Archive dans 2021

Amélie de Montchalin veut « un coup d’accélérateur » sur les stages et l’apprentissage

La ministre de la transformation et de la fonction publiques, Amélie de Montchalin, à l’Elysée, le 13 janvier.

L’administration devra « jouer toute sa partition » dans le soutien apporté aux jeunes en cette période de crise. « Cela passe par plus d’apprentissage, plus d’offres de stage », a déclaré aux députés la ministre de la transformation et de la fonction publiques, Amélie de Montchalin, mardi 16 mars. Selon nos informations, l’Etat devrait faire passer le nombre d’apprentis dans le secteur public de 8 000 à 14 000, et ce, dès cette année. De même, la fonction publique devrait accueillir 40 000 lycéens et étudiants en stage en 2021, contre moins de 10 000 en rythme annuel jusqu’à présent.

« Mon enjeu », a dit la ministre, c’est d’« avoir une fonction publique exemplaire dans la politique que nous menons pour la jeunesse », laquelle « se sent parfois oubliée ou sacrifiée ». Mais Mme de Montchalin poursuit, ce faisant, un deuxième objectif : attirer les jeunes vers l’administration. Le nombre de candidats aux concours de la fonction publique de l’Etat a chuté de 650 000 en 1997 à 228 000 en 2018. Une crise des vocations qui s’explique par le niveau de salaire mais aussi par une méconnaissance de l’administration.

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« Nous ne pourrons pas recruter la jeunesse d’aujourd’hui si nous ne lui montrons pas la réalité des métiers », estime la ministre. Les accueillir via des stages et l’apprentissage, a-t-elle précisé, c’est « permettre à des lycéens et des étudiants de s’approprier les valeurs du service public, de susciter des vocations ». Objectif : « créer une nouvelle génération de serviteurs de l’Etat. »

Les stagiaires mieux rémunérés

Ce « coup d’accélérateur » s’accompagnera d’autres nouveautés, selon les informations du Monde. Pour ce qui est de l’apprentissage dans les collectivités locales, le gouvernement a mis en place, à côté du financement traditionnel du Centre national de la fonction publique territoriale, une aide exceptionnelle de 3 000 euros pour chaque contrat signé depuis le 1er juillet 2020. Cet appui devait s’achever le 31 mars. Le gouvernement entend le pérenniser et le compléter. Mais les détails sont encore en discussion. Quoi qu’il en soit, le cabinet de Mme de Montchalin considère que, « compte tenu du succès de l’apprentissage dans le privé, il n’y a pas de raison que le public reste à la traîne ».

Deuxième aspect : les stages. Outre la forte augmentation de l’objectif fixé aux services de l’Etat, l’idée est de mieux les accueillir. La loi impose qu’un stagiaire soit payé à partir du troisième mois. Un plancher est fixé : 3,90 euros de l’heure, soit quelque 600 euros par mois. Mais, selon l’entourage de la ministre, « la plupart des administrations appliquent la loi au minimum ». Dorénavant, tout stagiaire sera payé dès le premier mois. « Les petits boulots, ils n’existent plus », justifie le ministère, ce qui rend la rémunération d’un stage d’autant plus importante.

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Les caisses de retraite complémentaire du privé replongent dans le rouge

Le retour à meilleure fortune aura été de courte durée. Sous l’effet de la récession en cours, les caisses de retraite complémentaires du privé Agirc-Arrco ont replongé dans le rouge en 2020, d’après des données quasi définitives rendues publiques mardi 16 mars : le déficit a atteint six milliards d’euros, si on raisonne en termes de « résultat technique », c’est-à-dire en calculant la différence entre les recettes et les charges. La performance s’avère moins mauvaise, si les produits financiers engrangés durant l’année écoulée sont pris en considération : – 4,8 milliards d’euros, ce montant correspondant au « résultat global ». Autant de chiffres synonymes de rechute : en 2019, l’Agirc-Arrco avait mis fin à une décennie d’exercices en déséquilibre avec un « résultat technique » positif de 200 millions – le « résultat global », lui, s’élevant à un milliard.

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La brutale dégradation des comptes en 2020 ne représente nullement une surprise. Au printemps de l’année dernière, des administrateurs du régime, copiloté par le patronat et par les syndicats, s’attendaient même à des pertes encore plus lourdes. La situation s’explique, comme pour d’autres organismes de protection sociale, par une forte diminution des recettes : – 4,7 % l’an passé. De nombreuses entreprises ont pu reporter le paiement de leurs cotisations afin de soulager leur trésorerie. Mais c’est surtout le recours massif au chômage partiel qui a privé l’Agirc-Arrco d’une partie substantielle de ses ressources : l’indemnité perçue par les salariés ayant stoppé leur activité est exempte de contributions pour les caisses de retraite.

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Pour colmater le trou, le régime a pioché dans ses abondantes réserves financières, constituées d’obligations et d’actions. Une fois cette opération effectuée, il dispose encore d’un matelas confortable : quelque 61 milliards d’euros, « en valeur de marché » à la fin 2020, ce qui équivaut à neuf mois de pensions versées aux treize millions de retraités relevant du dispositif.

