Archive dans 2019

Les pilotes de la compagnie British Airways en grève pour la première fois de leur histoire

Le grève, prévu lundi et mardi, a pour cause un désaccord sur les salaires des pilotes.

Flotte d’avions de la compagnie British Airways à l’aéroport d’Heathrow, à Londres, le 3 mai.
Flotte d’avions de la compagnie British Airways à l’aéroport d’Heathrow, à Londres, le 3 mai. BEN STANSALL / AFP

C’est une première dans l’histoire de la compagnie aérienne anglaise British Airways (BA). Le9 septembre, les pilotes se mettent en grève ; une action qui va affecter des dizaines de milliers de voyageurs. Les membres du syndicat de pilotes Balpa (British Airline Pilots Association – « Association des pilotes de ligne britanniques ») débrayeront aussi mardi. Ils prévoient une autre journée d’action le 27 septembre si aucun accord n’est trouvé.

« Si vous avez un vol prévu avec nous à ces dates, il est probable que vous ne pourrez pas voyager comme prévu en raison de la grève », a prévenu la compagnie aérienne dans un communiqué publié sur son site Internet dimanche matin. Elle a sollicité aux voyageurs dont le vol est effacé de ne pas se rendre à l’aéroport. Lundi matin, la compagnie a fait savoir qu’elle annulait presque 100 % de ses vols.

British Airways, propriété du groupe hispano-britannique IAG (International Airlines Group) qui comprend également l’espagnole Iberia et l’irlandaise Aer Lingus, a proposé à ses clients des remboursements ou des réservations sur des vols à d’autres dates.

« Nous continuons à être prêts à des discussions constructives avec le syndicat Balpa (…) sans conditions préalables », explique la compagnie dans son communiqué. Elle affirme avoir proposé une augmentation de salaires de 11,5 % sur trois ans ; une offre qu’elle qualifie de « juste », mais qui a été rejetée. Selon Balpa, les pilotes ont fait des « sacrifices » ces dernières années et devraient tirer davantage profit des bons résultats de l’entreprise.

44 millions d’euros perdus par jour de grève

« Un jour de grève coûtera à BA, selon leurs propres chiffres, 40 millions de livres (44 millions d’euros) », a déclaré le syndicat sur Twitter, montrant que la différence entre ce que propose la direction et ce que les pilotes demandent est de 5 millions de livres. « Pourquoi ne collabore-t-elle pas avec nous pour mettre fin à ce conflit ? », sollicite rroge Balpa.

Le syndicat dit avoir « fait une proposition à la direction de BA mercredi dernier qui aurait pu permettre d’annuler les grèves de lundi et mardi », mais « BA n’a pas répondu ». La grève a été votée par 93 % des pilotes de British Airways membres du syndicat, informe celui-ci.

British Airways n’est pas la seule compagnie aérienne à affronter une grève de ses pilotes. Une partie de ceux de Ryanair au Royaume-Uni ont annoncé la poursuite de leur mouvement en septembre, même si les perturbations ont été jusque-là très limitées.

En France, Air France s’était trouvée enlisée dans des mois de conflit avec ses pilotes concernant les salaires en 2018, avec de nombreux jours de grève, avant qu’un accord soit effectué, le mois prochain.

Médecins urgentistes, la tentation du départ vers le secteur privé

La ministre de la santé présente lundi des mesures qui doivent permettre de « régler le problème des urgences sur le long terme ».

Manifestation du personnel d’urgence du CHU de Lille le 27 août.
Manifestation du personnel d’urgence du CHU de Lille le 27 août. PHILIPPE HUGUEN / AFP

C’est l’une des multiples facettes de la crise qui secoue les services d’urgences des hôpitaux publics. Epuisés et dépités par la dégradation de leurs conditions de travail, liée à la hausse continue du nombre de malades, plusieurs médecins urgentistes quittent – partiellement ou totalement – leur service pour se reconvertir, exercer dans le privé ou faire de l’intérim, ce qui leur permet de choisir leur rythme et leur charge de travail. Une désaffection à laquelle le plan de « refondation » des urgences présenté le 9 septembre par la ministre de la santé après cinq mois de grève des personnels paramédicaux devra tenter de mettre fin.

