Le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire, n’a pas écarté, mercredi 19 décembre sur BFM-TV et RMC, un rachat provisoire de l’usine Ford de Blanquefort (Gironde) par l’Etat afin de le revendre ensuite au groupe franco-belge Punch Powerglide, qui a présenté une offre de reprise de cette usine que Ford a rejetée.
« Pourquoi pas ? Je suis prêt à ce genre de solutions. Je suis prêt aux solutions les plus originales pour garantir qu’un site industriel performant, qui a un repreneur de qualité et des salariés qui sont totalement engagés, puisse survivre ».
Il n’a cependant pas donné plus de détails sur les solutions envisagées pour racheter un site que Ford ne souhaite pas revendre.Le ministre a révélé s’être entretenu la veille au téléphone avec le président du constructeur automobile pour l’Europe, Steven Armstrong, pour la deuxième fois depuis l’annonce de son rejet de l’offre de reprise par Punch.
« Je n’ai pas encore baissé les bras »
Il a saisi l’occasion pour lui adresser une mise en garde, assurant que le constructeur états-unien risquait de « perdre beaucoup en termes de réputation » et affirmant que « la partie n’était pas finie ».
« Pour Blanquefort, croyez-moi, je n’ai pas encore baissé les bras ».
Ford a annoncé jeudi qu’il écartait l’offre de reprise de l’usine de Blanquefort par Punch Powerglide, malgré l’appui du gouvernement français. M. Le Maire avait alors dénoncé une « trahison » et demandé à Ford de revoir sa décision qui concerne 850 salariés. Le président, Emmanuel Macron, avait par la suite qualifié d’« hostile et inacceptable » la décision de Ford de fermer cette usine.
Le projet de reprise de la société franco-belge Punch devait préserver 400 emplois. Le groupe états-unien a estimé qu’un plan social était préférable à un projet de reprise, qu’il juge fragile depuis le départ. Les syndicats de Ford Blanquefort avaient eux aussi appuyé le plan, en acceptant un gel de salaires pendant trois ans, la perte de trois jours de repos et une modulation du temps de travail.
Gilbert Cette, professeur d’économie associé à l’université d’Aix-Marseille, évalue les mesures annoncées par Emmanuel Macron pour résoudre la crise des « gilets jaunes ».
Quel jugement portez-vous sur le dispositif annoncé le 10 décembre ?
Ce sont des mesures très fortes. Donner du pouvoir d’achat à des ménages assez contraints financièrement, c’est forcément bon pour la consommation. Il y aura un effet sensible sur le niveau du produit intérieur brut (PIB) en 2019, de l’ordre de 0,2 à 0,5 point selon mes calculs. Cela devrait en partie compenser, ou du moins atténuer, les pertes économiques enregistrées au quatrième trimestre de 2018 du fait des événements.
Seulement, il faudra bien financer ces mesures. Elles devraient coûter entre 10 et 12 milliards d’euros. Soit on passe par la dette, et ce seront nos enfants qui hériteront du problème. Soit on finance par des transferts. Dans ce cas, l’effet brut du stimulus sur le PIB sera amoindri.
Le gouvernement envisage d’augmenter la prime d’activité. Pourquoi agir sur ce levier plutôt que par une hausse du smic ?
C’est, d’une part, plus efficace pour lutter contre la pauvreté, et, d’autre part, non pénalisant pour l’emploi puisque ça n’augmente pas le coût du travail. Aujourd’hui, 19 % des bénéficiaires du smic sont sous le seuil de pauvreté. Parce qu’elle tient compte de l’ensemble des revenus du ménage, la prime d’activité a le mérite de cibler justement ces personnes-là.
La défiscalisation des heures supplémentaires, déjà testée sous Nicolas Sarkozy, s’inscrit dans cette logique ?
