« M. Macron souhaite une élasticité à l’allemande »
Le président demande un renforcement des sanctions et des baisses d’allocations-chômage aux partenaires sociaux. Des exigences inacceptables, estime le négociateur de la CGT
Un décret annnoncé le 30 décembre 2018 en application de la loi du 5 septembre 2018 « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » a attiré l’attention sur le renforcement des sanctions contre les chômeurs. Il ne s’agit pas seulement de suspendre, et même d’annuler, les allocations pour de prétendus manquements : une redéfinition de « l’offre raisonnable d’emploi » permet d’obliger une personne inscrite à Pôle emploi à accepter à peu près n’importe quel emploi sans référence au salaire antérieurement perçu, voire sans référence à sa qualification.
Au-delà de ces sanctions qui font le mélange entre l’immense majorité des chômeurs et les 0,4 % de fraudes, la nouvelle loi permet au gouvernement de faire rouvrir la négociation de la convention assurance chômage entre patronat et syndicats, un an avant l’échéance. Ainsi, le gouvernement peut aussitôt décider de faire modifier une convention Unédic en cours, ce qu’il s’est empressé de faire par sa lettre de cadrage du 25 septembre 2018 aux organisations siégeant à l’Unédic. Il entend ainsi imposer 3,9 milliards d’euros d’économies en trois ans, soit 1,3 milliard par an sur 37 milliards d’indemnités versées. Cela signifierait une perte moyenne considérable de 3,5 % sur les allocations, pour des personnes dont le revenu moyen est de 1 200 euros par mois.
Mais cette lettre de cadrage vise surtout les travailleurs précaires, celles et ceux dits « en activité réduite », c’est-à-dire 800 000 personnes parmi les 2,2 millions inscrites dans les catégories B et C des chiffres mensuels du chômage. Elle exige de revoir à la baisse le calcul des allocations lorsqu’il y a « cumul » – en fait, alternance – de périodes de travail, généralement en CDD courts, et de chômage indemnisé, de revoir la durée de ce cumul, ou encore sa éventualité même ; par exemple lorsqu’une assistante maternelle, qui peut garder jusqu’à trois enfants, n’en garde plus qu’un ou deux (généralement parce que la famille inscrit son enfant à l’école maternelle).
Destruction des droits
Déjà touchés par des baisses de droits dues aux conventions 2014 et 2017, nombre de personnes pourraient ainsi perdre 10 % à 30 % de leur allocation, soit 100 à 200 euros par mois, voire ne plus bénéficier d’allocations du tout. Ce sont des intérimaires, des extras de l’hôtellerie, des assistantes maternelles, souvent des jeunes ou des personnes poussées vers la sortie avant l’âge de la retraite : une armée de réserve aux contrats de plus en plus courts ou à temps partiel, un volant de précarité à laquelle sont « accros » bon nombre d’employeurs, petits et gros.