« Travailleurs de la mort » : la parole aux agents funéraires

« Travailleurs de la mort » : la parole aux agents funéraires

Le 14 juillet 2016, un poids lourd conduit par un terroriste fonce dans la foule sur la promenade des Anglais, à Nice, provoquant la mort de 86 personnes. Peu de temps après, les travailleurs funéraires sont appelés pour évacuer les corps. « Deux kilomètres d’une scène de crime abominable, apocalyptique. (…) Certains proches sont encore à côté de leurs défunts, hagards ou totalement prostrés », se souvient le responsable d’une entreprise du secteur. L’intervention marquera durablement ces professionnels. « La reconstruction psychologique a été longue », conclut le cadre dirigeant.

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Du crash du mont Sainte-Odile, dans le Bas-Rhin, en 1992 aux ravages causés par la tempête Xynthia en 2010, des attentats du 13 novembre 2015 à celui de la promenade des Anglais, des salariés des pompes funèbres peuvent être confrontés à des situations extrêmes, traumatisantes. Dans son ouvrage Travailleurs de la mort (L’Aube, 208 pages, 18 euros), le journaliste indépendant Charles Guyard a souhaité leur donner la parole. « Comment gèrent-ils le choc émotionnel ? », s’interroge-t-il.

Construit comme un recueil de témoignages, le livre permet tout d’abord de mieux saisir ce qu’est le travail de ces professionnels et la multiplicité des tâches qu’ils doivent accomplir. Prise en charge des corps, accompagnement des proches en souffrance, mais aussi gestion dans l’urgence de la chaîne logistique (commande de cercueils au milieu de la nuit…). L’improvisation et le recours au système D sont fréquents pour que les cérémonies aient lieu dans les temps. Ils se voient, par ailleurs, régulièrement confier des missions imprévues : on demandera, par exemple, aux salariés présents aux obsèques de la famille Dupont de Ligonnès d’avoir un œil attentif sur les personnes assistant à la messe, pour s’assurer que Xavier, le père, ne soit pas présent.

Soutien psychologique

Au fil des récits, on perçoit combien ce travail sous tension peut être source de souffrances. Tout d’abord parce qu’il éprouve la résistance psychique des salariés. Certains évoquent les images, les odeurs qui les hantent toujours des années après les faits. La prise en charge d’enfants ou le transport de restes humains ne laissent pas indemne. Un de ces travailleurs de la mort explique ainsi que des collègues ont arrêté le métier, et l’un d’eux, « malgré vingt ans d’ancienneté, a dû se faire interner, car il n’en pouvait plus de voir des morts ».

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LJD

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