L’ancien dispositif avait eu un petit effet positif sur le niveau du PIB, mais un impact défavorable sur l’emploi. Cet aspect devrait être moindre, cette fois, parce que les heures supplémentaires seront toujours soumises aux charges sociales acquittées par les employeurs.
J’ai néanmoins quelques réserves parce que les travailleurs les plus défavorisés n’en profiteront pas. Je pense, par exemple, à la caissière de supermarché qui est à mi-temps contraint. Elle voudrait déjà faire la durée légale, mais ne peut pas. Cette mesure n’est pas appropriée dans un pays en chômage massif.
Quel effet aura la suppression de la hausse de la CSG pour les pensions inférieures à 2000 euros ?
Les retraités les plus défavorisés vont en profiter. Mais cela introduit un seuil, ce qui est toujours problématique. Dans ce cas, une personne qui touche 2 050 euros gagnera in fine moins qu’une autre qui dispose de 1950 euros puisqu’elle devra s’acquitter de la hausse de la CSG.
Face à la colère des policiers « épuisés » par une surcharge de travail, le ministère de l’intérieur met en place un « calendrier » pour payer aux policiers les 274 millions d’euros en heures supplémentaires que l’Etat leur doit, a annoncé le secrétaire d’Etat Laurent Nuñez sur RMC, mercredi 19 décembre :
« En gros, c’est trois millions d’heures supplémentaires qui sont créées chaque année. Payer l’ensemble de ces heures, c’est un coût qui représente 274 millions d’euros. Ce paiement sera effectif selon un calendrier que nous allons définir, je vous le confirme. C’est ce dont nous discutons avec les organisations syndicales. »
Mardi, Christophe Castaner avait rappelé que ce stock d’heures supplémentaires avait commencé à s’accumuler non pas « ces derniers mois » ou « cette dernière année, mais depuis des dizaines d’années ». « C’est un chantier que je veux ouvrir », avait-il ajouté.
Une prime de 300 euros
Les discussions commencées, et suspendues, mardi soir, doivent se poursuivre mercredi avec les trois organisations syndicales représentatives chez les gardiens de la paix : Alliance, Unité-SGP-FO et UNSA-Police. En attendant, Unité-SGP-FO a rejoint le mouvement lancé par Alliance avec le mot d’ordre « fermons les commissariats ». Le syndicat a demandé « à tous les policiers de France de ne sortir que sur appel » d’urgence mercredi.
Le gouvernement a aussi proposé une prime de 300 euros aux forces de l’ordre mobilisées lors des manifestations de « gilets jaunes ». Un amendement en ce sens a été adopté dans la nuit de mardi à mercredi à l’Assemblée dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances 2019. Cette prime représente un coût de 33 millions d’euros.
D’après Laurent Nuñez, le chiffre de 111 000 policiers et gendarmes auxquels elle doit être versée est « une base de départ ». « On discute actuellement du périmètre, c’est-à-dire le nombre de policiers et de gendarmes qui pourraient être concernés », a-t-il précisé.
L’histoire semble repasser les plats. Car les brûlantes questions posées en décembre 2018 rappellent les débats ayant précédé la loi de la création des syndicats par Pierre Waldeck-Rousseau et votée le 21 mars 1884. En acceptant de « légaliser la classe ouvrière », le ministre de l’intérieur de Jules Ferry leur avait aussi donné un rôle d’encadrement d’éventuelles dérives : leurs statuts, où figurerait le nom des « responsables », devaient ainsi être transmis au préfet et au procureur…
Alors que la critique des syndicats et plus largement des corps « intermédiaires » structurés est tendance, l’éruption des « gilets jaunes » a rappelé leur nécessité : depuis soixante ans, aucune manifestation syndicale n’a entraîné la mort de six personnes, et aucun employeur ne peut négocier avec des contestataires inorganisés.