Si ce phénomène de fuite n’est pas nouveau, il semble devenir plus grave. En Ile-de-France, au moins 119 urgentistes ont démissionné l’année dernière, contre 73 en 2017 et 43 en 2015, selon une enquête flash publiée par l’Agence régionale de santé en juin. Des hôpitaux comme Mulhouse ou Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) ont dernièrement dû faire face à des départs massifs d’urgentistes, contraignant à des délestages vers les hôpitaux voisins. Aux urgences de Lens, le nombre de médecins est brutalement passé en un été de 18 à 7 équivalents temps plein. La raison de ces départs ? « L’épuisement professionnel pour la plupart d’entre eux », a déclaré en juin Alain-Eric Dubart, le chef du pôle du groupement hospitalier de territoire (GHT) Artois.

Ces départs viennent d’une façon générale fragiliser des services déjà en pénurie de recruter des nouveaux médecins.  Selon les calculs du Point publiés cet été, il manquerait plus de 800 médecins urgentistes dans les hôpitaux français, même si une partie des postes vacants sont tenus par des contractuels. déclarant que « de nombreux praticiens quittent actuellement l’hôpital public par désespoir », les présidents de commission médicale d’établissement, c’est-à-dire les représentants des médecins hospitaliers, appellent à un « choc d’attractivité » et de « fidélisation ».

« Désespoir »

Pour « stopper la fuite des urgentistes de l’hôpital public », l’association des médecins urgentistes de France (AMUF) a sollicité dans un communiqué publié au cœur de l’été que l’indemnité de garde de nuit (14 heures) des praticiens hospitaliers soit alignée sur celles des universitaires « d’environ 265 euros à environ 480 euros », de manière à limiter l’intérêt financier pour un médecin hospitalier de faire de l’intérim.

« Les aidants sont imperceptible pour tout le monde »

Hélène Rossinot, consacre un oeuvre aux « Aidants, ces invisibles ». Méconnus, voire brutalisés par les professionnels de santé, ils seraient 11 millions en France.

Hélène Rossinot, médecin, spécialiste de santé publique.
Hélène Rossinot, médecin, spécialiste de santé publique. HANNAH ASSOULINE / EDITIONS DE L’OBSERVATOIRE

Qui sont ces personnes qui prennent soin, quotidiennement, d’un proche malade ou handicapé ? Que font-elles réellement pour leur parent, enfant ou conjoint ? Et à quel prix, pour leur propre santé et leur parcours professionnel ? Spécialiste en santé publique et médecine sociale, la docteure Hélène Rossinot a piloté l’enquête sur les aidants. Dans un livre engagé, Aidants, ces invisibles, paru le 4 septembre, cette jeune médecin passionnée de 29 ans dresse un état des lieux sans concession, et fait des propositions concrètes pour mettre en place des « parcours de l’aidant ».

La France a 11 millions d’aidants, qui sont « la colonne vertébrale invisible des systèmes de santé », écrivez-vous. Que sait-on d’eux ?

Ces dernières années, dans le cadre de ma thèse de médecine puis pour cet oeuvre , j’ai rencontré de nombreux aidants, de tous âges, de tous milieux, dans des situations très différentes. En écoutant leurs histoires, j’ai réalisé que leur point commun est d’être invisibles, pour tout le monde, et parfois pour eux-mêmes. Ils aident leur proche par amour car cela leur paraît normal, sans se rendre compte de l’ampleur de leur tâche jusqu’à ce qu’ils craquent, ce qui arrive assez fréquemment.

« Adolescents et enfants sont nombreux à assurer des tâches très lourdes, alors même qu’ils n’ont pas fini leurs études, voire leur scolarité »

Le chiffre de 11 millions n’est que l’extrapolation des données de la seule étude sérieuse dont on dispose dans notre pays : une enquête de la Drees [direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère de la santé] de 2008, qui évaluait alors leur nombre à 8,3 millions.

