Archive dans janvier 2020

Les syndicats sauront-ils se féminiser ?

« Sociologiquement, la place des femmes dans le monde du travail ne facilite pas leur prise de responsabilité syndicale. » Photo: Réunion le 19 décembre 2019 à Matignon avec Edouard Philippe et les partenaires sociaux.
« Sociologiquement, la place des femmes dans le monde du travail ne facilite pas leur prise de responsabilité syndicale. » Photo: Réunion le 19 décembre 2019 à Matignon avec Edouard Philippe et les partenaires sociaux. Benoit Tessier / REUTERS

Lorsque les partenaires sociaux rencontrent le premier ministre Edouard Philippe à Matignon, le 19 décembre, la photo du tour de table est une caricature. Pas une femme ne participe aux débats. Le cliché fait le tour des réseaux sociaux sur le thème : les syndicats connaissent-ils la parité ? De plus en plus investies dans la fonction syndicale depuis le début des années 2000, les femmes occupent rarement les places dirigeantes et doivent apprendre à jouer des coudes pour s’imposer.

« Faire sa place dans le monde des moustachus reste encore difficile pour les femmes », tranche la sociologue Amandine Mathivet en introduction du premier épisode d’« Au Turbin ! » de l’année. La productrice et réalisatrice du podcast mensuel sur la vie au travail a tendu le micro à Clara, 50 ans, militante CGT depuis vingt-trois ans et Marie-Claude, syndiquée CFDT depuis dix ans.

L’une comme l’autre sont fières de leur syndicat, de leurs actions et de leurs camarades, mais moins du sexisme ordinaire vécu au quotidien. Elles racontent les prises de paroles interrompues, voire pire ignorées, le déni de responsabilité, les attaques personnelles. « Ils s’autorisent plus à mal parler qu’avec un homme. Et plus les postes sont à responsabilité plus c’est dur, car la parole est plus libre dans les attaques », dit Clara. Leurs témoignages attestent de la difficulté persistante des femmes engagées à faire leur place dans le monde syndical, jusqu’à aujourd’hui.

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« T’as le potentiel, tu vas y arriver, c’est ce qu’on dit à la CGT, surtout aux femmes », raconte Clara. C’est ce qu’on lui a dit lorsqu’elle a rejoint le syndicat. « J’étais dans un rapport de dettes : ils m’avaient fait embaucher. Ce n’est pas rien un CDI. Ils m’ont envoyée dans les commissions, puis à un congrès de section () J’étais flattée ». Mais c’était davantage pour le travail à réaliser que pour la prise de responsabilités. En effet, lorsque ces mêmes salariées veulent prendre des postes de « pouvoir », la situation se complique.

Culturellement, les syndicats ont encore du chemin à faire

Sociologiquement, la place des femmes dans le monde du travail ne facilite pas leur prise de responsabilité syndicale. Elles sont plus nombreuses dans les entreprises de moins de 50 salariés où il y a moins de représentation syndicale et sur des contrats à temps partiel et horaires atypiques. Sauf, dans certains secteurs comme la santé ou l’Education nationale, où elles sont nombreuses et sur des emplois stables.

Le secteur du petit électroménager en grande difficulté

A la Bourse de New York, en juillet 2018.
A la Bourse de New York, en juillet 2018. Brendan McDermid / REUTERS

A Courbevoie (Hauts-de-Seine), mercredi 8 janvier, la grève n’a pas fait les gros titres des journaux. Malgré l’huissier venu constater un éventuel débordement, à la demande de l’entreprise. Malgré les rondes, gyrophare allumé, de la police nationale. Un dispositif pour faire face à la colère de… 22 salariés des marques de petit électroménager Remington (lisseurs, brosses coiffantes, rasoirs…) et Russell Hobbs (bouilloires, grille-pain, centrifugeuses…). Réunis en piquet de grève avec banderole et mégaphone, ils manifestaient contre les conditions de leur plan social, qui prévoit le licenciement des 16 commerciaux.