« Un matelas de sécurité »

« Malgré une crise historique, le déficit est maîtrisé », a assuré Didier Weckner, le président (Medef) de l’Agirc-Arrco, lors d’une conférence de presse, mardi. D’après lui, le système, « que les partenaires sociaux ont construit », demeure « solide ».

Les déséquilibres financiers risquent toutefois de perdurer, contraignant l’Agirc-Arrco à puiser à nouveau dans ses réserves. Or, celles-ci doivent représenter au moins six mois de prestations sur un horizon de quinze années, conformément à une règle arrêtée par le patronat et par les syndicats. Ce « ratio de sécurité » pourrait être atteint en 2026, obligeant les gestionnaires du système à prendre des mesures pour stopper le dépérissement du « magot ».

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Covid-19 : les sept (r)évolutions déclenchées par l’urgence économique

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s’exprime lors d’une conférence de presse à l’issue d’un Conseil européen extraordinaire de quatre jours, à Bruxelles, le 21 juillet 2020.

Jamais, depuis la seconde guerre mondiale, nos pays n’avaient essuyé un choc conjoncturel d’une telle violence. Un an après le premier confinement (qui s’est étiré du 17 mars au 11 mai 2020) et l’instauration des restrictions sanitaires, lesquelles se sont traduites par un effondrement de l’activité au printemps 2020, l’économie est toujours en convalescence. « C’est la première crise née non des dysfonctionnements de l’économie ou de la finance, mais de la volonté de sauver des vies », souligne François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, dans son livre paru le 17 février (Retrouver confiance en l’économie, éd. Odile Jacob).

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Pour faire face, la France et ses voisins européens ont dépensé comme jamais auparavant, en vue de soutenir les ménages et les entreprises, faisant temporairement fi des règles budgétaires. Surtout : la pandémie de Covid-19, dont l’issue est encore incertaine, a agi comme un révélateur. Elle a marqué le grand retour de l’Etat. En outre, elle a fait prendre conscience aux Européens de leur trop grande dépendance à l’égard des chaînes de production chinoises, et de la nécessité d’être plus solidaires afin de bâtir une croissance plus verte, limitant le creusement des inégalités. Retour sur ces bouleversements qui, depuis douze mois, transforment nos économies.

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  • Des mesures d’urgence rapides et massives

En même temps que l’annonce du « grand confinement », en mars 2020, le gouvernement français a, comme ses homologues européens, mis en place un arsenal de mesures d’urgence destinées à aider les entreprises à surmonter le choc et à éviter une explosion du chômage. Elles ont reposé sur plusieurs leviers, tels que la prise en charge des salaires par le truchement du dispositif d’activité partielle, le report des échéances sociales et fiscales et le fonds de solidarité pour les indépendants. Au 3 mars 2021, celui-ci avait distribué plus de 17 milliards d’euros à près de 2 millions d’entreprises.

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A ce fonds sont venus s’ajouter les prêts garantis par l’Etat (PGE), qui ont permis aux entreprises de maintenir leur trésorerie à flot, alors que leur chiffre d’affaires était sensiblement rogné, voire nul. Plus de 650 000 d’entre elles, dont des TPE et PME pour les trois quarts, ont obtenu un PGE pour plus de 132 milliards d’euros au total. Des initiatives plus ciblées ou ponctuelles ont également été mises en œuvre, comme des « chèques » pour favoriser la transformation numérique des entreprises ou des commerces fermés.

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Rencontres RH : la crise due au Covid-19 aura-t-elle été source d’innovations ?

« Contraintes d’adapter les organisations d’abord brutalement, en mars 2020, puis fréquemment au fil de l’évolution de l’épidémie, les entreprises sont entrées dans la première phase de l’économie de l’innovation, en inventant au fil de l’eau les réponses aux problèmes posés par les contraintes sanitaires. »

Crises et innovations font toujours bon ménage. Quelles innovations cette année de pandémie aura-t-elle produites dans les entreprises ? Une quinzaine de responsables des ressources humaines se sont réunis, jeudi 11 mars, pour en débattre dans le cadre des Rencontres RH, le rendez-vous mensuel de l’actualité du management organisé par Le Monde en partenariat avec LinkedIn et Manpower.

Contraintes d’adapter les organisations d’abord brutalement, en mars 2020, puis fréquemment au fil de l’évolution de l’épidémie, les entreprises sont entrées dans la première phase de l’économie de l’innovation, en inventant au fil de l’eau les réponses aux problèmes posés par les contraintes sanitaires. Les DRH ont, in fine, redécouvert l’importance du collectif, de l’équité et du salariat.

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« Il a fallu réinventer le collectif de travail. Trouver la bonne dose de distanciel et de présentiel, trouver le bon moment de faire revenir les salariés sur site. Cette crise nous a rappelé que l’entreprise est un collectif humain », résume Frédérique Durand, la DRH de l’Imprimerie nationale. « On a fait des investissements sur les lieux de travail qu’on aurait jamais faits sans la crise pour créer plus de lieux de rencontres », ajoute Juliette Couaillier, directrice management des talents d’Havas Village.