Que des citoyens ne se sentant pas représentés aient du mal à désigner leurs mandants n’est guère étonnant. Mais si leur mouvement perdure, ils n’échapperont pas à l’exigence d’une « représentation ». D’abord, car il est physiquement et temporellement impossible de négocier avec plusieurs personnes. L’intérêt d’une présence syndicale est de faire la synthèse, hiérarchiser les revendications, expliquer que « Tout, ou rien » mène rarement au succès.
Ensuite, car une multiplication de négociations individuelles conduisant à des résultats différents, surgit la question de l’égalité de traitement, source de nouveaux conflits. Pour ces raisons très terre à terre, à la fin du XIXe siècle, des employeurs ont, pour négocier un accord de fin de conflit, demandé aux grévistes de désigner leurs « délégués du personnel » légalisés en 1936, permettant la signature des très égalitaires « conventions » littéralement « collectives ».
Mais comment choisir ces délégués ? Faut-il privilégier les charismatiques « porte-parole » du mouvement, aujourd’hui les bons clients des journaux télévisés ? Excellente pour populariser les revendications à notre époque où le soutien de l’opinion est essentiel, cette fonction tribunitienne se révèle insuffisante lorsqu’il s’agit de négocier une sortie de crise.
Représentativité
Car, côté puissance publique comme côté employeur, une éventuelle signature comportant des contreparties doit être suivie d’effets. Se pose donc la question de la représentativité réelle des futurs négociateurs, dans notre monde beaucoup moins vertical y compris côté syndical, et dominé par les réseaux sociaux à l’horizontalité offensive : aucune tête ne doit dépasser, et le référendum est permanent.
Le suspense était encore à son comble, mercredi 19 décembre au matin. Restent que tous les signaux étaient au vert. La chambre commerciale du tribunal de grande instance (TGI) de Strasbourg devait bien autoriser Altifort à reprendre l’aciérie d’Ascoval. Le groupe franco-belge, soutenu à la fois par les salariés de l’aciérie de Saint-Saulve (Nord) et les pouvoirs publics, a en effet convaincu en audience la justice commerciale.
Après la reprise du groupe Ascométal, en janvier, Ascoval, codétenue par cette société reprise par Schmolz + Bickenbach et Vallourec, avait été laissé au bord du chemin. A charge pour le TGI de Strasbourg de lui trouver un repreneur. Plusieurs sociétés et fonds ont marqué leur intérêt pour l’usine modernisée, en 2014, par Vallourec, mais seul Altifort a persévéré.
Le groupe dirigé par Bart Gruyaert et Stanislas Vigier, qui a repris une vingtaine d’usines mécaniques, ces dernières années, s’engage à sauver 281 emplois du site valenciennois. Pour cela, il a accepté de se passer des commandes du spécialiste des tubes sans soudure pour le secteur parapétrolier.
152 millions d’euros investis
Depuis plusieurs semaines, les équipes d’Altifort et d’Ascoval cherchent, sans relâche, des clients pour assurer, à l’avenir, la charge de l’usine. Le groupe assure disposer de lettres d’engagements suffisantes pour écouler la production d’acier ordinaire et d’aciers spéciaux pour les années à venir. Le groupe franco-belge a également prévu d’investir dans un train à fil, qui permettra de monter dans la chaîne de valeur et de fournir les tréfileries du groupe. Plusieurs dizaines de nouveaux emplois devraient être créés.
Pour financer son développement, le groupe industriel, qui compte 1 500 salariés, a l’intention d’investir 152 millions d’euros à Saint-Saulve. La société apportera 35 millions d’euros. Elle mobilisera également 40 millions d’euros de crédit-bail pour le financement du futur train à fil et 30 millions d’euros d’affacturage. Enfin, l’Etat, la région Hauts-de-France et Valenciennes se sont engagés à prêter jusqu’à 47 millions d’euros.
