Les nouvelles pratiques managériales nées du Covid-19

C’est une rentrée vraiment pas comme les autres. Les entreprises ont un souhait : accélérer le retour physique de leurs salariés dans les locaux mais, crise sanitaire oblige, avec des conditions particulières, dont le port obligatoire du masque dans les espaces clos et partagés à compter du 1er septembre. « Fin juillet, 85 % de nos salariés étaient en télétravail, explique Benjamin Revcolevschi, directeur général de Fujitsu France, entreprise de technologies de l’information et communication. En septembre, ils reviendront dans les bureaux, mais par roulement à hauteur de 50 % ».

A la rentrée, 40 % des effectifs de l’agence de publicité Dentsu auront regagné leurs bureaux, avec comme objectif à terme, et selon l’évolution des conditions sanitaires, le taux de 60 %. « Notre but est que l’ensemble des effectifs soit en mode mixte télétravail/présentiel, explique Thierry Jadot, PDG de Dentsu France, sinon le vrai danger est de créer de nouvelles fractures sociales entre ceux qui pourraient télétravailler à 100 % et les autres. » Car le télétravail va perdurer, c’est sûr, mais cette fois en mode hybride. « On a changé de logiciel. C’est la nouvelle normalité », reconnaît Benjamin Revcolevschi.

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En cette rentrée, le groupe PSA teste en grandeur nature la généralisation du télétravail, avec 70 % du temps de travail à distance et 30 % sur site. Quelque 18 000 salariés sont concernés en France « Il va falloir adopter de nouvelles façons de travailler, explique-t-on à la direction de la communication du constructeur automobile. Avec au programme : plus d’agilité, le développement d’une culture du feedback [retour d’information], l’animation de réunions plus créatives, la recherche d’efficience et l’accélération de la transformation digitale ».

« Un artiste de la relation humaine »

Des nouveaux modes de travail qui, selon une enquête menée en juin par le Boston Consulting Group (BCG) et l’Association nationale des DRH (ANDRH) sur l’organisation du travail dans la nouvelle réalité post-Covid, doivent évoluer vers plus d’autonomie du salarié pour 87 % des DRH interrogés, davantage de collaboration entre les équipes (59 %) et de transparence (59 %).

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Mais, ce changement, déjà engagé puis accéléré par la crise, n’est pas si simple à gérer avec une culture managériale française plutôt traditionnelle dans laquelle les responsables hiérarchiques sont habitués à avoir leurs équipes « sous la main ». Désormais « le rôle des manageurs s’est complexifié », explique Thierry Jadot. Les attentes à leur égard sont nombreuses, avec pour base de ce nouveau management le trio autonomie-confiance-responsabilité.

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Une rentrée masquée qui devra être zen

« Le risque de contamination augmente en fonction du débit d’air, de la densité de population et de la façon de parler. »

Carnet de bureau. « Les salariés sans masque ne rentreront plus dans l’entreprise. Ils doivent comprendre que même si la distanciation est respectée, il faut la barrière du masque », explique Audrey Richard, la présidente de l’Association nationale des DRH (ANDRH). Pour réduire les risques de contamination du Covid-19, à la mi-août, le premier ministre Jean Castex envisageait de généraliser le port du masque sur le lieu de travail.

C’est chose faite depuis le 1er septembre. Dans les espaces de travail clos et partagés, il est désormais obligatoire de porter un masque « grand public » en tissu pour la population générale, et masque à usage médical pour « les personnes à risques de formes graves de Covid-19 », selon les recommandations du Haut conseil de la santé publique.

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« Tout est préférable au reconfinement », avait souligné le patron des patrons, Geoffroy Roux de Bézieux, à l’Université d’été du Medef, le 26 août. « Les DRH sont satisfaits qu’il y ait enfin des consignes. Les entreprises savent s’adapter rapidement, elles l’ont prouvé avec la généralisation du télétravail. Depuis une semaine déjà, on se préparait au port du masque obligatoire pour tous, en commandant les masques, en informant les managers sur les nouvelles pratiques dans les open spaces, en listant quels masques seraient distribués à qui et combien », témoigne Audrey Richard.