Comment peut-on envisager un plan national pour les aidants, voire une réforme de la Sécurité sociale, sur la base d’une étude qui date de plus de dix ans ? Tous les pays sur lesquels j’ai fait des recherches réalisent des enquêtes ou des recensements réguliers des aidants. Menons nous aussi une vraie étude de santé publique. Parmi les mesures à prendre, ce n’est vraiment pas la plus difficile. Et je pense qu’on aura des surprises notamment surtout les aidants de moins de 25 ans, pour lesquels les aperçus varient entre 500 000 et 1 500 000.

Vous évoquez justement les responsabilités parfois écrasantes de jeunes, qui sont même parfois des adolescents ou des enfants…

C’est un sujet encore plus méconnu que celui des aidants adultes. Pourtant, plusieurs à assurer des tâches très lourdes, alors qu’ils n’ont pas fini leurs études, voire leur scolarité. En rencontrant des adolescents, dans le cadre d’un atelier, j’ai lu sur leurs visages la tristesse et la colère. Ils m’ont raconté combien ils avaient été ignorés, voire méprisés par les professionnels de santé.

les femmes et le travail

Le premier Congrès international d’histoire des entreprises à Paris

Le premier Congrès international d’histoire des entreprises aura lieu à Paris, du 11 au 13 septembre 2019. Quarante sessions sont organisées autour de trois grands axes : le rôle des entreprises dans l’émergence d’un capitalisme « à la française » ; les défis de la mondialisation et de la modernité ; écrire actuellement l’histoire des entreprises.

La conférence inaugurale « A quoi sert l’histoire des entreprises ? » sera présentée à la Sorbonne par les professeurs Liliane Hilaire-Perez (EHESS) et Matthias Kipping (université York de Toronto). Trois tables rondes auront lieu à l’ESCP Europe : « Les entreprises racontent-elles des histoires » (avec Corinne Lepage, ancienne ministre) ; « La fabrique de l’histoire des entreprises » ; « La place des femmes dans l’entreprise » (avec Nicole Notat et Danièle Fraboulet).

Retrouvez le programme détaillé sur le site du congrès, organisé par l’ENS, le CNRS, les universités Paris-Dauphine, Paris-Nanterre et Evry, l’Ecole Polytechnique, la BNF, le CNAM, etc., avec le soutien d’entreprises (Saint Gobain, BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole, Renault, etc).

Tribune. Les femmes ont toujours travaillé. Mais cela n’a pas toujours été visible, ni admis. Gourmandes en main-d’œuvre, les entreprises de la seconde révolution industrielle ont recouru au travail des femmes, le salariat le rendant visible. On se souvient des conditions de travail imposées aux femmes dans les mines, symbolisées par Catherine Maheu dans le Germinal, d’Emile Zola. La loi du 19 mai 1874 prohibe le travail au fond. Pourtant, l’apport du travail des femmes dans certaines professions, à certaines périodes ou encore comme complément salarial, est indispensable. Les femmes travaillent donc aussi dans les entreprises… Mais, comme se demande Danièle Fraboulet, professeure émérite d’histoire actuelle à Paris-XIII, dans ses travaux sur les organisations patronales, y ont-elles vraiment leur place ?

Si les femmes ont toujours exercé des activités débordant la sphère domestique – agriculture, industrie rurale à domicile, ateliers urbains –, l’essor de l’industrialisation et de l’urbanisation impose le travail des femmes dans les usines, minoritaires jusqu’en 1914. L’hostilité du mouvement ouvrier au travail des femmes reflète alors les représentations sociales du travail féminin, où sont exaltées les vertus féminines (modestie, habileté…), jugées souvent peu compatibles avec un travail salarié. Mobilisées pour l’effort de la première guerre mondiale dans les emplois les moins qualifiés, remplaçant les hommes partis au front, elles ont été priées de regagner leur foyer dès la fin du conflit, afin de repeupler le pays, de s’occuper des enfants, de reprendre leurs activités non payer. Il fallait limiter toute concurrence avec les hommes pour l’accès à l’emploi ou le niveau des rétributions.

Longue attente

Durant l’entre-deux-guerres, en liaison avec l’essor du secteur tertiaire qui suit celui de l’appareil productif, elles investissent certains emplois dans l’administration – les demoiselles des Postes – et dans les services généraux des entreprises, où elles occupent parfois des postes à responsabilité pour les plus diplômées, même si la majorité reste cantonnée aux emplois peu qualifiés. La crise des années 1930 stoppe ce mouvement.