Tout a commencé en juin 2019, lorsque la multinationale américaine Spectrum Brands a annoncé aux représentants du personnel qu’elle allait fermer le département force de vente de la société RRH France, qui gère les marques Remington, Russell Hobbs et George Foreman dans l’Hexagone. Une petite équipe de commerciaux de 16 personnes, mais plus de la moitié des effectifs de son antenne française.

Répartie sur l’ensemble du territoire, elle est chargée de visiter les grandes surfaces (Auchan, Carrefour, Leclerc, Casino, Darty…), de signaler les produits manquants aux chefs de rayon, de montrer les nouveautés, de vérifier la bonne installation des promotions et leur mise en avant dans les catalogues… En somme, d’entretenir la relation avec les circuits de distribution pour qu’ils commandent et mettent en valeur les produits que le groupe fait fabriquer en Chine pour le monde entier.

Evolution du marché et des circuits de distribution

Or sur les 16 salariés concernés, onze ont plus de 50 ans et sept dépassent même les 55 ans. Avec plus de quinze ans d’ancienneté pour certains. « On autorise les groupes qui font des bénéfices à licencier des seniors et cela va être Pôle emploi qui financera le plan de sauvegarde de l’emploi », jugeait Mélinda Zeisset, déléguée syndicale CFE-CGC, avant l’ultime réunion de négociation avec la direction, mercredi 8 janvier.

Pour l’entreprise, le responsable est l’évolution du marché et des circuits de distribution. Pour justifier sa décision, elle raconte être confrontée à une baisse significative du secteur du petit électroménager en France, depuis plusieurs mois, conjuguée à une explosion de la concurrence des marques de distributeurs dans les grandes surfaces, qui font baisser ses ventes et tirent les prix vers le bas.

A cela s’ajoute le mouvement de concentration à l’achat dans la distribution et une accélération des demandes de remises promotionnelles qui affecte la rentabilité de ses marques. L’entreprise dit souffrir aussi de la volonté des acteurs de la grande distribution de se recentrer sur l’alimentaire, diminuant les espaces consacrés en magasin aux produits comme les siens.

« Les entreprises ne peuvent s’exonérer de leur responsabilité si elles violent une promesse de contribuer au bien commun »

Tribune. La montée en puissance de la responsabilité sociétale de l’entreprise se confirme de jour en jour sous l’impulsion de parties prenantes (collaborateurs et clients notamment) dont l’exigence sur ces questions est particulièrement marquée au sein des générations les plus jeunes.

Dans le droit-fil de la recommandation n° 11 du rapport Notat-Senard, la loi Pacte du 22 mars 2019 a consacré la possibilité pour une société d’inscrire une « raison d’être » dans ses statuts. Dès les premiers mois d’application, cette option a rencontré un succès réel qui devrait se confirmer une fois que le flou sur la portée juridique de l’expression de cette « raison d’être » sera dissipé.

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Ce flou résulte en effet d’une formule du rapport Notat-Senard, reprise dans l’exposé des motifs de la loi Pacte, suggérant que cette stipulation ne serait qu’« une indication qui mérite d’être explicitée, sans pour autant que des effets juridiques précis y soient attachés ».

Or cette vision est contestée par la doctrine juridique dominante, qui estime que la méconnaissance par un dirigeant d’une clause statutaire sur la raison d’être est de nature à engager sa responsabilité à l’égard de la société et des associés, et à justifier sa révocation.

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Au regard de la rédaction des articles 1850 du code civil et L. 225-251 du code de commerce, qui énoncent que « les dirigeants sont responsables individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, [… ] de la violation des statuts […] » et de l’introduction par la loi Pacte elle-même d’une disposition imposant expressément au conseil d’administration ou au directoire des sociétés anonymes de prendre en considération la raison d’être lorsque celle-ci est définie dans les statuts (art. L 225-35 et L 225-64), la possibilité pour les associés d’une société de mettre en cause les dirigeants au titre d’une méconnaissance de la raison d’être statutaire ne fait guère de doute.