Pour cadrer le débat, l’économiste Jean-Marc Daniel a rappelé le concept d’innovation tel qu’abordé par l’économiste Joseph Schumpeter (1883-1950) : « L’innovation passe d’abord par l’innovateur, puis par l’imitateur, qui joue le rôle trouble et essentiel de celui qui dit il a raison, et enfin par le cost-killer qui réduit la masse salariale pour arriver à un même niveau de production. Il y a des innovations de produits, des innovations de consommation un même produit, mais plus cher , et enfin l’innovation d’organisation. »

Sens au travail et équité

C’est cette dernière acception qui a tiré profit du Covid. La pandémie a accéléré la réflexion. Sur le réseau social LinkedIn, « les entreprises confirment que la nécessité de travailler à distance a généré de nouvelles organisations. Elles notent que la crise a révélé des talents en donnant à certains l’occasion d’exprimer des propositions disruptives, et en tant que facteur de risques a fait émerger le besoin de plus de diversité dans les profils », constate Fabienne Arata, la directrice générale de LinkedIn France.

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Les salariés, de leur côté, se sont questionnés sur l’utilité de leur travail. « Seuls, isolés, ils perdaient complètement le sens de ce qu’ils faisaient. Ils ont eux-mêmes identifié les bullshit jobs [métiers à la con]. Ça a été le cas de quatre personnes chez nous. Je n’ai jamais eu autant de démissions depuis un an. On a adapté le travail à l’homme plutôt que l’inverse. Le management de proximité était totalement disproportionné », note Alexis Berthel, DRH de l’entreprise de sécurité Panthera.

La question du sens au travail et celle de l’équité face aux réorganisations sont récurrentes depuis le début de la crise sanitaire. La Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), depuis plusieurs mois déjà, travaillait à résoudre les problèmes d’équité face à la généralisation du télétravail.

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Tous les métiers ne sont pas éligibles au télétravail. « On a accordé un jour de télétravail à tous les non-télétravailleurs, qu’on a affecté à des missions administratives, et dans un second temps pour ceux qu’on ne pouvait pas mobiliser sur site, on a créé une nouvelle mission en coopération avec d’autres services publics. Pour tous, c’était important de se sentir utiles pendant le Covid. On a coordonné les compétences comportementales des chauffeurs, des électriciens de la CNAV, au côté d’autres personnels de la protection judiciaire et du ministère de l’intérieur réunis sur une plate-forme téléphonique pour prendre contact avec les personnes âgées », raconte Jérôme Friteau, le DRH de la CNAV.

Paradoxe

Pour Ipsen, si le Covid a permis d’innover, c’est en faisant « tomber les barrières réglementaires, physiques et psychologiques. Par exemple, on avait la solution pour contacter les patients et leur donner accès aux médicaments sans passer par l’hôpital, mais jusqu’alors c’était obligatoire. Avec le Covid on a vu les barrières tomber », explique Régis Mulot, le DRH du groupe pharmaceutique.

« Il y a eu un violent choc extérieur. L’Etat est intervenu dans les entreprises pour les empêcher de fonctionner. Or c’est sur le terrain que se prennent les décisions. Il y a une revendication de l’entreprise à être un lieu collectif qui doit être autonome pour se gérer », observe Jean-Marc Daniel.

Amazon a misé « sur l’énergie des petits groupes en mettant en commun sur la base du volontariat des groupes de six à huit personnes pour créer des solutions de développement », indique la DRH France Anne-Marie Husser.

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Enfin, aussi paradoxal que ça puisse paraître, cette année de Covid a redoré le blason du salariat. « Le recours au free-lance était une réponse à une rigidité de l’organisation. A l’avenir, on misera davantage sur les salariés », affirme M. Mulot. De son côté, Dominique Brard, la directrice générale Talent Solutions de ManpowerGroup, renchérit : « En 2019, dans les plans de départs volontaires et les ruptures conventionnelles collectives, près de 30 % de salariés créaient leur entreprise. Aujourd’hui c’est beaucoup moins, près de 10 %. On va revenir au salariat. »

Pour Jean-Marc Daniel, « on est dans une phase où les gens ne veulent ni de la léthargie de l’ennui, ni des convulsions de l’inquiétude, selon l’expression de Voltaire. Dans les entreprises, 2020 a été l’année de l’adaptation subie et de l’innovation voulue », a conclu l’économiste.

Les invités du 11 mars

Ont participé aux Rencontres RH du 11 mars : Fabienne Arata, directrice générale de LinkedIn France ; Marion Azuelos, DRH monde de BNP Paribas Asset Management ; Alexis Berthel, DRH de Panthera ; Laurent Blanchard, directeur général PageGroup ; Dominique Brard, directrice générale Talent Solutions de ManpowerGroup ; Juliette Couaillier, directrice management des talents Havas Village ; Jean-Marc Daniel, économiste et professeur émérite ESCP-Europe ; Frédérique Durand, DRH Imprimerie nationale ; Jérôme Fabre, DRH Big Fernand ; Jérôme Friteau, DRH de la Caisse nationale d’assurance-vieillesse ; Caroline Grangeon, DRH Tandem Consulting ; Anne-Marie Husser, DRH France Amazon ; Noëlle de La Loge, DRH RMN ; Régis Mulot, DRH Ipsen ; Albane Pietro, directrice du recrutement Robert Half ; Matthieu Rivière, DRH Devoteam ; Benoît Robin, directeur du développement Artefact ; Anne Rodier, journaliste, Le Monde ; Gilles van Kote, directeur délégué, Le Monde.