Leur présence dans l’entreprise s’accentue avec la reconstruction. Le contexte social et politique évolue avec l’octroi du droit de vote en avril 1944 et la suppression en 1946 de la notion de « salaire féminin », inférieur à celui des hommes. Si au cours des « trente glorieuses » le travail des femmes croît fortement, les qualifications, les rémunérations, les perspectives de carrière sont toujours moindres que celles des hommes et leurs trajectoires professionnelles demeurent discontinues. Les politiques publiques oscillent entre mesures de soutien aux travailleuses et incitations à rester chez soi pour élever les enfants.

« La fonderie, les groupes bancaires ou l’automobile ont su très tôt construire un récit historique »

Jacques Chirac, maire de Paris, salut le Bibendum de Michelin au 69e Salon de l'automobile, le 3 octobre 1982.
Jacques Chirac, maire de Paris, salut le Bibendum de Michelin au 69e Salon de l’automobile, le 3 octobre 1982. PHILIPPE BOUCHON / AFP
Le premier Congrès international d’histoire des entreprises à Paris

Le premier Congrès international d’histoire des entreprises aura lieu à Paris, du 11 au 13 septembre 2019. Quarante sessions sont organisées autour de trois grands axes : le rôle des entreprises dans l’émergence d’un capitalisme « à la française » ; les défis de la mondialisation et de la modernité ; écrire actuellement l’histoire des entreprises.

La conférence inaugurale « A quoi sert l’histoire des entreprises ? » sera présentée à la Sorbonne par les professeurs Liliane Hilaire-Perez (EHESS) et Matthias Kipping (université York de Toronto). Trois tables rondes se dérouleront à l’ESCP Europe : « Les entreprises racontent-elles des histoires » (avec Corinne Lepage, ancienne ministre) ; « La fabrique de l’histoire des entreprises » ; « La place des femmes dans l’entreprise » (avec Nicole Notat et Danièle Fraboulet).

Retrouvez le programme détaillé sur le site du congrès, effectué par l’ENS, le CNRS, Paris-Nanterre et Evry, les universités Paris-Dauphine, Paris-Nanterre et Evry, l’Ecole Polytechnique, la BNF, le CNAM, etc., avec le soutien d’entreprises (Crédit Agricole, Saint Gobain, BNP Paribas, Société Générale, Renault, etc).

Comment est née la bouteille de Perrier ? La galerie des Glaces de Versailles est-elle à l’origine des choix stratégiques de Saint-Gobain ? Le groupe Total s’est-il toujours intéressé au gaz naturel ? Comment le développement durable et la responsabilité éthique ou sociale ont-ils émergé dans l’agenda stratégique de certaines entreprises ? Les entreprises, pour l’essentiel les plus grandes, ont, depuis le début du XXe siècle, pris conscience de l’importance de maîtriser la construction et la communication de leur histoire. La sidérurgie, l’automobile ou les groupes bancaires ont très tôt su construire un récit historique. En France, Saint-Gobain a fait office de pionnier dans cette volonté systématique de construire une politique de conservation de la mémoire et de l’histoire de l’entreprise.

En revanche, les entreprises sont des objets historiques qui ont longtemps été ignorés par les historiens eux-mêmes. Ils n’ont commencé à les étudier que dans les années 1950 aux Etats-Unis, puis peu après en France, et ce n’est que dans les années 1970 et 1980 que la « business history » s’est diffusée.

Entre « history » et « story », l’entreprise ne cesse de se mettre en scène et en mots

Parfois convergentes, les méthodes des entreprises et celles des historiens peuvent aussi diverger. Il est clair, de nos jours, que l’entreprise passe son temps à « raconter des histoires » : de ses origines plus ou moins idéalisées au storytelling qu’imposent médias et marketing, entre « history » et « story », l’entreprise ne cesse de se mettre en scène et en mots.

En tant qu’organisation, les entreprises font et entretiennent des relations économiques, sociales ou politiques avec d’autres acteurs de leur environnement. A ce titre, elles construisent l’histoire, mais, pour paraphraser Karl Marx, si elles font l’histoire, elles ne savent pas – toujours – l’histoire qu’elles font.