Obligation de conformité

Certains auteurs estiment, sur la base de la jurisprudence financière, que les sociétés offrant leurs titres au public encourent également un risque de sanction administrative pour information mensongère. Enfin, la société elle-même pourrait se voir opposer judiciairement par des tiers une obligation de conformité à la vision exprimée dans ses statuts.

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Face à une possible mise en cause de leur responsabilité, les dirigeants des sociétés françaises décidant d’adopter une raison d’être peuvent être tentés de s’en tenir à une formulation générique et abstraite, donnant peu de prises à ceux qui voudraient se prévaloir devant les tribunaux ou les autorités d’une absence d’alignement entre la vision exprimée et les actes. Cela semble être l’approche de bon nombre d’entreprises, y compris celles du CAC 40 ayant choisi une raison d’être. Carrefour a, par exemple, inscrit l’enjeu de « la transition alimentaire pour tous » dans ses statuts. Atos a complété son objet social comme suit : « Chez Atos, notre mission est de contribuer à façonner l’espace informationnel. Avec nos compétences et nos services, nous supportons le développement de la connaissance, de l’éducation et de la recherche dans une approche pluriculturelle et contribuons au développement de l’excellence scientifique et technologique. Partout dans le monde, nous permettons à nos clients et à nos collaborateurs, et plus généralement au plus grand nombre, de vivre, travailler et progresser durablement et en toute confiance dans l’espace informationnel ».

Arjowiggins : le projet des anciens salariés pour relancer leur usine

L’usine du papetier Arjowiggins, de Bessé-sur-Braye, le 27 mars 2019, au moment de la liquidation.
L’usine du papetier Arjowiggins, de Bessé-sur-Braye, le 27 mars 2019, au moment de la liquidation. JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP

Liquidée en mars 2019, l’usine du papetier Arjowiggins de Bessé-sur-Braye (Sarthe) est en quête de repreneurs. Fin 2019, une partie des 568 anciens salariés ont imaginé un projet qui tourne notamment autour d’un papier permettant de remplacer le plastique dans la fabrication de vaisselle jetable. Le projet industriel est jugé sérieux et rentable par une société d’expertise.

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La fin des plastiques jetables depuis le 1er janvier est peut-être la meilleure nouvelle qui soit pour l’usine Arjowiggins fermée au printemps 2019. Cette interdiction, qui contraint, notamment, les professionnels de la restauration rapide à opter pour un nouveau type de vaisselle, a forcé l’imagination des anciens salariés du service de recherche et développement de l’usine sarthoise. Ils ont mis au point un papier pouvant être utilisé par les industriels.

« Nous avons réorienté notre portefeuille sur des produits de grande valeur ajoutée et, notamment, un produit phare de papier barrière », explique Christophe Garcia, ancien délégué CFE-CGC. « Il se fait déjà de la vaisselle avec une base de papier sur laquelle il est apposé une couche de polyéthylène. Nous, nous sommes en mesure de produire cette base de papier et de remplacer le polyéthylène par un couchage de produit recyclé. »

« C’est un papier qui résiste à la matière grasse, à la chaleur, à l’eau »

« C’est un papier qui résiste à la matière grasse, à la chaleur, à l’eau », précise Pascal Trudel (CGT), et qui peut être utilisé pour « fabriquer des gobelets, des pailles, des tubes de crème ou même des pots de rillettes », sourit l’ancien d’Arjowiggins en faisant un clin d’œil au patrimoine culinaire sarthois.

Une étude financée par l’intersyndicale (CGT, CFDT, CFE-CGC), l’Etat et la région des Pays de la Loire, et menée par la société d’expertise Secafi, a permis, fin décembre 2019, de confirmer la pertinence du projet.

Reste à trouver l’industriel
prêt à reprendre le site

« L’objectif du groupe de travail était de trouver un projet viable et pérenne », explique-t-on chez Secafi. « Nous avons regardé le papier qui permettait de gagner de l’argent. Le papier transfert, le papier de cartes à jouer ou de poster sont des produits très bien valorisés. Des produits sur lesquels Arjowiggins est leader. Et puis il y a le papier barrière qu’ils ont réussi à développer. Là, il y a vraiment quelque chose à faire. Avec la loi qui est passée, c’est un vrai enjeu. Le produit a été développé par la R&D et on estime qu’il faut environ dix-huit mois pour le lancer. Mais c’est là où il y a le plus grand potentiel », assure la société d’expertise.

