. La pratique montre que les télétravailleurs parviennent à dégager de l’autonomie dans l’organisation de leur temps de travail alors que les accords ne l’envisagent généralement pas (plus des deux tiers des accords analysés prévoient majoritairement les mêmes horaires qu’au bureau).
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