Clergerie, dernier vestige de la chaussure de luxe « made in France », racheté par un groupe américain
Clergerie est fixé sur son sort. Placée en redressement judiciaire mercredi 29 mars, l’entreprise historique de Romans-sur-Isère (Drôme) a trouvé un repreneur américain. L’offre à 700 000 euros de Joe Ouaknine, riche entrepreneur au français impeccable, propriétaire du groupe de chaussures Titan Industries et seul candidat en lice, a été acceptée par le tribunal de commerce de Paris, jeudi 29 juin. La marque, l’atelier romanais ainsi que quelques boutiques françaises sont sauvés. En revanche, 55 % de la masse salariale va être supprimée, soit 79 personnes promises au licenciement sous un mois.
Propriétaire de plusieurs marques aux Etats-Unis – dont l’enseigne de luxe Badgley Mischka, peu connue de ce côté-ci de l’Atlantique – l’homme d’affaires se targuait, lors de son audition, le mercredi 14 juin, d’avoir « suffisamment d’expérience » pour redresser la situation financière de Clergerie. « C’est une marque avec beaucoup de potentiel. J’ai sondé les grands magasins, tous m’ont confirmé que la clientèle était là. » Pour redynamiser les ventes, Joe Ouaknine veut produire « de nouvelles références qui répondent à la demande du moment » pour « dépoussiérer » la marque « tout en gardant son ADN », grâce à l’appui de ses fournisseurs aux quatre coins du monde.
Mais, pour mettre en œuvre ses ambitions, le propriétaire de Titan Industries (50 millions d’euros de chiffre d’affaires) s’est dit contraint de supprimer une soixantaine de postes. « Ça ne marche pas car il y a trop de monde à payer… », se justifiait-il au Monde, lors de son audience. A l’usine de Romans-sur-Isère, seul « un ouvrier sur trois » restera à son poste, précise Valérie Treffan, élue CFE-CGC. Une situation « compliquée pour les licenciés » qui risquent d’avoir « des difficultés à retrouver un emploi », s’inquiète Sandrine Martorana, employée à la production depuis vingt-quatre ans et au chômage partiel depuis avril. « Peut-être dans le secteur de la maroquinerie… Mais dans celui de la chaussure, c’est impossible ; il n’y a plus rien en France. »
« Mauvaise gestion »
D’autant plus que les syndicats redoutent d’autres licenciements à venir dans l’usine. « C’est un distributeur qui sous-traite toute sa production en Chine », pointe Christophe Charon, comptable et élu CFE-CGC, qui craint que « dans deux ans, la production à Romans soit définitivement terminée ». Il revient à Joe Ouaknine de persuader les employés de l’entreprise qu’il est attaché au « made in France ». Vingt-neuf d’entre eux sont repris dans cette unité de production, tandis que 55 sont licenciés.
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