Naissance du numéro deux mondial de la livraison de repas

La plate-forme de livraison de repas Just Eat, à Londres, le 5 août.
La plate-forme de livraison de repas Just Eat, à Londres, le 5 août. Toby Melville / REUTERS

Un nouveau géant de la livraison de repas est né. Jeudi 9 janvier, les actionnaires de Takeaway.com, une entreprise néerlandaise, ont approuvé l’acquisition du Britannique Just Eat pour près de 6 milliards de livres (7 milliards d’euros). Les actionnaires de ce dernier ont jusqu’à vendredi à 13 heures pour donner leur feu vert, mais 46 % du capital est déjà acquis, et ce n’est désormais qu’une formalité. Ensemble, les deux entreprises, présentes dans vingt-trois pays, dont la France, va donner naissance au numéro un européen, et au numéro deux mondial derrière le chinois Meituan.

Les plates-formes de livraison de repas (Uber Eats, Deliveroo, Just Eat…) secouent le marché de la restauration depuis quelques années. En cinq ans, elles ont levé 11 milliards de dollars (9,9 milliards d’euros), selon les calculs d’UBS, une banque suisse. Elles se livrent une guerre commerciale très agressive, souvent à perte. A l’ère des GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon), le principe est toujours le même : dominer le marché, pour être le numéro un ou deux et tuer la concurrence, puis augmenter les marges dans un second temps, pour rentabiliser les investissements.

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Cette concurrence effrénée provoque un vaste mouvement de consolidation, dont cette acquisition est le dernier exemple. Ensemble, Just Eat et Takeaway.com génèrent des commandes auprès de restaurants pour 7,3 milliards d’euros, sur lesquelles elles prennent des commissions pour 1,2 milliard d’euros (leur chiffre d’affaires). Au premier semestre, leur bénéfice opérationnel cumulé était de 85 millions d’euros. Le nouveau groupe sera leader du marché au Royaume-Uni, en Espagne, en Italie, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Pologne, en Autriche, en Israël…

Des abysses financiers

Pendant des décennies, seules quelques grandes enseignes (Pizza Hut, Domino’s Pizza…) faisaient des livraisons. Au début des années 2000, des sites Internet ont commencé à mettre en relation clients et restaurants : il devenait soudain possible de commander de chez soi auprès d’un grand nombre d’établissements, mais c’était toujours ces derniers qui assuraient eux-mêmes la livraison. Takeaway.com, créé aux Pays-Bas en 2000, et Just Eat, lancé en Suède en 2001 et aujourd’hui coté en Bourse, à Londres, font partie de ceux-là.

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Autour de 2014, le marché a basculé à l’ère du smartphone. Deliveroo au Royaume-Uni, Uber Eats aux Etats-Unis, Delivery Hero en Allemagne et quelques autres ont vu le jour. A coups de milliards, ils ont créé leur propre service de livraison, élargissant fortement le marché. Soudain, il est devenu possible de commander depuis son écran auprès d’un restaurant qui n’a pas de livreurs. Pour les consommateurs, le choix est devenu radicalement différent : au Royaume-Uni, en 2015, il était possible de se faire livrer par le tiers des restaurants du pays ; aujourd’hui, c’est presque la moitié, d’après UBS. Les jeunes générations adorent. Les 25-34 ans commandent des plats chez eux 1,22 fois par semaine en moyenne, trois fois plus que leurs parents, toujours selon UBS.

A La Roche-sur-Yon, un accord trouvé sur les conditions de départ des « Michelin »

Un employé de l’usine Michelin de La Roche-sur-Yon, en octobre 2019.
Un employé de l’usine Michelin de La Roche-sur-Yon, en octobre 2019. LOÏC VENANCE / AFP

Un accord a été trouvé entre direction et syndicats sur les conditions de départ des 619 salariés de l’usine Michelin de La Roche-sur-Yon qui doit fermer ses portes cette année, a annoncé la direction, jeudi 9 janvier.