Un coût supplémentaire

Il ne leur manquait plus que les annonces gouvernementales sur les situations particulières restées en suspens jusqu’au 31 août. Des plateaux télé au garage du coin, en passant par les chantiers du BTP, les dérogations étaient très attendues.

Car nombre d’entrepreneurs voient l’obligation du port du masque comme une nouvelle contrainte et un coût supplémentaire dans un contexte économique difficile. « Pour mille salariés, c’est un budget de 20 000 euros jusque fin décembre », estime Audrey Richard. Il faut renouveler les stocks et assurer le nettoyage de ce qui est désormais considéré comme un équipement individuel à la charge de l’entreprise. « Pour régler le problème, certaines entreprises font le choix du 100 % de masques jetables, d’autres contractualisent avec des pressings, à chacun sa solution », explique la présidente de l’ANDRH.

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Mais « la seule chose qui compte », comme disait Boris Vian, c’est que le salarié soit protégé. Or une étude de chercheurs de l’Université d’Oxford (Royaume-Uni) et du MIT (Massachusetts Institute of Technology, aux Etats-Unis), publiée la semaine dernière par la revue médicale BMJ (British Medical Journal), révèle que la seule prise en compte du masque est insuffisante.

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Pour une reprise en main des GAFA

« GAFA. Reprenons le pouvoir! », de Joëlle Toledano. Odile Jacob, 186 pages, 19,90 euros.

Livre. C’était il y a vingt ans. Google et Amazon étaient des start-up, Facebook n’existait pas, et Apple commençait sa seconde vie avec le retour de Steve Jobs. Deux décennies plus tard, les GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple) comptent parmi les entreprises les plus puissantes au monde, avec des valorisations boursières qui dépassent régulièrement les 1 000 milliards de dollars. Leur emprise sur l’économie augmente régulièrement, car ces entreprises bâties autour des technologies numériques fournissent, pour partie « gratuitement », des services de grande qualité devenus indispensables aux consommateurs et aux entreprises.

Au début, nous avons été éblouis face à la nouveauté et la qualité presque magique de l’offre. La fascination a été suivie par la sidération, puis par l’incompréhension et la crainte. Sans contre-pouvoirs efficaces, les GAFA « vassalisent les entreprises européennes (mais pas seulement), stérilisent l’innovation et la concurrence en créant un monde où données et algorithmes font la loi à leurs profits. Elles sont riches, puissantes, fascinantes, opaques et très influentes. Elles sont devenues dangereuses », tranche Joëlle Toledano dans GAFA. Reprenons le pouvoir ! (Odile Jacob).

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Comment les GAFA ont-elles réussi à se développer si vite ? Comment a-t‐on laissé se constituer de tels empires aux ambitions sans limite ? Dans son essai, la professeure émérite en sciences économiques associée à la chaire Gouvernance et régulation de l’université Paris-Dauphine montre que la régulation des géants du numérique est possible et nécessaire. Il faut s’en donner les moyens intellectuels et politiques. « Nos institutions et notre droit doivent impérativement être adaptés au XXIe siècle, faute de quoi ces nouveaux empires, les GAFA, deviendront les grands organisateurs de notre société. »

Lobbying très efficace

Le pouvoir de ces firmes ne doit pas être minimisé : économique bien sûr, mais aussi pouvoir d’influence et de séduction. Les GAFA ont non seulement des moyens immenses, mais aussi la conviction de leur efficacité et de leur supériorité.

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Esprits brillants, leurs dirigeants exercent un lobbying très efficace pour défendre l’absence de réglementation au nom de l’innovation, et mettent en avant deux atouts formidables pour se défendre : « Le statut de champion national d’une Amérique au leadership contesté, et la satisfaction des consommateurs, c’est-à-dire de presque nous tous. La gratuité de nombreux services sera très vraisemblablement utilisée pour ridiculiser et disqualifier toute régulation qui visera à les contrôler et permettre l’émergence de concurrents. »

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Doit-on dire « gestion » ou « politique de l’épidémie » ?

