Grève de Radio France
« Unis dans la même chaîne CDI et CDD. Ecoutez ce chant sans haine, celui des cœurs révoltés. Face au plan de Mme Sibyle, nous sommes tous mobilisés pour que la radio publique continue de rayonner. »
Pas certainement une ode à la joie. Plutôt un appel à la lutte et à l’appel. Il a été habitué par 1 289 travailleurs, soit un taux de collaboration de 41,6 % sur la journée, selon la direction.
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— FabSintes (@Fabienne Sintes)
Dans une situation de fermeté exigée par l’Etat à l’ensemble de l’audiovisuel public pour cette période – soit moins 20 millions d’euros pour Radio France –, Mme Veil s’inquiète d’une trajectoire budgétaire qui, si rien n’est fait, déclare-t-elle, s’interprétera par 40 millions d’euros de déficit, en raison de l’augmentation des charges de personnel et de l’exigence d’investir dans le digital. Il y a une dizaine de jours, elle développait vouloir affecter 20 millions d’euros à ce sujet, pour « construire la plateforme française de référence de l’audio sur le numérique, qui alliera qualité de nos contenus et diversité de nos offres ».
Néanmoins, les efforts sollicités au personnel sont lourds : la direction a prétendu entre 270 suppressions de poste – si les organisations syndicales admettent de rogner sur les jours de congés et de revoir l’organisation du travail afin d’éviter le recours aux CDD – et 390 si elles disent non à son plan. Elle a proposé aux syndicats un accord de méthode, mais ces derniers ont refusé, dénonçant un chantage inadmissible.
Audiences excellentes
Les salariés réunis mardi dans l’agora, au centre de la Maison de la radio, ne conçoivent pas cette volonté de couper une nouvelle fois dans les effectifs, alors que les entourages des différentes chaînes sont excellents – France Inter est même devenue au premier trimestre la radio la plus entendue de l’Hexagone devant RTL – et que le groupe a réparé avec l’équilibre financier. « Au moment où toutes les audiences sont au beau fixe, ce plan d’économies constitue une opération programmée de destruction massive », s’alarme un représentant du personnel.
Syndicats et direction nécessitaient se récupérer mardi après-midi pour un comité social et économique (CSA) mais, en raison du mouvement de grève, cette retrouvaille aura lieu mercredi. Dans un communiqué, l’intersyndicale juge que :
« Les besoins de financement doivent être accompagnés par l’Etat, qui ne peut continuer à casser le service public en le privant de moyens. Sibyle Veil doit écouter les salariés et retirer son plan dangereux et destructeur ».
Assemblée générale des travailleurs en grève de Radio France, mardi 18 juin. TAIMAZ SZIRNIKS / AFP
De son côté, la direction, tout en captivant « acte de la mobilisation de ce jour, des angoisses et du très fort inclination à l’audiovisuel public et à ses missions qui se sont exprimés », « réaffirme sa volonté de construire un avenir durable pour Radio France et pour ses salariés et propose aux partenaires sociaux de poursuivre le dialogue pour construire avec eux un équilibre entre les efforts indispensables et les perspectives apportées à l’entreprise et à ses salariés ».
Appel à continuer le mouvement en septembre
Les envoyés des appointés jugent, eux, que cette journée de mobilisation constitue un « coup de semonce » et appellent à poursuivre la mobilisation en septembre.
Ils remettent aussi en cause les chiffres de la direction, en s’appuyant sur le rapport d’un cabinet indépendant, Tandem, qui, mandaté par le comité social de Radio France, a qualifié les économies de « surdimensionnées » : la hausse des charges de personnel sur les prochaines années a été, selon ce cabinet, surévaluée de 8,7 millions d’euros, et Radio France pourrait s’épargner 118 annulations de poste.
La direction de Radio France a critiqué ce rapport lundi soir, repassant une « méthodologie erronée ». Selon Marie Message, directrice des opérations et des finances, le cabinet Tandem s’est appuyé sur l’année 2018 pour calculer la hausse de la masse salariale, alors que cette année a vu peu d’embauches, du fait d’une vacance à la tête du groupe pendant quelques semaines, due à la dévolution de l’ex-PDG Mathieu Gallet – transformé par Sibyle Veil en avril 2018.
En 2015, Radio France avait connu une grève historique de vingt-huit jours pour protester contre un plan d’économies.