Outil de diagnostic et de stratégie

L’histoire est, d’une certaine façon, présente partout dans l’entreprise, ne serait-ce que parce que toute comptabilité est histoire : elle retrace, sur une période plus ou moins courte, les flux économiques et les événements de l’organisation ; les commentaires qui accompagnent les résultats financiers essaient de présenter cette « histoire » aux parties prenantes. Les auditeurs valident ce récit, qui doit être fidèle à la réalité qu’ils perçoivent, mais est-il « vrai » ? Ici plus qu’ailleurs, cette histoire essaie d’être un « roman vrai », selon la formule célèbre de l’historien Paul Veyne. La difficulté même d’apprécier des risques réels, des prévisions d’activité ou la situation économique à venir, souligne que l’exercice n’est jamais facile – ceci sans parler de nombreux scandales, tel celui d’Enron, qui relèvent d’un désir délibéré de cacher ou de mentir.

« Moi, je ne vais pas donner ma vie pour la brigade »

La brigade des sapeurs-pompiers de Paris, la plus glorieuse, fait aussi plusieurs déçus. Les missions déçoivent et la vie militaire ne convient pas à tout le monde.

Ce n’est pas pour ça qu’ils s’étaient engagés, alors ils sont partis. Julien et Raphaël (les prénoms ont été changés), 26 ans, ont intégré la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) fin 2017. Le premier l’a quittée au mois d’août. Le second l’aura imité avant la fin du mois de septembre. Tous deux évoquent une « libération », moins de deux ans après avoir fêté leur entrée dans ce que la profession considère pourtant comme son unité d’élite, mais qui n’échappe pas au malaise général.

Certes, celui-ci se voit moins qu’en province : spécificité de la « brigade », qui défend Paris et les trois départements de la petite couronne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne), ses 8 500 pompiers ont le statut de militaire, et n’ont donc pas le droit de grève, contrairement à leurs 40 500 collègues professionnels dans le pays, appelés à en faire (symboliquement) usage depuis le 26 juin. Mais certains chiffres trahissent un trouble profond au sein de l’institution, qui a connu son heure de gloire lors de l’incendie de Notre-Dame mi-avril : la BSPP ne parvient pas à conserver ses troupes et connaît un turnover énorme.

Selon des chiffres diffusés en 2017, 30 % des recrues quittent la brigade au bout de la période probatoire de six mois, qui précède la signature d’un contrat de cinq ans. Et parmi les 70 % qui signent ce contrat, seuls 53 % le changement. D’où la nécessité d’embaucher chaque année 1 200 jeunes pompiers à la BSPP.

Raphaël et Julien sont restés au-delà des six premiers mois, mais ne sont pas allés au bout des cinq ans. Ils ont pris la troisième porte de sortie : réformés en cours de contrat, après passage devant le psychiatre, seule façon de démissionner sans être considéré comme déserteur. De quoi faire des envieux : « Je ne connais pas une caserne où il n’y a pas quelqu’un qui a envie de partir », assure le premier, qui était basé au sud de Paris. Le second, dont la caserne se trouvait à l’est de la capitale, fait le même constat : « Si tu donnes la possibilité aux pompiers de Paris de démissionner, t’as la moitié de chaque caserne qui s’en va. » Sollicitée par Le Monde, la BSPP n’a pas souhaité faire de commentaire.

Appels abusifs

Des discours de ces ex- « brigadous » émanent deux sources majeures au mal-être : une mission qui ne correspond pas à leurs attentes, et l’ambiance. Le premier phénomène est connu : actuellement, un pompier n’est plus quelqu’un qui éteint des feux, lesquels représentent moins de 3 % des interventions de la BSPP. Raphaël n’a eu qu’un seul véritable incendie à traiter – plusieurs voitures en feu devant une prison. Julien a eu « plus de chance » : « Quelques-uns. »

Les sapeurs-pompiers haussent le ton face au ministère de l’intérieur

Ils demandent la mise en place rapide d’un numéro d’urgence unique, le 112, et des mesures concrètes face aux agressions dont ils sont de plus en plus souvent victimes.

