« Les cabinets de contrôle ont fait face aux dirigeants de Carillion dans leur combinaison suicidaire »
La recherche faite par les parlementaires britanniques sur la ruine du numéro 2 de la construction britannique étal comment les standards de la gérance des entreprises savent déporter des règles élémentaires de gestion, explique le professeur Armand Hatchuel dans sa chronique.
Le crash brutale, il y a un an, de Carillion – une entreprise avec 40 000 de salarié, numéro deux de la construction au Royaume-Uni, experte dans la contractualisation avec les services publics – n’a pas fini de faire des agitations. Le Financial Reporting Council (FRC), le pouvoir indépendante britannique de normalisation de la profession de comptable, d’auditeur, qui est aussi occupée de la surveillance des standards de gérance d’entreprise, a déclaré le 22 janvier avoir ouvert depuis plusieurs mois une enquête sur l’acceptation des comptes de Carillion par le cabinet d’audit KPMG.
Cette action fait suite à l’audition, sans concession, des grands cabinets d’audit par la commission d’enquête sur la ruine de Carillion, mise sur pied juste après celle-ci par le Parlement britannique. Ceux qui avaient constamment certifié les comptes « selon les meilleures pratiques » ont dû avouer que l’évaluation de la valeur des contrats de Carillion présentait, du fait de leur complexité et de leur opacité, des marges d’erreur si considérables qu’une ruine brutale étaient possible ! La commission n’a pas manqué de accentuer que ces mêmes cabinets avaient, pendant des années, conseillé et conforté les dirigeants dans leur stratégie suicidaire…
Acharnement
On pouvait se méfier que les députés ne captent que des déclarations convenues. Mais par leur expertise et leur acharnement, ces parlementaires se sont montrés spécialement opérants. Ils ont mis au jour les pratiques qui ont permis aux gouvernants de Carillion de s’écarter des règles de gestion les plus élémentaires et – sans réaction des autorités compétentes – de verser des dividendes tout en s’endettant gravement auprès des banques et des caisses de retraite.
Les parlementaires ont mis au jour les adoptes qui ont permis aux gouvernants de Carillion de servir des rétributions tout en s’endettant dangereusement
L’audition des gouvernants et des directeurs financiers a donné le ton amer de l’enquête. Elle a vite réaffirmé que la croissance de l’activité de Carillion avait été réussie par une course effrénée aux contrats. De plus, le résultat de chaque contrat était particulièrement mal connu des dirigeants. Ceux-ci se reposaient sur une administration globale établie « selon les meilleurs standards » et qui attestait encore de résultats solides juste avant la faillite… Carillion a pu ainsi contracter une dette bancaire croissante tout en versant chaque année des dividendes appréciables…