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« On ne peut pas dire qu’on est satisfait, parce que forcément, on espère toujours avoir mieux, mais globalement, les mesures sont acceptables », a réagi Fabrice Herbreteau, délégué syndical CFE-CGC.

« Cet accord n’empêche pas la colère qu’on peut avoir concernant la fermeture du site et le fait que Michelin fasse beaucoup de profits et sacrifie des usines pour faire encore plus de rentabilité. »

Assistance en vue d’un reclassement

Les salariés vont bénéficier d’une prime de départ de 40 000 euros brut auxquels s’ajouteront 500 euros par année d’ancienneté.

Pour ceux qui souhaitent se reclasser dans une autre entreprise, cette indemnité de départ sera non imposable et Michelin s’engage à compenser la différence de salaire à hauteur de 400 euros brut par mois pendant trois ans.

Un cabinet privé est aussi chargé de les assister en vue d’un reclassement. Une aide à la formation à hauteur de 10 000 euros et une aide à la création d’entreprise sont également prévues.

Pour Nicolas Biron, délégué SUD, « toutes ces indemnités ne compenseront jamais totalement le préjudice subi par les salariés, la perte de leur emploi ». « On a essayé d’obtenir un maximum de compensation par rapport à tout ça, on est parti assez bas sur des montants de plan de sauvegarde de l’emploi, et on a pu obtenir dans l’enveloppe globale 40 % de plus », s’est-il félicité.

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Sur les 619 salariés, une centaine devrait faire le choix de rester en interne et d’aller travailler dans un autre site du groupe. Ils bénéficieront de l’indemnité de départs, mais elle sera imposable. Michelin s’engage à financer leur déménagement et à aider financièrement les conjoints qui abandonneraient leur travail en Vendée.

Enfin 90 salariés environ, qui seront à la retraite d’ici le 1er janvier 2026, doivent profiter de la mesure d’âge : ils toucheront 75 % de leur salaire brut par mois, jusqu’à la retraite.

Reprise d’Alitalia : les candidats pressentis se retirent

Un Airbus A320 sur le tarmac de l’aéroport Rome-Fiumicino, en mai 2019.
Un Airbus A320 sur le tarmac de l’aéroport Rome-Fiumicino, en mai 2019. ALBERTO PIZZOLI / AFP

Peut-on encore sauver Alitalia ? Placée depuis début 2017 sous la tutelle de l’Etat italien afin d’empêcher une faillite complète, la compagnie aérienne transalpine se débat toujours dans une crise profonde. Ces derniers mois, des contacts ont été noués avec 30 repreneurs potentiels, mais, pour l’heure, aucun d’eux n’a donné suite en formulant une offre jugée acceptable.

Lors d’une audition devant la Commission des transports de la Chambre des députés, mercredi 8 janvier à Rome, Gianfranco Battisti, administrateur délégué de Ferrovie dello Stato (FS), la compagnie publique des chemins de fer italiens, a renoncé. A la demande du gouvernement de Giuseppe Conte, l’opérateur ferroviaire avait formulé une offre, le 31 octobre 2019, tout en l’assortissant de multiples conditions, comme celle de ne pas être actionnaire majoritaire du consortium qu’il s’agissait de créer.

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Cependant, aucun partenaire ne s’est montré intéressé, hormis le groupe Atlantia (propriété de la famille Benetton), que nombre d’observateurs soupçonnent d’envisager un investissement à fonds perdu à seule fin d’obtenir un peu de clémence de la part de l’Etat italien. En effet, le Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème) exige que lui soient retirées les concessions autoroutières dont dispose l’empire Benetton en raison de l’effondrement du pont Morandi, à Gênes, le 14 août 2018. Pour M. Battisti, « cette procédure est close » et FS est « sorti de l’opération ».