Même si le chemin est étroit, le cabinet Roland Berger a jugé crédible, début novembre, le projet. Pour le valenciennois et pour les salariés qui vivent dans l’angoisse d’une fermeture de l’usine depuis un an, trouver un repreneur serait un véritable soulagement. Une assemblée générale était d’ores et déjà convoquée, mercredi, à 14 heures, à l’usine, afin de faire le point sur les décisions de justice. La reprise effective par Altifort de cette aciérie créée en 1975 est prévue le 1er février 2019.
Le taux d’absentéisme est une mesure lisible, visible et inquiétante. Il atteint, pour l’année 2017, 4,72 % des heures de travail, soit 17,2 jours d’absence par salarié, selon le baromètre Ayming 2018. On ignore pourtant souvent qu’il n’est que « la partie émergée d’un immense iceberg », rappelle Fabien Piazzon : avant de s’absenter, le salarié a vécu neuf autres formes de souffrance ou de démotivation, qui ont déjà produit des effets néfastes sur la performance de l’entreprise.
Dans Absentéisme : l’alerte rouge, l’enseignant et consultant balaie les idées fausses – non, le salarié absent n’est pas paresseux et, non, la souffrance au travail n’est pas une fatalité – et invite le dirigeant à s’interroger sur la part de l’absentéisme attribuable au cadre du travail qu’il offre.
Un questionnement d’autant plus nécessaire que l’alerte sera écarlate demain : l’augmentation du nombre de salariés âgés va encore accroître l’absentéisme. Les salariés qui ont aujourd’hui 50 ans ont été imprégnés de l’idée qu’ils allaient travailler jusqu’à 60 ou 62 ans ; le recul de l’âge de la retraite crée les conditions d’une extrême démotivation, estime celui qui, depuis quinze ans, accompagne entreprises et employeurs publics dans la prévention des risques professionnels et de l’absentéisme.
L’entreprise devra mener une réflexion pour maintenir dans l’emploi des salariés âgés qui n’auront pas les mêmes capacités cognitives et physiques que leurs prédécesseurs. Enjeu crucial pour les entreprises aujourd’hui, et demain pour les assurances qui devront continuer à financer ces hausses d’absentéisme par la hausse des cotisations. Selon une étude de l’institut Sapiens, l’absentéisme au travail en France coûterait 108 milliards d’euros par an, soit 4,7 % du PIB.
« Une société de RTT »
L’auteur ne se contente pas de déplorer le gâchis. « Dans un véritable plaidoyer sur les ressorts de l’engagement, cet essai met en valeur les paramètres sur lesquels l’employeur a pris – et ils sont nombreux », se réjouit dans la préface Hervé Lanouzière, membre de l’inspection générale des affaires sociales (IGAS). A une condition, néanmoins : l’employeur ne peut réduire l’absentéisme dans son entreprise que s’il le comprend « comme le révélateur d’un défaut dans le rapport au travail, qu’il le sorte de la banalité de la fatalité », souligne Fabien Piazzon.
La France compte 8,3 millions d’aidants de personnes dépendantes (post-AVC, cancer, handicapé, parent ou enfant malade, etc.), dont 47 % travaillent, indique l’Association française des aidants. Dans les entreprises, ce sont deux salariés sur dix qui sont concernés : « Un chiffre qui a doublé en dix ans », assure le mutualiste Malakoff Médéric (Enquête « Santé et qualité de vie au travail des salariés », juin 2018).
L’enjeu est de taille : « Avec l’allongement de l’espérance de vie des parents de salariés et la hausse du nombre de maladies chroniques, les salariés aidants sont de plus en plus nombreux », explique Fabien Piazzon, l’auteur d’Absentéisme : l’alerte rouge. Panser et repenser le travail (Nouveaux Débats Publics). Sur 1 000 salariés aidants accompagnés, le besoin d’aide est à 25 % lié au vieillissement, 19 % au handicap, 8 % au cancer, 8 % à un AVC et 8 % à d’autres maladies, confirme Formell, une société spécialisée dans l’accompagnement des actifs aidants.