« La notion de politique désigne, pour les gouvernants et les citoyens, une aire autonome d’action, à la noblesse spécifique, indépendante des contingences et donc de cette intendance qui doit toujours suivre et qui est réservée à la modeste gestion ».(Le ministre de la santé Olivier Véran et le premier ministre Jean Castex, le 27 août, à Matignon).

Avis d’expert. Le choix des mots éclaire les conceptions de l’action. Face au Covid-19, pouvoirs publics et médias s’accordent pour appeler « gestion de l’épidémie » l’ensemble des mesures gouvernementales de lutte contre la maladie. Les commissions d’enquête de l’Assemblée nationale et du Sénat ont aussi retenu cette expression.

Mais compte tenu de l’importance des décisions en cause, pour le pays et pour le citoyen, n’est-il pas plus approprié de parler de « politique de l’épidémie » ? A vrai dire, en redonnant à la notion de gestion son ampleur oubliée, le Covid-19 fait resurgir les ambiguïtés et les lacunes de la conception « politique » des actions de l’exécutif (Le Bon Gouvernement, de Pierre Rosanvallon, Seuil, 2016).

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Remarquons d’abord que « politique de santé » et « politique du médicament » sont d’usage courant. En outre, les actions de prévention ou de lutte contre une épidémie constituent pleinement une politique publique avec vote d’une loi d’urgence sanitaire et mise en place de comités au plus haut niveau de l’Etat.

Inversement, la « gestion » est, depuis longtemps, dénuée des valeurs symboliques supérieures associées à celle de « politique ». Dire d’un gouvernement qu’il se limite à la « gestion » est tout sauf flatteur ! Quant aux décisions de confinement ou de déconfinement des populations, ce n’est pas ce que l’on entend habituellement par l’« expédition des affaires courantes ».

Des choix éclairés

Alors comment expliquer l’adoption spontanée de « gestion de l’épidémie » ? Il faut revenir aux raisons de la séparation entre « gestion » et « politique ». Dans la conception moderne de l’Etat, puis dans l’imaginaire collectif, le terme de « choix politique » a progressivement désigné l’action du pouvoir ou du peuple dans sa forme la plus libre et la plus haute, celle qui fixe souverainement et arbitrairement le destin d’une société.

Or, une épidémie s’impose aux gouvernants. Et même si les moyens de la bataille contre la maladie font débat, leur « vision du monde », leur « hauteur de vue » ou leur capacité à « incarner la nation » semblent, à elles seules, d’un faible secours.

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A l’inverse, l’épidémie exige des choix éclairés par le savoir ; elle requiert expertise et anticipation, adaptabilité, efficacité et lisibilité de l’action, et surtout soutien prioritaire aux plus atteints. Toutes ces vertus connotent plus avec la notion de « gestion » et moins avec celle de « politique ».

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Les salaires des cadres du privé restent stables en 2019, 2020 sera impactée par la crise du Covid-19

Après deux années de hausse, le salaire des cadres du secteur privé est resté stable en 2019. Toutefois, la crise économique due à l’épidémie de Covid-19 « aura certainement un impact » sur leur salaire en 2020, a prévenu mercredi 2 septembre l’Association pour l’emploi des cadres (Apec).

La rémunération brute annuelle médiane des cadres du privé (la moitié gagne plus, l’autre moitié gagne moins), incluant la part fixe et la part variable, s’est élevée à 50 000 euros l’an dernier, selon une étude réalisée en mars et basée sur les réponses de 16 000 cadres du privé, clients de l’Apec.

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« La crise économique a d’ores et déjà un impact visible sur l’emploi des cadres mais elle aura aussi certainement un impact sur leurs rémunérations », alerte le directeur général de l’Apec, Gilles Gateau, cité dans un communiqué.

