Jean-Marc Sauvé : « L’Etat a été victime de la doxa libérale »

Jean-Marc Sauvé : « L’Etat a été victime de la doxa libérale »

L’ancien vice-président du Conseil d’Etat juge avec sévérité la réforme en cours de la haute fonction publique.

Propos recueillis par et Publié aujourd’hui à 11h12, mis à jour à 14h22

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Jean-Marc Sauvé, à Paris en septembre 2017.
Jean-Marc Sauvé, à Paris en septembre 2017. LIONEL BONAVENTURE/AFP

A la tête du Conseil d’Etat de 2006 à 2018, Jean-Marc Sauvé se montre très critique sur le projet de réforme de la haute fonction publique, en cours d’élaboration. Celui-ci prévoit notamment de créer un nouvel établissement qui formera les grands commis de l’Etat et de limiter, voire de supprimer, l’accès direct aux grands corps pour les diplômés de l’Ecole nationale d’administration (ENA).

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Quel regard portez-vous sur les réformes de la haute fonction publique ?

Parler des grands corps, de leurs prétendus « privilèges », de la remise en cause du « système » des grands corps est un sujet en soi passionnant, mais qu’on ne peut aborder indépendamment de ce qu’est la fonction de ces institutions. Il faut aussi avoir une vision claire du rôle de l’Etat dans la période actuelle de globalisation économique, de défis environnementaux et de fracturation de nos sociétés. Face à ces enjeux, l’Etat n’a jamais été autant concurrencé, subordonné, fragmenté, banalisé et paupérisé. Et pourtant, il reste ce qui fait que la société tient debout et ensemble. C’est le socle sur lequel la nation s’est construite et, aujourd’hui, dans un monde post-westphalien, c’est-à-dire où les souverainetés étatiques sont battues en brèche par des entreprises multinationales qui se jouent des frontières, la mission de l’Etat n’a jamais été aussi essentielle pour défendre et promouvoir ce qui nous est commun.

Pour faire face à ces défis, l’Etat ne doit-il pas pour autant se réformer ?

Je ne ferai jamais l’éloge d’un Etat statique qui, au moment où tout se transforme, resterait inerte. La communauté nationale a besoin d’un Etat puissant, agile, résilient, réactif, d’un Etat capable d’assumer le destin de la communauté nationale et d’en répondre devant le peuple. Cela implique nécessairement des mutations. La puissance publique ne peut plus être seulement verticale et hiérarchique ; elle doit aussi fonctionner en réseau et en « mode projet ».

Ce qui est aujourd’hui présenté comme une réorganisation de l’Etat vous semble-t-il à la hauteur de ces mutations ?

Aujourd’hui, trop d’administrations sont épuisées et harassées par la gestion du très court terme, le nez dans le guidon

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LJD

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