L’impact sur l’absentéisme n’est pas précisément chiffré, indique l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail. Mais il est avéré : « L’absentéisme est lié aux conditions de travail, à la motivation, à la santé des personnels ou à celle de leurs proches. Les salariés aidants se retrouvent dans cette troisième catégorie. Leur quotidien est parfois proprement infernal », remarque Fabien Piazzon.
Manque de sommeil, anxiété, isolement, les aidants finissent par avoir des problèmes de santé qu’ils n’avaient pas avant. « Les statistiques des services sociaux des Carsat [caisse d’assurance retraite et de la santé au travail] montrent que 50 % des aidants familiaux décèdent avant les proches qu’ils aident, consécutivement à des pathologies d’épuisement », indique Christophe Roth délégué national CFE-CGC dans le Guide des aidants.
Les répercussions au travail sont nombreuses : redistribution de la charge de travail, fatigue, stress, démotivation, risque d’erreurs, etc. « L’accompagnement est un facteur de cohésion d’équipe. Les groupes de parole permettent de conseiller les manageurs sur leur perception de la situation et de coconstruire avec le salarié sa propre solution. Mais avec la multiplication des maladies chroniques, on reçoit des manageurs désarmés, épuisés », témoigne Hélène Bonnet, responsable du programme « Cancer et travail : Agir ensemble » du groupe pharmaceutique Sanofi.
Une nouvelle négociation de la convention d’assurance-chômage s’est engagée entre les partenaires sociaux – une réunion s’est tenue le 18 décembre à ce sujet. Elle a récemment pris un nouveau tournant, initié par le Medef, qui propose de dissocier d’un côté une couverture universelle gérée et financée par l’Etat, et de l’autre une assurance complémentaire obligatoire pilotée par les syndicats.
Cette proposition tire profit d’une double brèche ouverte par le gouvernement.
D’une part, la suppression des cotisations salariales d’assurance-chômage a changé la donne, puisqu’une partie du système d’assurance-chômage se trouve dorénavant financé par l’impôt (CSG).
D’autre part, le gouvernement s’est avancé sur le terrain d’un revenu universel d’activité, sans plus de précisions jusqu’alors.
Ceci traduit une certaine volonté de reprise en main par l’Etat du système de couverture des risques de carrières, qui conduit aujourd’hui le Medef à plaider, avec opportunisme, pour une remise à plat complet du système. Cela reviendrait à se calquer sur le système de retraite, qui combine un régime de base géré par l’Etat et un régime complémentaire d’assurance géré par les syndicats, ces derniers se désengageant donc du régime de solidarité.
Prudence de mise
Le système envisagé comporterait une nouvelle allocation unique se substituant à l’allocation de solidarité spécifique et potentiellement à d’autres minima sociaux tels que le revenu de solidarité active (RSA), à laquelle s’ajouterait une assurance-chômage complémentaire limitée dans son montant et sa durée.
Que penser d’une telle perspective ? La prudence semble devoir être de mise, afin d’éviter que la juxtaposition de deux systèmes, gérés indépendamment l’un de l’autre, ne conduise à réduire les incitations à l’emploi. Cet écueil est plus prégnant pour les travailleurs peu qualifiés, et plus particulièrement pour les jeunes les moins qualifiés.
La valeur de l’emploi relativement au chômage demeure en effet faible, au regard de la pénibilité du travail et de divers coûts connexes (transport notamment), pour les individus les moins formés et aux rémunérations proches du smic. A titre d’exemple, ce gain financier à travailler se chiffre à environ 300 euros par mois pour une personne sans enfant bénéficiaire du RSA qui reprend un emploi à mi-temps au smic, contre un peu moins de 200 euros précédemment sous le régime du revenu minimum d’insertion (RMI). Un effet positif de faible ampleur sur le taux de retour à l’emploi est ainsi imputé à la bascule du RMI vers le RSA. Cet effet reste toutefois fragile : à mesure que l’on rendrait les revenus d’assurance-chômage plus élevés que ceux du RSA, les incitations à travailler chuteraient.