Par et Publié aujourd’hui à 10h20

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Ce sont habituellement les éléments les moins turbulents au sein de cette Cocotte-Minute sociale qu’est le ministère de l’intérieur. Les sapeurs-pompiers ont cependant décidé, en cette rentrée, d’exprimer avec davantage de force leurs revendications et entendent, à l’instar de leurs collègues policiers ou gendarmes, obtenir rapidement des réponses, positives de préférence.

La Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF) tient son congrès à Vannes du 18 au 21 septembre. Elle tente de faire monter la pression sur le gouvernement avant cette grand-messe conclue par un discours de Christophe Castaner, le ministre de l’intérieur. Forte de ses quelque 280 000 adhérents, l’institution est la seule à pouvoir incarner une parole collective au sein d’une profession fragmentée entre les pompiers volontaires (190 000 personnes), professionnels (40 000 personnes), les jeunes (25 000 personnes), les membres de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris et ceux du bataillon de marins-pompiers de Marseille, deux unités qui bénéficient d’un statut militaire à part.

Lire aussi Sursollicitation, manque de moyens, violences : les pompiers annoncent un été de grève

Les doléances des « rouges » sont connues et font l’objet de discussions interministérielles depuis plusieurs années. Au premier rang desquelles se trouve celle sur la mise en place d’un numéro unique pour les appels d’urgence, commun au SAMU, aux pompiers et à la police. Un sujet d’achoppement entre le ministère de la santé, dont dépendent les SAMU départementaux, et l’intérieur, qui gère la sécurité civile et les forces de l’ordre. Les pompiers réclament la mise en place du 112 au niveau national, qui remplacerait (comme c’est le cas dans beaucoup de pays voisins) les actuels 15 (SAMU), 17 (police) et 18 (pompiers).

« Phénomène de stress »

L’enjeu est de mieux répartir les interventions d’urgence et d’éviter la « sursollicitation », quand les sapeurs-pompiers se déplacent pour des missions qui ne relèvent souvent pas de leurs compétences. « De soldats du feu, on s’est transformés en techniciens de secours, déplore le colonel Grégory Allione, président de la FNSPF et patron des pompiers des Bouches-du-Rhône. On répond à la demande de santé des territoires, ce qui n’est pas notre rôle. Ça a un impact sur le moral des troupes, qui se démobilisent. » Si les chiffres ne montrent pour l’instant pas de désaffection massive dans les rangs, les professionnels du secteur craignent que les vocations se tarissent, notamment dans les jeunes générations qui pourraient être tentées par le volontariat.

Un livreur de Deliveroo radié après avoir organisé une grève

Nassim Hamidouche, accusé de vol de repas à livrer, est l’un des leaders du mouvement social dans les plates-formes.

Par Publié aujourd’hui à 10h19

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Un livreur Deliveroo manifeste place de la République, à Paris, contre la réduction du prix de la course à Paris, le 7 août 2019.
Un livreur Deliveroo manifeste place de la République, à Paris, contre la réduction du prix de la course à Paris, le 7 août 2019. Charles Platiau / REUTERS

Chez Deliveroo, plate-forme de livraison de repas, la modification des tarifs payés aux livreurs décidée en août continue de provoquer des remous. Nassim Hamidouche, un des leaders du mouvement de grèves qui a émaillé le mois d’août, a vu son contrat de prestataire résilié par l’entreprise.

Tout commence cet été, lorsque Deliveroo réduit de 4,60 euros à 3 euros (à Paris, variable selon les villes) le prix d’une course courte, entraînant la colère des livreurs qui perdraient entre 30 et 50 % de leurs revenus, selon le Collectif des livreurs autonomes de Paris (Clap).

