Profession avocat : « « Harcèlement moral, sexuel, violence verbale, pression du chiffre… »
« La Face cachée de la robe »,
« C’est bon, tu l’as ! » Lorsqu’elle saisit ces mots, Anaïs de la Pallière n’en croit pas ses oreilles. Elle fait quelques pas de danse puis pleure de joie : elle est perçue à l’école du barreau. « Je ne me doutais pas que la partie était encore loin d’être gagnée et que le désenchantement n’allait pas tarder », écrit-elle dans La Face cachée de la robe. Dans son livre, l’avocate du barreau de Paris décrit les pièges, les déceptions et les mensonges auxquels les jeunes avocats et les jeunes avocates sont comparés. « Harcèlement moral, sexuel, violence verbale, pression du chiffre, humiliation, intimidation, temps de travail à rallonge, salaire dérisoire au regard du niveau d’études, du travail fourni et de la valeur directement créée, rien ne fait défaut dans une profession où la vocation première devrait être la défense de l’autre. »
Selon le rapport sur l’avenir de la profession effectué par Me Kami Haeri, le nombre d’avocats en Hexagone a plus que doublé en vingt-trois ans. La rivalité est rude. Un tiers des nouvelles recrues quittent la robe durant les cinq premières années d’exercice. Les données du rapport « mettent en relief certains éléments développés dans cet ouvrage et notamment le fort décalage entre la vision de la profession telle qu’on l’imagine et la réalité de son exercice découvert tardivement, dans la souffrance », déclare Anaïs de la Pallière, qui déplore néanmoins que le rapport « n’évoque que très peu la véritable situation des avocats collaborateurs, le cœur même du sujet qui a motivé ce récit. »
Besoin de trouver sans cesse de nouveaux clients pour retenir le chiffre d’affaires et la survie de l’activité du cabinet, inégalité entre le travail véritablement fourni et le retour sur investissement : l’ouvrage décrit la vie d’un collaborateur de cabinet. « Etre avocat, c’est faire de lourds sacrifices. On passe ses journées voire ses nuits au cabinet, on n’a plus de temps à consacrer à sa vie personnelle, car on essaie de construire sa carrière, mais l’édifice est très bancal, les bases ont été viciées. Puis on se heurte à des attitudes inadmissibles qui ajoutent une pression insoutenable. On a l’impression que l’on vit dans un monde au-dessus des lois, parce que nos protections sont quasi nulles. (…) Il n’y a pas de prud’hommes pour régler les litiges, il n’y a pas de chômage en back-up. Il n’y a que la justice de l’Ordre, celle du bâtonnier et de ses pairs. Dès lors, certains se croient au-dessus de tout. On ose nous dire dans certains cabinets ce que l’on n’oserait jamais dire à un salarié. »