Mieux encadrer dans l’entreprise les salariés « rescapés » d’un plan social

«  Conséquence de ce sentiment de fournir un travail « ni fait ni à faire » tout en se donnant à fond : une baisse de l’estime professionnelle. »

« Pourquoi pas moi ? » : l’interrogation lancinante tourne en boucle dans la tête de salariés qui ont échappé à un plan de licenciement. Un sentiment de culpabilité peut gagner ces rescapés et se traduire par de la tristesse, de l’anxiété, de l’hypervigilance et, au final, une perte de l’estime de soi. De plus, ces « survivants » se sentent souvent en sursis : « J’ai sauvé ma peau, mais qu’en sera-t-il la prochaine fois ? »

Et ce mal-être est amplifié par le regard des autres. « Il peut y avoir des soupçons de compromission ainsi qu’un conflit de loyautés entre ses anciens collègues et l’organisation », explique Marc-Eric Bobillier Chaumon, professeur titulaire de la chaire de psychologie du travail du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM). La charge mentale – ceux qui restent estiment devoir exceller dans leur travail – est très forte.

Or, malgré tous leurs efforts, le travail ne peut pas être fait comme avant dans une entreprise qui fonctionne en mode dégradé. Conséquence de ce sentiment de fournir un travail « ni fait ni à faire » tout en se donnant à fond : une baisse de l’estime professionnelle. Ajoutez à cela la méfiance envers les collègues, vus comme de potentiels concurrents, l’isolement qui en découle et « on assiste alors à l’effritement des piliers de l’identité professionnelle », explique Marc-Eric Bobillier Chaumon. Les salariés qui se sont construits uniquement sur cette identité et qui sont les plus engagés dans leur travail font partie des plus fragilisés.

Valérie (le prénom a été changé) est directrice marketing dans le secteur des médias. Dans le cadre du dernier plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) de son entreprise, un quart des salariés de son équipe ont été remerciés. Elle estime être aujourd’hui « à la limite de la dépression ». En cause : la rupture du lien social et la perte de repères : « Je suis triste de voir des proches partir. Que ce soit mon boss ou des membres de mon équipe, je perds des personnes très importantes pour mon équilibre tant professionnel que personnel. » De plus, la quadragénaire ne se sent pas à l’abri d’une prochaine coupe claire dans les effectifs.

« Contents et coupables »

Médecin du travail depuis trente-cinq ans et autrice du livre Le monde du travail est devenu fou ! (Cherche Midi, 2020), Marielle Dumortier connaît bien le phénomène. « Ces salariés nagent dans l’ambiguïté. Ils sont à la fois contents et coupables de rester. Parfois, ils peuvent développer de l’agressivité et de la colère. Des désordres physiques, tels que l’hypertension, peuvent apparaître plusieurs mois après le plan de licenciement et parfois devenir des pathologies chroniques. »

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« Dark store » : plongée dans un supermarché de l’ombre

A l’intérieur du « dark store » de Monoprix, situé dans le 13ème arrondissement de Paris, le 12 mars.

Des pommes rutilantes viennent d’être soigneusement rangées sur leur gondole au milieu des fruits et légumes, face à l’armoire réfrigérée dédiée aux surgelés, et à quelques mètres du rayon des yaourts. Dans les allées de ce supermarché Monoprix, les chariots de courses se croisent et se remplissent sous le halo industriel d’une dizaine de néons : les produits frais dans des cabas isothermes bleus, le reste dans d’épais sacs en papier kraft. Le bruit de leurs roulettes résonne, amplifié par la hauteur sous plafond et les murs en parpaings.

Mais dans ce magasin, il n’y a aucun client… Ou plutôt si, un seul : le géant américain Amazon. Qui vient satisfaire ici les besoins de courses alimentaires de ses internautes voulant être livrés au maximum dans les deux heures qui suivent leur achat.

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Ce Monoprix a ouvert en mars 2019 dans le 13e arrondissement de Paris. Comme lui, ses voisins – un libraire, une épicerie orientale, un caviste italien – reçoivent régulièrement la visite de camions et de camionnettes qui effectuent les livraisons.

Mais il n’a ni façade ni vitrine, et on y accède par un long et étroit escalier en ciment. Et pour cause. Il se situe à quelques dizaines de mètres sous terre, sous la dalle Olympiades, théâtre de nombreux trafics nocturnes. Une ville sous la ville, installée dans l’ancienne gare des Gobelins. Y cohabitent, à l’abri des regards, une trentaine d’entreprises, dont ce magasin ultrasecret, où même les photos sont interdites.

« Marque de confiance »

Ce supermarché du groupe Casino fait partie de ce que les professionnels appellent les « dark stores ». Il a la fonctionnalité d’un entrepôt mais l’organisation d’un véritable magasin, fermé au public. En face d’un rayon, impossible de faire la différence. Une organisation qui n’a rien à voir celle d’un drive – un autre modèle d’entrepôt dédié aux commandes alimentaires à distance, où les produits restent dans leurs cartons et les palettes sur plusieurs étages.

