Pourquoi le CPF finance davantage le permis B en ville et le permis poids lourd à la campagne
Si l’engouement pour le Compte personnel de formation (CPF) a touché ces dernières années l’ensemble du territoire français, les urbains l’ont davantage mobilisé que les ruraux. En 2021, 5,5 % des actifs occupés résidant dans les espaces fortement peuplés ont utilisé leur CPF, contre près de deux fois moins (2,9 %) dans les espaces peu denses et 2,2 % seulement dans les espaces très peu denses, révèle une étude parue dans le dernier numéro de Questions politiques sociales – Les études.
Ses auteurs, Gabin Langevin et Ronan Mahieu, deux statisticiens de la Caisse des dépôts, ont cherché à déterminer s’il y avait un lien entre le lieu de résidence et le recours au CPF. Jusque-là, les différences de recours au CPF avaient été expliquées par l’âge ou la catégorie socioprofessionnelle. Selon leurs conclusions, la densité de peuplement des territoires est aussi un facteur déterminant.
Tout d’abord, les formations suivies dans les zones rurales « sont moins onéreuses « , tout en étant « plus courtes », a fait valoir Gabin Langevin lors de la conférence de presse du 21 mars consacrée à la présentation des résultats. Il « existe un écart de près de 10 euros [par heure de formation financée par le CPF] entre les espaces les moins denses et les plus denses. » Les formations poursuivies sont plus souvent liées à l’exercice d’un métier : en tête, le permis cariste (Caces), les formations à l’hygiène alimentaire ou le permis poids lourds.
Caractéristiques socio-démographiques
En revanche, les zones urbaines sont très consommatrices de formations « consacrées aux langues étrangères » et de financement du permis de conduire : dans les espaces les plus denses, 19 % des bénéficiaires mobilisent leur CPF afin de maîtriser la conduite, contre seulement 3 % dans les espaces ruraux. « Le permis de conduire est rapidement nécessaire dans les zones rurales, bien avant d’avoir acquis des droits CPF suffisants », avance Gabin Langevin en guise d’explication.
Y aurait-il un effet d’aubaine chez les citadins, plus prompts à mobiliser leur CPF pour financer des formations dont ils n’ont pas réellement besoin ? Le statisticien dresse un constat « un peu plus complexe », soulignant que « les écarts s’expliquent d’abord par les caractéristiques socio-démographiques et l’activité économique d’un territoire. »
Ainsi, si Paris et la Seine-Saint-Denis sont deux territoires densément peuplés, les auteurs de l’étude relèvent que le taux de recours au CPF pour financer le permis B est plus de deux fois supérieur dans le département du 93 à ce qu’il est dans Paris intra-muros. Une différence que Gabin Langevin explique par « un réseau de transports en commun moins efficace » et une « accessibilité financière » du permis globalement moindre pour les habitants de la Seine-Saint-Denis.