Lire aussi « Parfois 2 euros pour une course, c’est quoi ça ? » : grève des livreurs de Deliveroo à Paris

M. Hamidouche, qui travaille pour Deliveroo depuis huit mois, à raison de « 250 heures par mois, 7 jours sur 7 », organise alors des blocages, sur la zone où il livre, Paris Nord La Défense (PNLD), Courbevoie, Neuilly… A Courbevoie se trouve une des « cuisines » de Deliveroo qui loue des espaces à une quinzaine de restaurants pour qu’ils y fabriquent leurs plats. Le 28 août, « avec des collègues, j’ai organisé devant la cuisine une manifestation, vers 19 heures, contre les nouveaux tarifs, indique M. Hamidouche. A 19 h 40, la cuisine fermait. »

« Comme il travaille beaucoup, qu’il est posé, les livreurs l’écoutent. C’est pour cela que Deliveroo s’attaque à lui », Jérôme Pimot, ancien de Deliveroo

« Nassim est l’un des leaders des grèves, souligne Jérôme Pimot, un ancien de Deliveroo, qui a cofondé le Clap. Et comme il travaille beaucoup, qu’il est posé, les livreurs l’écoutent. C’est pour cela que Deliveroo s’attaque à lui. » Un argument réfuté par l’entreprise. « Deliveroo respecte le droit des livreurs à manifester ou faire grève, assure le porte-parole. Deliveroo ne mettrait jamais fin à un contrat avec un livreur parce que ce dernier participerait à une manifestation ou ferait grève»

Action prud’homale

Alors, quelle est la raison de la « résiliation de [son] contrat de prestation de service », la lettre envoyée au livreur ne précisant aucun motif ? Un porte-parole de l’entreprise explique que, « à plusieurs reprises », M. Hamidouche a « indiqué avoir livré des repas à des consommateurs qui nous ont contactés car ils n’avaient en fait pas été livrés (…). Les gens s’attendent à ce que nous ne travaillions pas avec des livreurs qui commettent ce qui ressemble à de la fraude ou des vols ». Pour M. Hamidouche, l’argument est « bidon. On laisse trois semaines de préavis à un voleur ? Si je suis un voleur, que Deliveroo porte plainte contre moi ! ».

Louis Vuitton recrute pour augmenter ses capacités de production en France

La marque du groupe LVMH a inauguré jeudi une maroquinerie à Beaulieu-sur-Layon. C’est la troisième usine ouverte par Louis Vuitton depuis 2017.

Par Publié aujourd’hui à 10h09, mis à jour à 14h20

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Fabrication d’un sac à l’usine Louis Vuitton de Beaulieu-sur-Layon (Maine-et-Loire), le 5 septembre 2019.
Fabrication d’un sac à l’usine Louis Vuitton de Beaulieu-sur-Layon (Maine-et-Loire), le 5 septembre 2019. STEPHANE MAHE / REUTERS

La blouse est beige. Les chaussures de sécurité sont assorties. Sous l’uniforme des artisans de l’usine Louis Vuitton de Beaulieu-sur-Layon, dans le Maine-et-Loire, inaugurée jeudi 5 septembre, en présence de Muriel Pénicaud, ministre du travail, se cachent des profils d’employés fort différents. L’une a été agricultrice. Elle s’est reconvertie au métier de piqueur, lors du passage à la retraite de son mari, éleveur bovin. L’autre n’a que 22 ans. Depuis un an, elle apprend à coudre du cuir de veau pour fabriquer des sacs Mylockme, l’un des best-sellers de la marque du groupe LVMH. Toutes deux font partie des 135 salariés employés depuis janvier dans cette usine de maroquinerie ouverte dans un bâtiment de 6 000 m2.

A la fin de l’année, l’effectif sera porté à 200 personnes. Les recrutements sont en cours. « D’ici deux ans, 300 personnes travailleront dans cet atelier », assure Michael Burke, PDG de Louis Vuitton.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi La vogue de l’apprentissage ne se dément pas

La marque a déjà le projet d’ouvrir un deuxième site de production d’une surface similaire, toujours sur ce terrain plat situé à proximité de l’A87 au sud d’Angers. Ce n’est pas le seul de ses projets industriels. LVMH qui a investi un milliard d’euros dans ses capacités de production en France en 2018 est en train de construire un troisième atelier Louis Vuitton sur son site de Saint-Pourçain-sur-Sioule (Allier) exploité depuis les années 1990.