Aux Etats-Unis, il y a un an, en plein pic épidémique, Amazon avait temporairement reconverti plusieurs supermarchés de l’enseigne Whole Foods en centre logistique, dont un à New York, avant d’ouvrir, en septembre 2020, son premier dark store Whole Foods, à Brooklyn. En France, pendant le premier confinement, Franprix, aussi, avait fermé cinq de ses magasins, situés dans des quartiers de bureaux vidés de leurs occupants, pour les dédier à l’e-commerce, avant de les rouvrir au public.

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Uber reconnaît aux chauffeurs britanniques un statut de travailleur salarié, une première

Des chauffeurs Uber du syndicat ADCU saluent la décision de la Cour suprême de les considérer comme des salariés, à Londres, le 19 février.

Est-ce le début d’une révolution dans le milieu des plateformes numériques au Royaume-Uni ? Uber va octroyer à ses chauffeurs britanniques le statut de travailleurs salariés, avec salaire minimum et congés payés. Il s’agit d’une première mondiale pour la société américaine et, a minima, un chamboulement de modèle.

Le géant américain de réservation de voitures annonce, dans un communiqué publié mardi 16 mars, que l’ensemble de ses plus de 70 000 chauffeurs dans le pays, qui étaient jusqu’à présent des travailleurs indépendants, bénéficieront de ces avantages dès mercredi.

La plateforme a agi rapidement après avoir lancé une vaste consultation auprès de ses chauffeurs et un mois tout juste après une retentissante défaite devant la Cour suprême. La plus haute juridiction britannique avait estimé, le 19 février, que les chauffeurs pouvaient être considérés comme des « travailleurs » et donc bénéficier de droits sociaux. La justice a donné raison à un groupe d’une vingtaine de chauffeurs qui estimaient avoir droit au statut de travailleur, compte tenu du temps passé connectés à l’application et du contrôle exercé par le groupe par exemple sur leur évaluation.

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Salaire minimum et congés payés

La loi britannique distingue le statut de travailleurs (« workers »), qui peut recevoir le salaire minimum et d’autres avantages, de celui de salariés au sens strict (« employees »), qui bénéficient d’un contrat de travail en bonne et due forme. Désormais, les chauffeurs Uber au Royaume-Uni toucheront au moins le salaire minimum, auront droit à des congés payés et pourront cotiser à un plan d’épargne-retraite, auquel contribuera la société.

Le salaire minimum est de 8,72 livres de l’heure au Royaume-Uni, et doit passer à 8,91 livres en avril. Un chauffeur Uber gagne plus que cette somme en moyenne, soit 17 livres à Londres et 14 livres dans le reste du pays.

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Uber explique que l’ensemble de ses conducteurs souhaitaient pouvoir bénéficier de ces avantages, tout en conservant de la flexibilité dans leurs conditions de travail. Ils auront toujours la possibilité de travailler avec Uber quand ils le veulent. Ces avantages s’ajoutent à ceux déjà existants, comme l’accès gratuit à des assurances maladie, ainsi qu’à des indemnisations pour des congés parentaux.

« C’est un jour important pour les chauffeurs au Royaume-Uni », assure Jamie Heywood, patron d’Uber pour l’Europe du Nord et de l’Est. « Uber n’est qu’une partie du secteur des réservations de voitures et nous espérons que d’autres opérateurs nous rejoindront pour améliorer les conditions de travail de ces travailleurs qui sont essentiels dans nos vies de tous les jours », selon lui.

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Conséquences sur les autres plateformes

Uber ne dévoile pas le coût de ces mesures, qui devrait être conséquent et peser un peu plus sur de fragiles finances d’une société pas encore rentable et dans une mauvaise passe avec les restrictions sanitaires. Le groupe devrait absorber une partie du coût car il peut difficilement augmenter ses tarifs, notamment à Londres où la concurrence est vive.

Mais en accordant le statut de travailleurs salariés, la société s’épargne de longues procédures judiciaires. Car la décision de la Cour suprême aurait pu permettre aux chauffeurs de se tourner vers la justice pour obtenir les droits qu’Uber vient de leur accorder.

Uber ne fait ce geste pour l’instant qu’au Royaume-Uni et va désormais regarder marché par marché comment il peut faire évoluer son modèle. Le directeur général, Dara Khosrowshahi, a proposé en février une série de propositions aux gouvernements et syndicats en Europe. L’objectif est de garantir une rémunération transparente et juste aux chauffeurs et de leur offrir plus d’avantages. Uber a pour projet de pouvoir répliquer en Europe ce qu’elle a proposé en Californie, à savoir des conducteurs indépendants mais qui reçoivent des compensations. En France, les chauffeurs sont des travailleurs indépendants, même si en 2020, la Cour de cassation a reconnu un ancien conducteur comme salarié.

Reste à savoir si l’annonce d’Uber pourrait avoir des conséquences sur les autres plateformes numériques au Royaume-Uni qui sont les symboles de la gig economy (économie des « petits boulots »), soit des emplois précaires et peu payés. Les livreurs de Deliveroo, application de livraison alimentaire, attendent, eux, la décision de la Cour d’appel de Londres pour savoir s’ils peuvent bénéficier d’une convention collective afin d’avoir de meilleures conditions de travail. En Espagne, le gouvernement a pris les devants en annonçant jeudi une modification de son code du travail qui considère désormais automatiquement comme salarié les livreurs à domicile de toutes les plateformes.