« Dans ce contexte, les entreprises devront être vigilantes à ne pas ralentir le rythme encore trop lent de réduction des inégalités salariales entre femmes et hommes. C’est un vrai risque. »

Les inégalités salariales entre femmes et hommes ont persisté en 2019, même si le salaire médian des femmes a augmenté de 2,2 %, alors que celui des hommes restait stable. « À profil identique », rapporte l’Apec, les hommes ont gagné « 8 % de plus que les femmes ».

Les mobilités internes ou externes devraient être ralenties

L’Apec souligne que la crise « devrait avoir un impact sur les composantes variables » du revenu des cadres du privé, liées à leurs résultats ou aux performances de l’entreprise. La part variable de leur rémunération « devrait baisser », ce qui touchera « en particulier les cadres commerciaux et ceux des grandes entreprises ». L’intéressement et la participation « devraient être plus faibles », avec « des effets notables pour les cadres des grandes entreprises ».

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En outre, la crise devrait « ralentir » les hausses de salaires « individuelles ou collectives », ainsi que les mobilités internes ou externes qui permettent « fréquemment » d’obtenir une augmentation. Et en cas de chômage, le retour à l’emploi « s’accompagne parfois d’une baisse de la rémunération », relève l’Apec.

Autres craintes : une baisse de la rémunération fixe des cadres via la signature d’accords de performance collective (APC) dans les entreprises et une évolution salariale moins favorable pour les cadres « en début de carrière ».

L’an dernier, 62 % des cadres de moins de 30 ans ont vu leur rémunération augmenter, contre seulement 38 % des plus de 50 ans. Parmi ceux qui ont changé d’entreprise, 78 % des moins de 30 ans ont été augmentés, contre 54 % des plus de 50 ans.

Le Monde avec AFP

Le télétravail risque d’aggraver la sédentarité et ses effets

Dix mille pas et plus. Les comportements sédentaires sont de plus en plus prégnants dans la vie quotidienne. Près de la moitié des Français restent plus de sept heures assis par jour, en raison notamment de l’augmentation du temps passé devant les écrans. Sans surprise, le confinement imposé par l’épidémie de Covid-19 n’a pas arrangé les choses. Le télétravail, qui a par ailleurs des bienfaits, va se poursuivre pour des millions de salariés, ce qui risque de limiter l’activité physique et d’accroître la sédentarité.

Depuis quelques années, les recommandations visant à réduire la sédentarité viennent s’ajouter à celles de pratiquer une activité physique (bouger au moins trente minutes par jour). « Il faut bien distinguer le temps d’activité physique et le temps passé assis », insiste Julie Boiché, maître de conférences à la faculté des sciences du sport de l’université de Montpellier. Le temps passé assis ou allongé pendant la période d’éveil constitue un facteur de risque pour la santé. Et ce, indépendamment du niveau de pratique d’activité physique. Cet effet délétère étant d’autant plus fort que les durées sont importantes. L’enjeu est colossal : la sédentarité serait responsable de 10 % des décès en Europe, selon l’Organisation mondiale de la santé.

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« Moins on bouge, plus on mange. C’est le circuit classique de la leptine [l’hormone qui régule la satiété et le métabolisme] », résume le professeur François Carré, cardiologue et médecin du sport au CHU de Rennes. En effet, « lorsque nous sommes inactifs, nous avons tendance à manger plus que nécessaire et des aliments souvent ­riches en graisse et en sucre », souligne une note de l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité (Onaps).

Se lever toutes les demi-heures

« Il est donc préconisé de trouver des stratégies pour rester moins longtemps assis durant sa journée de travail et-ou si c’est compliqué, de créer des ruptures », explique Julie Boiché, qui reconnaît qu’il n’y a pas encore de consensus sur la durée.

Selon les travaux, il est suggéré de se lever toutes les demi-heures, jusqu’à toutes les deux heures. L’organisme de sécurité sanitaire Santé publique France (SpF), dans son enquête Coviprev sur ces questions pendant le confinement, recommandait de « se lever plusieurs fois par heure, la recommandation pendant le confinement étant de le faire au moins toutes les demi-heures ».