La veille, devant la même commission, Joerg Eberhart, PDG d’Air Dolomiti (filiale de Lufthansa), avait expliqué que, pour le groupe allemand, un temps en discussion avec FS, « un partenariat fort [avec Alitalia était] plus avantageux qu’un investissement ». Selon lui, une « profonde restructuration de la compagnie » est « inévitable », avant de pouvoir envisager une entrée au capital.

Il faut dire que la situation économique d’Alitalia est de nature à refroidir bien des ardeurs. De l’aveu même de Giuseppe Leogrande, nommé administrateur unique de l’entreprise en décembre par le gouvernement, le groupe perd 900 000 euros par jour. Les 900 millions d’euros prêtés par l’Etat pour empêcher la faillite en 2017 ayant été engloutis, la direction a obtenu un autre prêt-relais de 400 millions, malgré les réserves exprimées par la Commissaire européenne à la concurrence, Margrethe Vestager.

Un sujet politique explosif

Un nouveau directeur général, Giancarlo Zeni, a été nommé mardi, avec pour mission d’enrayer l’hémorragie. L’affaire est très délicate, car les comptes de la société semblent se dégrader de manière accélérée. Selon des informations obtenues par le quotidien économique Il Sole 24 Ore, le groupe aurait perdu plus sur les neuf premiers mois de 2019 que durant toute l’année 2018, et pourrait afficher jusqu’à 600 millions d’euros de pertes pour l’exercice 2019.

Une étude montre des discriminations à l’embauche « significatives » en fonction de l’origine

L’étude, commandée par le gouvernement, est sans appel. Plusieurs grandes entreprises françaises pratiquent « une discrimination significative et robuste selon le critère de l’origine à l’encontre du candidat présumé maghrébin », selon une étude rapportée mercredi 8 janvier.

Cette étude, révélée par France Inter, fait suite à une campagne de tests anonymes menée entre octobre 2018 et janvier 2019 auprès de 103 grandes entreprises parmi les 250 plus grandes capitalisations de la bourse de Paris. Elle a été réalisée par une équipe de chercheurs de l’université Paris-Est Créteil à la demande du gouvernement.

Ces chercheurs ont réalisé plus de 8 500 tests en combinant des candidatures et des demandes d’information, à la fois en réponse à des offres d’emploi ou de façon spontanée. A chaque test, deux profils fictifs identiques sont envoyés, l’un avec un prénom et nom d’origine maghrébine (comme Hicham Kaidi ou Jamila Benchargui), l’autre avec un patronyme d’origine française (comme Julien Legrand ou Emilie Petit).

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Nommer publiquement les entreprises concernées

« Les candidats nord-africains ont près de 20 % de réponses en moins que les candidats français », constatent les chercheurs. Sur les 103 entreprises testées, le groupe identifie « entre 5 et 15 entreprises discriminantes », en fonction des critères, soulignent-ils. « Nous trouvons également une discrimination, plus faiblement significative, selon le lieu de résidence », ajoutent-ils.

Cette discrimination est « plus forte dans les entreprises les plus grandes, dont le chiffre d’affaires est supérieur à la médiane et se concentre dans quelques secteurs d’activité », poursuivent les chercheurs sans préciser lesquels. Dans un communiqué, la Fédération nationale des Maisons des potes a déploré que le gouvernement « n’ait toujours pas rendu publics » les noms de ces entreprises, contrairement à ce qu’il avait annoncé, afin de pouvoir les « poursuivre en justice ».

Ces tests sur les grandes entreprises avaient été promis en 2018 par Emmanuel Macron lors de l’annonce de ses mesures pour les banlieues. Début 2019, le ministre de la ville et du logement, Julien Denormandie, avait précisé que son « objectif » était de pointer du doigt publiquement (via le « name and shame ») les entreprises qui pratiqueraient ces discriminations. « Nous avons besoin que cette politique publique offensive et judiciaire contre les discriminations devienne une réalité maintenant ! », souligne l’association.