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Le Monde avec AFP

Covid-19 : pour les blouses blanches, « cela ressemble à un jour sans fin »

Lors de la première et de la deuxième vague épidémique, Le Monde a donné la parole à une vingtaine de soignants à travers la France, en première ligne contre le Covid-19. Dans un « Journal de crise des blouses blanches » ils nous ont raconté leur quotidien professionnel bouleversé. Après une année de crise sanitaire, nous avons demandé à quatre d’entre eux de revenir sur cette période si particulière.

  • « Je n’aurais jamais pensé vivre cela dans ma vie de médecin »

Damien Pollet, 59 ans, médecin généraliste à Salins-les-Bains (Jura)

Damien Pollet, médecin généraliste à Salins-les-Bains (Jura).

« Je me souviens que le 8 mars 2020, quand j’expliquais au directeur des Thermes de Salins et au maire qu’il fallait fermer l’établissement, personne ne me croyait, on me prenait pour un fou furieux ! Puis j’ai lancé un appel sur Facebook pour récupérer des masques, car j’étais catastrophé de voir, lors de visites dans des Ehpad, que le personnel n’en avait pas. Mais, le 21 mars, je suis tombé malade, gravement. Hospitalisé, j’ai subi le Covid de manière violente, cela m’a confirmé que c’était sérieux et que je ne souhaitais à personne de vivre la même chose. Je me disais : mais que nous arrive-t-il ?

Je n’aurais jamais pensé vivre cela dans ma vie de médecin. Cette expérience a été unique : en tant que généraliste, elle nous sort de notre zone de confort, réinterroge notre métier et tisse des liens très fort avec les patients. J’ai reçu des courriers très émouvants. Cette crise liée au Covid-19 oblige aussi à des collaborations extraordinaires. Dans ma région, le centre de vaccination a suscité un engagement très fort des communes, des pompiers, des infirmières, de l’administration publique… l’émulation est incroyable. Cela a été une année très riche en rencontres, réflexion, anticipation, adaptabilité. Il y a eu une telle solidarité que je garderai de cette crise, malgré tout, un souvenir ému.

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Je suis confiant face à l’avenir. Grâce à la vaccination, qui stoppera les formes graves et la mortalité, je crois à un renouveau fin avril-début mai. Au centre de vaccination, les gens repartent contents, parce qu’ils savent que cette petite injection va changer leur quotidien. Il y a quelques semaines, beaucoup disaient ne pas vouloir de “ce vaccin fait à la va-vite”, maintenant, ils le veulent tous ! »

  • « Ce travail en commun des soignants, il faut le chérir »

Julie Oudet, 39 ans, médecin urgentiste au SAMU de Toulouse (Haute-Garonne)

Julie Oudet, médecin urgentiste au SAMU de Toulouse.

« En médecine de catastrophe, j’avais été formée au pire des scénarios : une pandémie à virus respiratoire qui s’installe dans la durée, entraîne des conséquences lourdes et une méfiance face aux mesures prises. La crise sanitaire que nous vivons n’est pas différente de ce qu’on m’a appris.

Depuis un an, ce qui m’a le plus marquée est la mobilisation des soignants au sens large. En mars 2020, lors de la première vague, face aux milliers d’appels que l’on recevait au SAMU, nous avions créé une cellule de crise Covid avec un pool d’étudiants en santé. Ce sont ces mêmes jeunes qui, une année plus tard, ont répondu à nouveau à l’appel pour participer à la plate-forme départementale de vaccination. C’est une boucle incroyable ! Ces jeunes – mes pioupious, comme je les appelle – sont extra. La vaccination est un travail dantesque, une charge de travail démentielle, mais c’est ce qui nous sauvera – excusez-moi pour l’expression mais il n’y en a pas d’autres – de la merde. L’énergie, la niaque de ces jeunes pour faire au mieux à l’égard des patients, c’est ma drogue pour tenir car je trouve cela beau.

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Cette expérience du Covid-19 ne fait que conforter ma conviction que nous devons travailler tous ensemble, généralistes, infirmières libérales, urgentistes, réanimateurs, étudiants, etc. Ce travail en commun, ce respect mutuel, indispensable quand le système de soins est sursollicité, il faut le chérir.

Des soignants sont épuisés. On décompressera d’autant mieux qu’on aura, avec la vaccination, la satisfaction du travail accompli. Mon objectif est de parvenir à une situation de type Covid saisonnier, comme on a la grippe saisonnière. Ce Covid saisonnier ne sera pas grave parce qu’il ne dépassera pas la capacité du système de soins et sera donc gérable. »

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  • « On ne s’en sort pas, et cela arrive après un an de galère »

Thomas Gille, 39 ans, pneumologue à l’hôpital Avicenne, à Bobigny (Seine-Saint-Denis)

Thomas Gille, pneumologue à l’hôpital d’Avicenne, à Bobigny.

« Une pandémie, ce n’est pas de la science-fiction. Même si cela était assez loin de nos préoccupations, nous étions nombreux à savoir que ça pouvait arriver. De là à imaginer toutes les implications que ça aurait… La situation a été inédite et la réponse a été à la hauteur.

