Refaire le monde depuis son potager : l’engouement pour les formations à la permaculture
FactuelCette méthode alternative de production agricole séduit une jeunesse inquiète face à la dégradation continue de l’environnement et désireuse de renouer avec la terre.
Une trentaine de jeunes quittent leur tente et se regroupent sous l’ancienne étable, où s’amoncellent vieilles machines agricoles, palettes et boulonnerie de toute sorte. Hébergés dans l’Oasis du Grand Matrignat (Ain), une ferme bressane traditionnelle reconvertie en lieu alternatif et écologique, les premiers arrivés s’installent sur les canapés usés, les autres s’assoient à même la paille et étirent leurs corps bronzés, après plusieurs jours passés à scier, cueillir, creuser.
Le cercle de parole peut commencer. On loue le goût de la soupe de plantes sauvages, on décortique la complexité de la construction de la serre autonome en énergie, on livre des recommandations pour une bonne utilisation de la sciure dans les toilettes sèches. Les participants de cette initiation à la permaculture, en passant par l’écoconstruction, la métallurgie et les plantes médicinales et comestibles, se répartissent ensuite en différents ateliers : cueillette sauvage avec un ethnobotaniste, construction d’un poulailler mobile, d’une tiny house et d’une serre.
Expérimentation et d’apprentissage
Financée par Erasmus+, la formation est orchestrée par Romain Cavillon, 30 ans, ancien ingénieur mécanique qui a démissionné d’Alstom en 2016. Après sa rupture professionnelle, il s’est formé à la médecine chinoise, a acheté un camion et est parti pour un tour du monde des écovillages, où il découvre la permaculture. En 2021, le trentenaire rachète la ferme familiale, qu’il transforme en endroit d’expérimentation et d’apprentissage sur les pratiques de l’agriculture régénératrice. Ses séminaires font le plein : « J’ai reçu près de cent candidatures pour une trentaine de places. La formation est financée par l’Europe, les participants paient seulement 90 euros, une somme symbolique qui nous permet d’avoir un public vraiment engagé, et qui ne vient pas faire du tourisme. »
« On n’a pas tous les mêmes parcours ni le même âge, mais nous voulons tous lutter contre le désastre écologique »
Originaires de toute l’Europe, les participants ont entre 25 et 35 ans, étudient la biologie comme les sciences politiques, sont parfois en rupture professionnelle. La majorité a rejoint le stage en covoiturage, pour limiter son empreinte carbone. « On n’a pas tous les mêmes parcours ni le même âge, mais nous voulons tous lutter contre le désastre écologique », résume Clara Schade-Poulsen. Dans le cadre de ses études de sciences politiques et anthropologie à la School of Oriental and African Studies à Londres, cette Italo-Danoise de 23 ans est partie en Norvège pour documenter la résistance de la population aux éoliennes terrestres : « J’ai été séduite par l’approche globale de la permaculture, qui repose sur trois principes : prendre soin des humains, prendre soin de la terre, partager équitablement les ressources. »
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