Quand le métier de concierge est supprimé
La question de la suppression du poste suscite souvent des frictions entre copropriétaires, qui se doublent de désaccords sur la manière de voter.
Janvier est, habituellement, le mois où les copropriétaires offrent des étrennes à leur concierge pour le remercier des services rendus – rattraper leurs colis ou ouvrir la porte de leur appartement aux employés du gaz, de l’électricité ou du chauffage en leur absence. Certains regrettent toutefois de ne plus pouvoir le faire, du fait que le poste de concierge a été… supprimé.
Ce sont surtout les copropriétaires les plus âgés qui conservent à la présence permanente d’un gardien, en considérant qu’il contribue à la sécurité des lieux. Les plus jeunes, en revanche, préfèrent s’en passer et recourir à des prestataires extérieurs pour le nettoyage des parties communes, afin de faire des économies ; ils souhaitent aussi récupérer la loge pour y mettre des poussettes, des vélos ou des trottinettes.
La question de la cession du poste, qui se pose surtout dans les petites copropriétés, suscite donc souvent des frictions, qui se doublent de désaccords sur la manière de voter. La loi du 10 juillet 1965 sur la copropriété étant restée muette sur le sujet, ceux qui voulaient soutenir le poste de concierge ont longtemps bénéficié d’une jurisprudence favorable : une majorité des juges ont considéré que, lorsque le poste de gardien était prévu au règlement de copropriété, il fallait l’unanimité des voix pour le supprimer. Ils ont annulé des résolutions qui s’étaient contentées d’une majorité qualifiée (majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix).
« Habitation bourgeoise »
Mais la loi Boutin, du 25 mars 2009, puis la loi ALUR, adoptée le 24 mars 2014, ont borné les exigences de cette jurisprudence. Elles précisent qu’il suffit d’une majorité qualifiée, à condition toutefois que la suppression du poste ne porte pas atteinte « à la destination de l’immeuble » (son standing) ou « aux modalités de jouissance des parties privatives » – dans le cas contraire, il faut l’unanimité. Les juges considèrent que la destination de l’immeuble ou la jouissance des parties privatives ne sont « pas atteintes » si les solutions de substitution mises en place par la copropriété offrent des avantages « strictement équivalents » à ceux que proposait le service de conciergerie.