Question de droit social. Lorsqu’en février 2018 Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, a annoncé des plans de départs volontaires dans la fonction publique, un rapprochement immédiat s’est opéré avec les plans de départs volontaires, les fameux PDV qui, depuis des décennies, ponctuent les restructurations d’entreprises du secteur privé.
Pourtant, à l’exception du sigle « PDV », les dispositifs en question n’ont quasiment rien en commun. Inconnus du code du travail mais consacrés par la jurisprudence, les PDV se sont fait une place de choix dans la palette des dispositifs permettant à une entreprise qui connaît des difficultés économiques de réduire sa masse salariale sans pour autant procéder à des licenciements économiques proprement dits.
En substance, l’employeur fixe un nombre idéal de départs, tous basés sur le volontariat, en précisant le périmètre de la restructuration envisagée c’est-à-dire les secteurs d’activité et les postes concernés.
Les salariés intéressés acceptent alors de quitter l’entreprise selon des modalités financières arrêtées après consultation des représentants du personnel. Ils ne sont pas licenciés mais partent à l’amiable avec des indemnités supérieures à celles qu’ils auraient perçues dans une hypothèse de départ contraint.
Communication politique
Les pouvoirs publics se sont toujours montrés très favorables à cette formule qui a une image beaucoup plus positive que les plans de sauvegarde de l’emploi (PSE), synonymes de licenciements secs. A tel point que les ordonnances Macron ont en quelque sorte donné un fondement légal aux PDV en créant les « ruptures conventionnelles collectives ».
Alors, les PDV dans la fonction publique, même combat ? Certainement pas, au moins pour le moment. D’aucuns ont voulu voir une véritable révolution dans l’annonce de ces PDV dans la fonction publique. C’est privilégier la communication politique au détriment de la rigueur juridique.
Ce dispositif n’est pas nouveau dans la fonction publique. Depuis des décrets de 2008 et 2009, un fonctionnaire peut en effet déjà postuler à un départ volontaire et percevoir une indemnité de départ, si son service est restructuré ou encore s’il décide de créer ou de reprendre une entreprise.
Pour être éligible, le fonctionnaire doit se trouver à plus de cinq ans de l’âge d’ouverture du droit à pension. L’administration peut toutefois refuser une demande d’indemnité de départ volontaire pour des raisons tirées de l’intérêt du service.
Qui se souvient de décembre 2017 ? Un climat des affaires au beau fixe, des créations d’emplois par milliers, des ménages confiants… A l’époque, la croissance taquinait les 2 %. La nouvelle année promettait d’être radieuse et… patatras ! Ce qui s’annonçait comme un léger coup de mou en début d’année a viré au ralentissement généralisé. Le recul du pouvoir d’achat au premier trimestre, conjugué à un environnement international moins porteur, a affecté l’activité. La colère populaire à l’automne a fait le reste.
Résultat : au quatrième trimestre, le produit intérieur brut (PIB) français progresserait d’environ 0,2 %, selon la note publiée, mardi 18 décembre, par l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). C’est deux fois mois que ce qui était attendu. Les comptables nationaux ont donc revu – une fois de plus – leurs prévisions à la baisse : finalement, la croissance de l’activité ne devrait pas dépasser 1,5 % en 2018. Une estimation conforme à celle livrée, jeudi 13 décembre, par la Banque de France, et qui porte l’acquis de croissance à 1 % pour la mi-2019.
Un quatrième trimestre heurté
Il faut dire que les trois derniers mois de l’année ont été rudes. La suppression complète des cotisations salariales et la première tranche de baisse de la taxe d’habitation, censées redonner de l’air aux ménages et relancer la consommation, n’ont pas eu l’effet escompté. Loin s’en faut… En décuplant l’incidence de la hausse des taxes sur les carburants, le renchérissement des cours du pétrole a libéré une vague de colère rarement observée en France. Ses conséquences sur l’activité sont, encore aujourd’hui, difficiles à évaluer.