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Une étude conduite dans le cadre de la thèse de Gonzalo Marchant, enseignant et chercheur à l’UFR Staps de l’université Lyon-I, a porté sur 39 personnes de 29 à 59 ans (80 % de femmes), qui exercent toutes un travail tertiaire (administration publique, employés de banque). Après un séminaire collectif de sensibilisation aux risques liés à la sédentarité, elles ont été invitées à paramétrer de façon individualisée un logiciel d’alerte sur téléphone ou ordinateur les incitant à se lever régulièrement, avec fréquence et durée de leur temps de « pause ». Quatre semaines plus tard, le temps passé assis a diminué de trente-trois minutes par journée de travail en moyenne, principalement chez les personnes de 29 ans à 43 ans.

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Chômage partiel : moins de personnes vulnérables pourront en bénéficier

Une grande partie de personnes dites vulnérables, à risque de formes graves de Covid-19, ne peuvent plus bénéficier des dispositions de chômage partiel à compter du 1er septembre. Un décret paru dimanche 30 août au Journal officiel durcit ces règles, en réduisant sensiblement la liste des personnes pouvant en bénéficier, dont les « salariés partageant le domicile d’une personne vulnérable ».

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Depuis le début de la crise sanitaire, les personnes malades à risques pouvaient bénéficier d’un arrêt de travail ou d’activité partielle, sur la base d’un certificat d’isolement délivré par leur médecin, afin de les exposer le moins possible au virus et de ne pas subir de trop lourdes pertes financières.

Des inquiétudes

Ce n’est donc plus le cas, sauf « pour les personnes atteintes de certaines pathologies qui présentent un risque particulièrement élevé de formes graves de Covid ». Selon le décret, ce sont les personnes souffrant d’un cancer évolutif sous traitement (hors hormonothérapie), des sujets atteints d’une immunodépression congénitale ou acquise (infection à VIH, consécutive à une greffe d’organe, liée à une hémopathie maligne…), les personnes en dialyse ou présentant une insuffisance rénale chronique sévère, et celles âgées de 65 ans ou plus souffrant d’un diabète associé à une obésité ou des complications micro ou macrovasculaires.

Si l’association de malades rénaux Renaloo se dit satisfaite de la prise en compte des patients qu’elle représente, elle est, selon elle, insuffisante. En effet, « des personnes pour lesquelles un risque important est pourtant avéré ne sont pas dans la liste et devront donc retourner sur leur lieu de travail », souligne-t-elle.

Nombre de malades ont manifesté leurs inquiétudes. « Nous sommes satisfaits que les personnes à haut risque vital aient été prises en compte, mais il y aura des trous dans la raquette », regrette Féreuze Aziza, conseillère assurance maladie pour France Assos Santé, qui regroupe 85 associations de patients et d’usagers de la santé.

Pour prendre cette décision, les ministères de la santé et celui du travail se réfèrent à l’avis du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) du 30 juin. Se fondant sur les données scientifiques, le HCSP indique que le télétravail est privilégié, mais qu’à défaut le travail présentiel doit être proposé à toutes les personnes fragiles, assorti de renforcement de mesures de protection. Matignon met aussi en avant le risque de « désinsertion professionnelle ». Pour le HCSP, le risque de contamination n’est pas plus élevé dans un lieu de travail que dans la rue ou un autre endroit.

Une indemnisation moindre

« Le timing et le contenu de ce décret sont surprenants à deux jours de son application. Il n’y a aucune base scientifique pour hiérarchiser ces maladies. Le diabète, l’obésité, les maladies cardiovasculaires, les maladies respiratoires chroniques… sont exclus. Or, ce sont des facteurs de risques majeurs et aggravants pour les personnes infectées par le coronavirus SARS-CoV2 », souligne Mahmoud Zureik, professeur d’épidémiologie à l’université de Versailles-Saint- Quentin-en-Yvelines. Pourquoi ne pas avoir attendu de voir l’évolution de l’épidémie fin septembre-courant octobre, questionne-t-il.

