« La Dépêche du Midi » accusée de multiplier les contrats « low cost » pour plusieurs de ses journalistes

« La Dépêche du Midi » accusée de multiplier les contrats « low cost » pour plusieurs de ses journalistes

Les bureaux de « La Dépêche du Midi », à Toulouse, en décembre 2015.

La Dépêche du Midi embauche-t-elle ses journalistes au rabais, par l’entremise d’une agence de presse et en dehors de toutes les règles de la convention collective de la profession ? Entre novembre 2015 et août 2019, le contrat signé par Claire Raynaud, rédactrice embauchée dans le quotidien régional d’Occitanie, semble aller dans ce sens. Le 30 juin, la cour d’appel de Toulouse a en tout cas confirmé une « situation de coemploi » entre la société par actions simplifiée (SAS) La Dépêche News et la société anonyme (SA) Groupe La Dépêche du Midi, et condamné cette dernière à indemniser Mme Raynaud.

Après avoir eu gain de cause aux prud’hommes concernant les heures supplémentaires non payées, Mme Raynaud et le Syndicat national des journalistes (SNJ) voulaient obtenir la condamnation de l’employeur de cette dernière pour travail dissimulé. Le tribunal, au bout d’une longue procédure, a donc démontré « l’artifice d’une embauche par le biais de La Dépêche News, “agence de presse”, alors même que c’est bien le rôle du groupe, qui exerce les prérogatives de l’employeur, qui est ici déjoué ».

L’enjeu pour la journaliste était de se voir reconnaître les droits et avantages tirés des accords collectifs (classification, rémunération, jours RTT, points de salaire dits « DDM ») applicables au sein de La Dépêche du Midi, alors que La Dépêche News est soumise à un statut collectif moins favorable. « Je dépendais de la convention des journalistes, mais j’avais un salaire inférieur de 30 %, j’avais cinq semaines de vacances, soit un tiers de moins de congés, pas de primes. Alors que je travaillais entre cinquante et soixante heures par semaine », rappelle au Monde Claire Raynaud, aujourd’hui à la tête d’une agence de communication.

Elle ajoute que ce « dumping social [l]’a broyée et [l]’a amenée à démissionner en 2019 ». Son avocate et celle du SNJ, Pauline Le Bourgeois, voit dans ces pratiques « un détournement du statut collectif. On institutionnalise une différence de traitement entre des salariés qui font la même chose, mais qui vont se voir appliquer des règles différentes ».

Près de la moitié des journalistes concerncés

L’avocate se félicite de la condamnation pour coemploi, et des dommages et intérêts à verser à Mme Raynaud (ainsi qu’une somme symbolique de 1 000 euros au SNJ), avant, peut-être, d’autres poursuites contre le quotidien dirigé par la famille Baylet, depuis sa création, en 1870.

Car, comme le souligne Olivier Cimpello, ancien délégué syndical et membre du comité social et économique (CSE), « depuis 2015, plus aucun journaliste n’a été engagé à La Dépêche du Midi : tous les journalistes qui quittaient le journal ont été remplacés par des journalistes sous contrat La Dépêche News ». Soit près de la moitié des 175 journalistes écrivant à ce jour dans « le journal de la démocratie ».

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LJD

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