L’Insee, qui a terminé ses calculs le 13 décembre, estime que « le mouvement des “gilets jaunes” pourrait ôter 0,1 point à la croissance du PIB au quatrième trimestre ». A titre de comparaison, les grèves massives de 1995, avaient coûté 0,2 point. Cette fois, les événements ont surtout affecté les commerces et la consommation. Certaines dépenses pourront être reportées, mais des secteurs comme l’hébergement-restauration, les loisirs et les transports, devraient enregistrer des pertes sèches.
Le climat des affaires s’en ressent. Alors que le moral des chefs d’entreprises semblait se stabiliser en novembre, les blocages et manifestations ont fait plonger les courbes. L’indice composite établi par le cabinet IHS Markit pour mesurer l’activité a chuté de 5 points, passant à 49,3 contre 54,2, son niveau le plus bas depuis trente mois. D’après l’Insee, un léger mieux est à espérer au premier semestre 2019, même si « la production manufacturière ne progresserait pas » sur cette période.
Taux de chômage stable
Pas étonnant, dans ce contexte de tassement, que l’emploi marchand ait marqué le pas. L’Insee a dénombré trois fois moins de créations de postes en 2018 qu’en 2017 (107 000 contre 341 000). Environ 64 000 sont attendues au premier semestre 2019, notamment dans les services. Très haut ces dernières années, l’intérim poursuivrait son repli. A l’inverse, la montée en puissance des Parcours emplois compétences (PEC) redonnerait quelques couleurs à l’emploi non marchand, très touché par l’effondrement des contrats aidés. Le taux de chômage, lui, resterait stable, à 9,1 %, avant d’atteindre 9 % au printemps 2019.
Mais l’horizon n’est pas complètement bouché : les entreprises vont bénéficier, l’an prochain, de la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) en réduction pérenne de cotisations patronales. Leur taux de marges augmenterait de 1,5 point, pour s’élever à 33,5 % début 2019 et ainsi retrouver des niveaux d’avant la crise. Un facteur qui devrait soutenir l’investissement et profiter à l’emploi.
Les sociétés, grandes et petites, seront-elles mises à contribution pour financer les mesures de soutien au pouvoir d’achat annoncées par Emmanuel Macron, le 10 décembre ? C’est le scénario qui se dessine, mais l’Insee n’a pas pu l’intégrer dans ses prévisions. Ses analystes estiment, en revanche, que le gonflement de la prime d’activité, l’annulation de la hausse de la CSG sur les retraites de moins de 2 000 euros et la défiscalisation doublée de l’exonération de charges sociales des heures supplémentaires auront un effet bénéfique sur le pouvoir d’achat. Elles le doperaient de 0,5 point au premier trimestre 2019, alors que l’inflation ralentirait.
« Grosses incertitudes »
Reste à savoir comment le coup de pouce se répercutera sur la consommation. « Il y a de grosses incertitudes sur l’ampleur du rebond », reconnaît Julien Pouget, responsable du département conjoncture à l’Insee. Comme la confiance des ménages est très entamée, une partie des gains de pouvoir d’achat sera mise de côté : le taux d’épargne passerait de 14,7 % en 2018 à 15,2 % au cours du premier semestre de 2019. Les dépenses de ménages se redresseraient néanmoins, en hausse de 0,7 %, puis 0,5 %, aux deux premiers trimestres de 2019.
La dynamique globale de l’activité dépendra enfin de l’environnement international. La France, toute tiraillée qu’elle est, n’est pas la seule économie de la zone euro à connaître un ralentissement. « Le rattrapage consécutif aux récessions passées est en train de s’estomper », note l’Insee. En d’autres termes, il faut s’attendre à un affaiblissement durable de la croissance des principaux pays du Vieux Continent.