La représentation des salariés menacée par la charge de travail des élus

« Je participe à des réunions sur la pause déjeuner, je réponds aux sollicitations des salariés le soir, parfois le week-end. » Carole Cebe, élue au comité social et économique du Crédit commercial de France (CCF) et déléguée syndicale FO, fait partie des 601 000 salariés exerçant un mandat d’élu ou de délégué syndical. Un chiffre en baisse de plus de 4 % en 2023 par rapport à 2017, et de 16 % dans les entreprises de 300 salariés et plus, en dépit d’une légère progression du nombre de salariés, selon une étude de la Dares, publiée en septembre, sur la représentation du personnel.
Le nombre de mandats exercés diminue, quant à lui, de 14 %. Les ordonnances travail de 2017 sont passées par là et ont fusionné les anciennes instances représentatives du personnel – délégués du personnel, comité d’entreprise et comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Une rationalisation bienvenue pour les uns, un affaiblissement de la représentation des salariés pour les autres.
« La centralisation du dialogue social a eu comme effet mécanique la baisse du nombre de mandats, et, avec le même périmètre de prérogatives, cela aboutit sans surprise à une intensification de la charge de travail », constate Arnaud Mias, professeur de sociologie à l’université Paris Dauphine-PSL. Conséquences : les représentants du personnel sont débordés par la masse des sujets à traiter et manquent parfois d’expertise. « En réaction, ils procèdent à des arbitrages, établissant des priorités selon l’urgence ou selon les sujets sur lesquels ils se sentent le plus à l’aise. Cela peut mener à un questionnement quasi identitaire : est-ce que je fournis un travail de qualité au service de la collectivité de travail ? », explique Arnaud Mias.
« Le travail s’est intensifié »
Cette charge de travail supplémentaire les oblige à jongler entre leur mandat, leur poste et leur vie personnelle. « L’articulation avec la vie professionnelle est un vrai problème dans les PME, où le travail retombe sur les collègues, car souvent les heures de délégation ne sont pas prévues dans l’organisation du travail, ce qui peut amener un sentiment de culpabilité », note Marie-Laure Billotte, directrice de mission ressources humaines au Groupe 3E, cabinet spécialisé dans l’accompagnement des instances représentatives du personnel, des élus du personnel et des organisations syndicales.
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