Au printemps, l’hôpital a fait du Covid à 90 %. Il a fallu que les gens acceptent d’aller travailler dans des unités qui n’étaient pas les leurs, avec d’autres collègues, bref, que tout le monde aille dans la même direction. Me revient en mémoire l’afflux de patients au plus fort de la première vague. Ils arrivaient en continu, jour et nuit. C’était du jamais-vu.

Dans les suivis post-Covid, on reçoit des patients avec des trajectoires de vie sinon brisées par la maladie, du moins très infléchies. Ils ont fait des formes sévères, voire très sévères, ont souvent une cicatrisation pulmonaire assez longue, heureusement, dans la grande majorité, ils ont tendance à s’améliorer spontanément. Une minorité a des séquelles importantes et permanentes. En revanche, ce qui est marquant, c’est la grande prévalence de syndromes de stress post-traumatique.

Depuis un an, les cellules de crise, qui réunissent des représentants des différents services hospitaliers ou administratifs, se sont pérennisées. Le dialogue est un peu plus ouvert que par le passé. Mais cela ressemble à un jour sans fin. Nous avons, ces derniers jours, les mêmes discussions que lors de la deuxième vague à l’automne. Les hospitalisations remontent, nous essayons de jongler pour avoir, d’un côté, assez de lits pour les malades du Covid-19 et, de l’autre, ne pas faire perdre de chances aux patients non-Covid. On ne s’en sort pas, et cela arrive après un an de galère, de fatigue…

En début d’année, quand les premiers vaccins sont arrivés, on s’est tous dit qu’il allait falloir tenir jusqu’à l’été et que ça allait le faire. On essaie toujours de se raccrocher à cette idée. Mais, en réalité, personne n’en sait rien. »

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  • « Un énorme travail sur les survivants nous attend »

Aurélie Frenay, 36 ans, psychologue en réanimation à l’hôpital Saint-Joseph Saint-Luc de Lyon et au Médipôle Lyon-Villeurbanne (Rhône)

Aurélie Frenay, psychologue en réanimation au centre hospitalier Saint-Joseph Saint-Luc à Lyon.

« La métaphore des vagues, on ne peut pas faire mieux pour dire ce que l’on vit. Cette année m’a appris à tenir bon au milieu d’un bain traumatique. Aujourd’hui, on attend la troisième vague qui n’arrive pas vraiment et en même temps, on se demande si la deuxième est terminée. Nous sommes dans une intensité qui dure et qui est devenue notre quotidien.

Contrairement au début de l’épidémie, les services doivent continuer à accueillir une réanimation classique en parallèle du Covid. Jongler entre les deux temporalités est difficile. Avec des patients là pour vingt-quatre à soixante-douze heures en risque vital immédiat et des malades du Covid-19 qui restent en général plusieurs semaines. Pour autant, la question d’un deuxième confinement strict n’est pas un sujet de discussion dans les services où je travaille. Ce n’est pas conscient, mais continuer à traiter la réanimation traumatique classique nous relie à la vie d’avant, celle qu’on espère voir revenir. Il y a de l’ambivalence. Les soignants sont épuisés mais s’accrochent à cette idée de retour à la normalité.

Dans les premières semaines du confinement, il y a eu de la sidération et la peur de l’inconnu. Mais nous avons été obligés de vivre et de travailler avec. On s’est adaptés et c’est le point positif. Il fallait continuer à fonctionner, créer de nouveaux liens avec les collègues, avec les patients, ou entre les familles et les patients. On s’est mis à utiliser les portables, les tablettes numériques. On a fait preuve de souplesse, de créativité… Cela modifie aujourd’hui nos manières de travailler, de nous réunir. Un an après, j’ai l’impression qu’on essaie de reprendre nos esprits. On remet en place ce qu’on faisait avant : des formations, des groupes de travail… On reprend la pensée. Le Covid avait phagocyté tout notre temps.

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Ce qui nous attend, aujourd’hui, c’est un énorme travail à faire sur les survivants, les Covid longs, mais aussi sur les étudiants, les personnes en suivi psychiatrique qui ont été très fragilisées dans cette période. Savoir que le monde entier est touché par la même chose s’est avéré plus inquiétant que rassurant. Cela a ajouté une dimension traumatique inédite. »

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La réouverture des bars et restaurants en France se fera en trois phases, sans aucun calendrier pour l’instant

Les bars et les restaurants sont fermés depuis la fin du mois d’octobre.

Quand peut-on espérer voir les cafés et les restaurants rouvrir ? On l’ignore encore. Le gouvernement a toutefois apporté une première réponse à la question du « comment » en évoquant un plan de réouverture en trois phases, lors d’une réunion le 5 mars avec les professionnels du secteur, ont rapporté l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie et le Groupement national des indépendants dans un communiqué publié mardi 16 mars. Ces phases seront d’une durée de quatre semaines chacune.

Les professionnels du secteur de la restauration, à l’arrêt depuis la fin du mois d’octobre, ont salué une réunion « permettant de faire un pas de plus vers la réouverture de [leurs] établissements », même si l’exécutif n’a pas donné « de dates précises pour le début de la première phase, précisant que la reprise d’activité était soumise à deux indicateurs, le nombre de cas de contaminations par jour et le nombre de personnes vaccinées ».

