Démissionner après une formation peut coûter cher aux salariés
C’est un serpent de mer qui vient de refaire surface dans le cadre des négociations sur le « pacte de la vie au travail ». Le syndicat patronal Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) a exprimé le souhait que les employeurs puissent avoir plus facilement recours au dédit-formation.
Ce dispositif, qui intervient sous forme de clause dans le cadre d’un accord entre l’employeur et le salarié, prévoit que ce dernier s’engage à demeurer un certain temps dans l’entreprise au retour de la formation qui lui a été financée, sous peine de devoir la rembourser.
Une obligation que justifie Eric Chevée, le vice-président chargé des affaires sociales de la CPME : « Quand les salariés acquièrent par une formation des compétences qu’ils peuvent monnayer immédiatement ailleurs, cela peut dissuader les entreprises de les financer. Au lieu de former leurs propres collaborateurs, les employeurs, faute de garantie, sont tentés de recruter à l’extérieur, ce qui est dommage. »
En réduisant le risque de départ anticipé, ce dispositif inciterait les entreprises, surtout celles qui exercent leur activité dans des métiers en tension, à investir davantage dans la formation interne. Et Eric Chevée de rappeler, à titre d’exemple, qu’un permis de conduire pour un poids lourd de 40 tonnes avoisine les 4 000 euros, une somme considérable pour une TPE.
Les clauses de dédit-formation concernent aussi des cadres, qui peuvent être envoyés en écoles de commerce pour suivre des séminaires de plusieurs dizaines de milliers d’euros, à condition qu’ils s’engagent à demeurer entre deux et cinq ans chez leur employeur.
Les syndicats de salariés partagés
Actuellement, la clause de dédit-formation est essentiellement « régie par la jurisprudence de la Cour de cassation, qui définit ses conditions de validité en fonction du coût et de la durée de la formation précisés dans l’accord signé au préalable entre le salarié et l’employeur », expliquent Pauline Miranda et Christophe Girard du cabinet CMS Francis Lefebvre Avocats à Lyon. Il ne s’agit donc pas d’un droit inscrit dans le code du travail : en reprenant les acquis de la jurisprudence et en détaillant les possibilités, son inscription dans la loi conférerait, selon ces avocats, une meilleure visibilité à ce dispositif peu utilisé car méconnu.
Convaincu de ses atouts, Franck Morel, avocat en droit social du cabinet Flichy Grangé, a pour sa part promu dès 2020 le dédit-formation dans une note publiée sous l’égide de l’Institut Montaigne, un cercle de réflexion d’inspiration libérale. Il y proposait la mise en œuvre par voie contractuelle d’une telle clause lorsque l’entreprise met des moyens supplémentaires en œuvre à ses obligations légales, limitée dans le temps et à l’exercice par le salarié d’activités concurrentes. Dans cette perspective, « l’employeur profite du gain de productivité découlant de son investissement sécurisé dans la formation d’un collaborateur. Et ce dernier améliore son employabilité et ses espérances de gain sur le marché du travail. Tout le monde est gagnant », détaille Franck Morel.
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