Lorsque le télétravail ne sera pas possible et que les conditions de sécurité pour le retour au travail ne seront pas réunies, le seul recours sera l’arrêt maladie, avec une indemnisation moindre rapidement dégressive.

Les cadres disent « oui » au télétravail, mais à petites doses

« Si les Français semblent réticents à rester chez eux tous les jours, ils restent malgré tout favorables à un télétravail occasionnel, rappelle l’étude de Robert Walters »

Alors que les vacances estivales ont succédé à plusieurs semaines de confinement, le retour au bureau paraît s’éloigner de plus en plus. Suite à la dégradation de la situation sanitaire due au coronavirus, le gouvernement encourage fortement le maintien du travail à distance. Dans le contexte actuel, cette exigence coïncide-t-elle avec les vœux des salariés ? Il semble que oui : les sondages portant sur les attentes des collaborateurs en matière de télétravail, tels ceux de Kantar ou de Corona-work, font état d’un vrai plébiscite.

Une étude du cabinet de recrutement Robert Walters, qui s’est penché sur le retour au bureau post-confinement, met toutefois l’accent sur une spécificité culturelle bien française. Selon les réponses recueillies auprès de plus de cinq mille salariés dans trente et un pays, les cadres français se montreraient plus réticents au télétravail fréquent, par rapport aux autres nationalités. Malgré la peur du Covid-19, seulement 16 % d’entre eux aimeraient continuer à travailler tous les jours à distance et ne revenir dans les locaux de leur entreprise que ponctuellement.

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Parmi les pays sollicités, la France est le dernier à vouloir garder ce rythme : chez nos voisins européens, ce taux s’élève à 22 % en Belgique et à 23 % en Allemagne. En Espagne, la part des adeptes du télétravail quotidien grimpe même à 36 %.

Lien social

Cette moindre appétence pour le télétravail quotidien est-elle due au manque de pratique – après tout, ce mode de fonctionnement était quasi inexistant en France il y a encore quelques années – ou bien à une culture qui place davantage le travail au centre de la vie sociale ? « Cette étude a été réalisée en juillet, alors que le confinement était encore frais dans les esprits », relativise Coralie Rachet, directrice générale de Robert Walters France.

Malgré la peur du Covid-19, seulement 16 % des cadres français aimeraient continuer à travailler tous les jours à distance, contre 22 % en Belgique, 23 % en Allemagne et 36 % en Espagne

Ce probable sentiment de ras-le-bol se couple à un autre élément d’explication : « Les Français sont davantage attachés au village social” qu’incarne la vie de bureau et aux relations avec leurs collègues », avance Coralie Rachet.

A demeurant, les résultats de cette enquête coïncident avec ceux d’une des rares études officielles menées sur ce sujet. Une vaste recherche de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) sur le ressenti des cadres français en télétravail, datant de novembre 2019, mettait en exergue la difficulté des télétravailleurs à ne pas laisser déborder leur vie professionnelle sur leur vie privée.

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Le Covid-19 complique la rentrée des associations

Atelier d’écriture à l’Association rurale d’éducation populaire (AREP) de Festes-et-Saint-André (Aude), en octobre 2018.

Plus de duos, plus de portés ni de danses à deux : c’est un des sacrifices qu’a dû faire Véronique Ruffin pour maintenir l’activité de son club de danse, à Genas (Rhône). Après un arrêt complet des cours en mars en raison du confinement, il a fallu préparer la rentrée de septembre dans un contexte inédit. Les consignes sanitaires, floues, inquiètent la vice-présidente de cette association qui accueille environ 280 élèves chaque année.

Ce club de danse est loin d’être un cas isolé. Le secteur associatif français profitait pourtant d’une bonne dynamique, avant que la pandémie menace l’activité de nombreux acteurs du secteur, en attente de solutions adaptées pour accueillir le public.

Une dynamique cassée par la pandémie

En 2018, la France comptait entre 1,35 million et 1,45 million d’associations en activité, qui mobilisaient près de 12,5 millions de bénévoles. Entre septembre 2018 et août 2019, 72 000 associations avaient été créées, d’après les chiffres du réseau associatif Recherches et Solidarités.