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Ce plan de réouverture sera accompagné « d’un maintien des aides des entreprises » et de l’application du protocole sanitaire de septembre « auquel viendra s’ajouter un dispositif de traçage de la clientèle au moyen d’un QR code à flasher à l’entrée dans l’établissement ».

Le dispositif de QR code sera facultatif, précise une source gouvernementale. Les établissements qui ne souhaitent pas l’adopter pourront tenir un « carnet de rappel » similaire à celui qui avait été mis en place à l’automne, jusqu’à la fermeture du 30 octobre.

  • Première phase

La première phase concernerait les restaurants d’hôtels et autoriserait leurs clients à prendre leur petit déjeuner dans la salle de restauration. Les organisations souhaiteraient que les hôtels puissent également servir leurs clients au déjeuner et au dîner, et que tous les cafés et restaurants puissent ouvrir leur terrasse durant cette première phase. Mais cette hypothèse n’a pas reçu, pour l’heure, de réponse favorable de la part du gouvernement.

  • Deuxième phase

La deuxième phase serait marquée par l’ouverture des terrasses des cafés et des restaurants ainsi que de l’intérieur de l’établissement dans la limite de 50 % de leur capacité d’accueil (y compris pour les restaurants d’hôtel).

  • Troisième phase

La dernière phase serait un retour à la situation d’octobre, avec une ouverture complète des établissements, sans jauge mais toujours dans le respect du protocole sanitaire renforcé.

Le plan élaboré avec les organisations représentatives doit maintenant être soumis au ministère de la santé puis à la cellule interministérielle de crise. Lors de cette réunion, Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, a rappelé qu’il travaillait à un « plan discothèques » pour la fin du mois de mars.

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Le Monde

Crise sociale : le gouvernement réactive la « prime Macron » de 1 000 euros pour tous les salariés

Jean Castex (centre), Bruno Le Maire (à droite) et Nicolas Revel, le directeur de cabinet du 1er ministre, lors de la troisième conférence sociale, le 15 mars.

Comment se projeter au-delà de l’épidémie de Covid-19 alors que des milliers d’entreprises sont aux abois depuis un an et que les hôpitaux craquent dans plusieurs régions, face à l’afflux de malades infectés par le coronavirus ? Il peut paraître « paradoxal » de vouloir songer à « la sortie de crise » dans un contexte aussi tendu, comme l’a admis, lundi 15 mars, Jean Castex. Mais le chef du gouvernement a tenu à se livrer à cet exercice de contorsionniste au cours d’une « conférence du dialogue social », la troisième depuis son entrée en fonctions.

Lors de ce rendez-vous en visioconférence, M. Castex, épaulé par les ministres du travail, Elisabeth Borne, et de l’économie, Bruno Le Maire, a discuté durant près de trois heures avec les responsables des principales organisations syndicales et patronales. L’occasion pour le locataire de l’hôtel de Matignon de vanter, à l’issue de la réunion, les vertus de ces temps d’échanges : ils constituent « un levier pour la préparation de l’avenir », a-t-il assuré.

Les sujets qui fâchent avaient été soigneusement évacués au préalable : la réforme des retraites n’était pas à l’ordre du jour et les annonces relatives à la transformation de l’assurance-chômage avaient été faites en amont, le 4 mars. Ce qui n’a pas empêché plusieurs leaders de confédérations de salariés d’interpeller M. Castex sur le sort infligé à des centaines de milliers de demandeurs d’emploi dont l’allocation mensuelle risque de baisser avec les changements introduits dans le régime d’indemnisation. « Je lui ai redemandé d’abandonner cette mauvaise idée », indique Yves Veyrier, le secrétaire général de FO.

La rencontre de lundi s’est traduite par des gestes concrets sur un thème que les centrales syndicales portent depuis des mois : celui de la « reconnaissance » envers les salariés dits de « la deuxième ligne » – caissières, éboueurs, aides à domicile, etc. « dont la présence au travail s’est avérée indispensable pour assurer la continuité économique du pays tout au long de la crise », comme l’a rappelé M. Castex.

Jusqu’à 2 000 euros

Si l’hypothèse d’une mesure spécifique à cette catégorie d’actifs a, un temps, été mise sur la table, l’exécutif l’a finalement écartée, au profit d’un dispositif déjà connu : la « prime exceptionnelle de pouvoir d’achat » (PEPA) ou « prime Macron » , qui avait été instaurée, fin 2018, en réponse au mouvement des « gilets jaunes ». Cette gratification, défiscalisée et exempte de cotisations sociales, est reconduite en 2021 pour tous les salariés, sous un certain niveau de rémunération. Laissée au libre choix de l’employeur, elle pourra aller jusqu’à 1 000 euros. Le mécanisme dévoilé lundi comporte une nouveauté, par rapport à sa version d’origine : la prime pourra atteindre 2 000 euros dans les entreprises et les branches « qui auront soit conclu un accord d’intéressement d’ici à la fin de l’année, soit ouvert une négociation sur la valorisation des métiers » de la deuxième ligne.

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