« D’ici à 2022, nous embaucherons 1 500 artisans », Michael Burke, PDG de Louis Vuitton

Le groupe de Bernard Arnault s’apprête aussi à s’installer à Vendôme, en centre-ville, dans le Régence, bâtiment du XVIIIe siècle qu’il est en train de restaurer à grands frais pour une inauguration début 2020. La marque porterait ainsi son réseau de sites de production à 17 en France. « D’ici à 2022, nous embaucherons 1 500 artisans », estime M. Burke. Partout, le fabricant bénéficie de l’appui des collectivités locales. A Beaulieu-sur-Layon, Solutions Eco, structure de développement économique de la région des Pays de la Loire, l’a accompagné pour s’installer sur ce parc d’activités. Il ne lui aura fallu que deux ans de travaux.

Accélérer la cadence

Cette offensive doit permettre à la marque du groupe LVMH d’accélérer la cadence de production, de mieux répondre à la demande de sa clientèle et d’expédier au plus vite ses modèles à l’étranger. Les sacs sont le premier pilier de Louis Vuitton, première marque de luxe au monde devant Chanel et Gucci. Malgré l’envolée des ventes de prêt-à-porter Louis Vuitton, la maroquinerie génère toujours la majorité de ses ventes estimées, à plus de 10 milliards d’euros en 2018. Les Chinois raffolent de ses modèles en toile enduite ou en veau. Un tiers de ses ventes provient de cette clientèle, lors de ses achats en Chine ou à l’étranger. Et, malgré les craintes d’une récession de la consommation chinoise, la demande demeure « exceptionnellement élevée » dans le pays, souligne le PDG de la griffe.

La vogue de l’apprentissage ne se dément pas

A la fin juin, la France dénombrait 458 000 apprentis, un niveau record qui n’empêche pas quelques couacs.

Par et Publié aujourd’hui à 09h54

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Yan Colcanopa

Perceptible à la fin du quinquennat de François Hollande, le regain d’intérêt pour l’apprentissage se confirme et semble même s’amplifier. A la fin juin, ils étaient 458 000 à s’initier à un métier dans le cadre de ce dispositif qui alterne immersion en entreprise et cours dispensés dans un centre de formation. C’est un « record », s’est réjouie, jeudi 5 septembre, la ministre du travail, Muriel Pénicaud, lors d’un déplacement en Maine-et-Loire, au cours duquel elle a, entre autres, assisté à l’inauguration d’un atelier Louis Vuitton qui accueillera, à terme, des apprentis maroquiniers.

La date retenue pour cette visite, qui était aussi l’occasion de souhaiter une « bonne rentrée à tous les apprentis de France », ne doit rien au hasard : elle intervient un an jour pour jour après la promulgation de la loi avenir professionnel, qui a transformé en profondeur l’apprentissage.

« Une voie d’excellence »

Ce mode de formation a accueilli près de 59 000 nouveaux jeunes entre début janvier et fin juin, soit un accroissement de 8,4 % par rapport à la même période en 2018, selon Mme Pénicaud. L’augmentation est plus forte que celle mesurée sur l’ensemble de l’année dernière (+ 7,7 %) et sur 2017 (+ 2,1 %, d’après les services du ministère du travail). « La nette progression enregistrée au premier semestre 2019 doit toutefois être analysée avec prudence car les entrées en apprentissage s’effectuent pour l’essentiel dans les quatre derniers mois de l’année civile », nuance Bertrand Martinot, ex-responsable de la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle et auteur de plusieurs notes sur ces thématiques pour l’Institut Montaigne.

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Il n’en demeure pas moins que la tendance est à la hausse. « Ces bons chiffres sont le fruit des nouvelles libertés de choisir, de développer, de créer qu’offre la loi [avenir professionnel] », écrit Mme Pénicaud, dans le dossier de presse diffusé à l’occasion de sa venue en Maine-et-Loire. La ministre fait notamment allusion au changement de règles encadrant la création des centres de formation des apprentis (CFA) : plus besoin, désormais, d’obtenir l’imprimatur des conseils régionaux – un acteur de premier plan dans le système de la formation. Le texte chamboule également les modalités et les circuits de financement.

« L’idée qu’il s’agit d’une voie d’excellence, débouchant sur un emploi dans 80 % des cas et permettant de combattre l’échec scolaire, s’impose enfin »