« Pour le secteur associatif, cette pandémie est tombée d’autant plus mal que le dernier trimestre 2019 s’annonçait encourageant en termes d’emplois. Cette dynamique a été cassée par le Covid-19 », constate Jacques Malet, le président de Recherches et Solidarités. En collaboration avec le mouvement associatif, le réseau a produit deux rapports (pendant et après le confinement) pour mesurer l’impact du Covid-19 sur ces structures.

La deuxième enquête, réalisée du 18 mai au 15 juin, a permis d’analyser les réponses de près de 13 000 responsables du secteur associatif et d’en tirer des conclusions pour l’ensemble des acteurs : « Nous avons estimé à 30 000 le nombre d’associations susceptibles de déposer le bilan », indique M. Malet.

Composer avec l’incertitude

Louis Pastorelli est responsable d’une association niçoise proposant des ateliers de musique, incluant du chant en niçois. Comme beaucoup d’autres, il subit la situation, qui l’empêche de se projeter. « Nous ne pourrons pas reprendre les cours de chant puisque la mairie nous impose le port du masque en salle de cours, malgré la distanciation sociale. Nous ne savons pas ce que nous allons faire, c’est peut-être la fin de nos activités. Cela remet en cause tout ce que nous avons construit depuis huit ans », regrette-t-il.

À Genas, la mairie a demandé à Véronique Ruffin et à ses collègues de rédiger elles-mêmes un protocole sanitaire

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Entreprises : le protocole sanitaire consacre le port du masque grand public

Dans les bureaux d’une startup, le 19 août à Paris.

Preuve de la difficulté à appliquer une règle générale, celle du port du masque, à toutes les entreprises, tous les secteurs et tous les métiers, le nouveau protocole sanitaire, qui doit entrer en vigueur dès mardi 1er septembre à l’ouverture des bureaux, ateliers ou usines, n’a finalement été publié dans sa version définitive que lundi 31 août, peu avant 21 heures.

Sans beaucoup de surprise toutefois, la version définitive de ce document consacre le port du masque grand public, et le « rend systématique dans les espaces partagés et clos à compter de la rentrée ». Désormais, il ne sera plus nécessaire d’avoir le compas dans l’œil pour s’assurer de la distance entre deux personnes. Le masque s’impose en toutes circonstances, en plus des gestes barrières habituels : distance d’un mètre, lavage des mains, désinfection des surfaces, aération des locaux…

Seuls seront exemptés de cet accessoire les heureux salariés disposant d’un bureau personnel, et uniquement lorsqu’ils sont seuls dans ledit bureau. Autres exceptions les salariés travaillant en atelier qui sont souvent « amenés à effectuer des efforts physiques plus intenses que la moyenne » ; ils pourront travailler sans masque « dès lors que les conditions de ventilation/aération fonctionnelle sont conformes à la réglementation, que le nombre de personnes présentes dans la zone de travail est limité, que ces personnes respectent la plus grande distance possible entre elles et portent une visière ».

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En revanche, les salariés qui travaillent en extérieur devront mettre le masque en cas de « regroupement » et lorsque le respect de la distance d’un mètre n’est pas possible. Dans les véhicules aussi, les salariés devront être masqués s’ils voyagent à plusieurs. Quant aux visières, si elles peuvent être utiles, elles ne sauraient constituer une alternative au port du masque grand public, « de préférence réutilisables », précise le protocole, « couvrant à la fois le nez, la bouche et le menton, répondant aux spécifications de la norme Afnor S76-001 ».

« Quelques jours de bienveillance »

Grande nouveauté du protocole, la possibilité de retirer le masque « temporairement » à certains moments dans la journée, dès lors qu’un certain nombre de mesures sont prises, « par exemple l’existence d’une extraction d’air fonctionnelle ou d’une ventilation ou aération adaptée ». De plus, le protocole précise que ces mesures peuvent être réduites dans des zones de circulation faible ou modérée du virus à certaines conditions :

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