Le droit social qui parvient du Luxembourg

Le droit social qui parvient du Luxembourg

« Pour éviter toute divergence d’interprétation mais aussi tout nationalisme juridictionnel, le CJUE a le monopole de l’interprétation des textes communautaires, nécessairement commune aux vingt-huit Etats membres ». Photo Siège de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) à Luxembourg,
« Pour éviter toute divergence d’interprétation mais aussi tout nationalisme juridictionnel, le CJUE a le monopole de l’interprétation des textes communautaires, nécessairement commune aux vingt-huit Etats membres ». Photo Siège de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) à Luxembourg, Mel Stuart/Westend61 / Photononstop

Pour échapper tout désaccord d’interprétation, mais aussi tout nationalisme juridictionnel, la Cour de justice de l’Union européenne a l’exclusivité de l’explication des textes communautaires qui doit être commune aux vingt-huit Etats membres.

Nul ne néglige les pénuries de l’Union européenne en matière sociale avec des risques de dumping (le coût horaire d’un travailleur d’un pays à l’autre varie de 1 à 8), ou encore les fraudes à la renonciation, encore que la directive du 28 juin 2018 changée en France le 20 février 2019.

Malgré cela il y a un établissement dont l’activité n’est en rien réunie par les divisions actuelles, et dont la puissance de feu juridique est exceptionnelle. Peu éprouvée du grand public, habituellement confondue avec la Cour de Strasbourg soignant du Conseil de l’Europe, il s’agit de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) qui siège à Luxembourg.

Concertée de vingt-huit juges (un par Etat, afin que chaque culture y soit représentée), elle a plusieurs dotations, entre lesquelles la question préjudicielle (QP) domine statistiquement (deux arrêts sur trois) et juridiquement.

Pour fuir toute différence d’explication mais aussi tout nationalisme juridictionnel, le CJUE a en effet le monopole de l’interprétation des textes communautaires, forcément commune aux vingt-huit Etats membres. C’est le cas, par exemple, des directives, abondantes en droit du travail.

Le fait religieux en entreprise

Convenable par n’importe quel juge qui aurait des doutes d’interprétation, la Cour ne se formule ni sur l’affaire, ni sur une concurrence entre droit national et droit de l’Union, mais sur la seule explication. Et il est remarquable que certains juges nationaux se posent moins de questions que d’autres : sur les 520 QP organisées en 2018, l’Allemagne en avait posé 78, l’Italie 68, la France et la Belgique 41, et enfin le Danemark et la Grèce 3…

L’explication de la CJUE s’inflige dans tous les Etats membres. Sa portée est donc équivalente à celle d’un règlement communautaire, mais quelquefois sur des sujets sociaux extrêmement sensibles n’ayant aucune chance d’obtenir à Bruxelles un consentement suffisant pour produire un texte. Il n’est enfin pas exclu qu’un juge suprême national pose à la CJUE une question dont la réponse semble évidente ; mais elle lui admettra, en s’y soumettant, de ne pas endosser la responsabilité d’une solution très discutée dans son pays.

La question du fait religieux en entreprise donne un concept de l’impact conduisant des décisions de la CJUE. En France, dans son arrêt du 23 novembre 2017, la Cour de cassation a modifié sa jurisprudence pour reprendre l’arrêt de la CJUE du 22 mars 2017, à propos d’une réceptionniste belge déniant de retirer son voile : « L’employeur (…) peut envisager dans le règlement intérieur de l’entreprise (…) une clause de neutralité interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux sur le lieu de travail, dès lors que cette clause générale et indifférenciée n’est appliquée qu’aux salariés se trouvant en contact avec les clients ».

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LJD

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