L’épargne salariale peut-elle compenser le gel des salaires ?

L’épargne salariale peut-elle compenser le gel des salaires ?

« Les salariés comme les patrons de PME sont plus friands de mesures individuelles que collectives », explique Stéphanie Pauzat.

Alors qu’un DRH sur deux affirme avoir pris des dispositions pour réduire ou remettre à plus tard les augmentations salariales, selon une étude de Willis Towers Watson publiée le 25 mai, le ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin, proposait, le 24 mai dans un entretien au Journal du dimanche, de « généraliser » les dispositifs d’épargne salariale : participation, intéressement et actionnariat salarié. Ou comment donner du pouvoir d’achat aux salariés, qui risquent fort de devoir se serrer la ceinture en matière d’augmentations. « Un tiers des entreprises ont déjà gelé les salaires et 16 % l’envisagent », précise l’étude du cabinet de conseil.

Pour Xavier Hollandts, professeur à Kedge Business School, les déclarations du ministre sont « inattendues et hors sujet, à l’heure où la priorité des entreprises est leur survie et le maintien en emploi. Il y a erreur de timing ! De plus, c’est une fausse bonne idée, car, comme son nom l’indique, il s’agit d’un outil d’épargne qui n’a pas vocation à augmenter le pouvoir d’achat dans l’immédiat. Il constitue une rémunération différée. »

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Inès Minin, secrétaire nationale de la CFDT, y voit, elle aussi, un risque de dévoiement de l’outil censé financer des projets à moyen et long terme. « Nous sommes partisans de l’épargne salariale, mais le vrai sujet actuellement est celui de la valorisation des bas salaires, notamment ceux des salariés en première ligne durant la crise sanitaire. »

« Vers un capitalisme plus redistributif »

« Gérald Darmanin a évoqué un vrai sujet, estime pour sa part Benoît Serre, vice-président délégué de l’Association nationale des DRH (ANDRH). Pour sortir de la crise, il est indispensable d’associer l’ensemble des salariés à l’objectif de l’entreprise et de trouver de nouveaux leviers de reconnaissance et d’équité. Une des voies serait d’associer les accords de performance collective [ces accords visent à préserver l’emploi en jouant sur le temps de travail, la rémunération ou la mobilité] et les dispositifs d’épargne salariale, afin de prévoir la répartition de la valeur créée. Les entreprises et les partenaires sociaux pourraient se montrer innovants en négociant de tels accords. »

Les dirigeants d’entreprise du réseau CroissancePlus applaudissent des deux mains l’idée d’une généralisation de l’actionnariat salarié, sauf « si elle venait à s’accompagner de mesures trop contraignantes, tient à préciser Thibaut Bechetoille, président de l’association. Le partage des fruits de la croissance est une urgence. Devant la résurgence d’un contexte social menaçant, il faut associer très largement les collaborateurs au capital de leur entreprise. Nous devons aller vers un capitalisme plus redistributif et, dans cette période très particulière que nous vivons, le développement de l’actionnariat salarié enverrait un signal fort et très positif ».

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LJD

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