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Syndicalisme : « Nous assistons à la résurgence du mythe de la grève générale »

« On a beaucoup insisté sur la chute des effectifs syndicaux, en ne remarquant guère que ceux-ci sont stables dans l’ensemble depuis les années 1990 » (Photo : manifestation contre la réforme des retraites, Marseille, le 17 décembre 2019).
« On a beaucoup insisté sur la chute des effectifs syndicaux, en ne remarquant guère que ceux-ci sont stables dans l’ensemble depuis les années 1990 » (Photo : manifestation contre la réforme des retraites, Marseille, le 17 décembre 2019). FRANCE KEYSER / MYOP POUR « LE MONDE »

Tribune. Le mouvement social lancé le 5 décembre contredit les analyses dominantes, qui prédisaient la fin de la conflictualité sociale. Sa force, son impulsion par des syndicats nous invite à redécouvrir ce fait social ancré dans la réalité française. Par exemple, on a beaucoup insisté sur la chute des effectifs syndicaux, en ne remarquant guère que ceux-ci sont stables dans l’ensemble depuis les années 1990.

De même, les militants syndicaux sont présents dans plus d’entreprises que dans les pays voisins : 50 % des salariés signalent leur existence (« DARES analyses », mars 2017). Enfin, cette séquence n’est guère favorable au syndicalisme « réformiste », pourtant présenté comme le seul adapté à notre époque. Le syndicalisme « combatif » n’avait-il pas durci son discours et multiplié depuis 2016 les journées d’action infructueuses ?

Bien que l’appareil de la CFDT ait surpassé celui, désorganisé, de la CGT et que la CFDT parie sur un rôle d’intermédiaire entre le pouvoir et les salariés, le pouvoir macroniste lui a signifié sans détour qu’elle ne pourrait se prévaloir de cette position. Ce mouvement réinterroge donc les fondamentaux du syndicalisme tant au niveau des clivages entre organisations qu’entre cultures professionnelles.

Le syndicalisme, dans sa diversité, est un contre-pouvoir, et à ce titre, il tire sa puissance de la conflictualité. On constate actuellement que l’emprise sur les évènements du syndicalisme « réformiste » dépend de la bonne volonté de ses interlocuteurs. Ses membres, moins habitués à l’action collective, ne jouent pas un rôle moteur lorsqu’elle se déclenche. Songeons au trésor que constitue la caisse de grève de la CFDT, dont les 120 millions d’euros ne semblent pas être utilisés souvent.

Hiatus inévitable

L’échec de la direction de l’UNSA à obtenir une trêve dans les entreprises publiques de transport montre que ces organisations ne disposent pas du pouvoir d’arrêter la grève. Mais le syndicalisme est aussi un pragmatisme, dont la pratique implique le compromis social, la négociation. La réussite de l’action dépendra de l’articulation entre ces facettes et entre syndicats.

Quand ceux qui négocient ne sont pas ceux qui luttent, le hiatus est inévitable. Par exemple, la principale structure réformiste, la CFDT, marquée par son identité catholique de centre gauche, met l’accent sur les inégalités entre salariés. Quand elle laisse entendre qu’elle est prête à accepter l’âge pivot si les salariés soumis aux travaux les plus pénibles en étaient exemptés, cela signifie que les autres salariés financeraient cette mesure, et non le patronat.

Pourquoi la lutte sociale doit se réinventer

« Qui a tué vos emplois ? », de Fiodor Rilov et Alexia Eychenne. Don Quichotte-Seuil, 208 pages, 16 euros.
« Qui a tué vos emplois ? », de Fiodor Rilov et Alexia Eychenne. Don Quichotte-Seuil, 208 pages, 16 euros.

Livre. Le titre de l’ouvrage de Fiodor Rilov – Qui a tué vos emplois ? – est aussi la question que « l’avocat rouge » pose, depuis plus de quinze ans, aux victimes des plans de licenciement économiques. « Avec eux, je cherche à dévoiler les décisions et les logiques financières qui ont poussé au crime. Je pourchasse les assassins qui, dans le secret feutré des conseils d’administration et des comités de direction, dans la langue policée des gestionnaires, scellent la mise à mort de milliers de contrats de travail en France, en toute impunité. »

Dans son ouvrage, écrit avec la journaliste Alexia Eychenne, le défenseur des Goodyear, Conti, Faurecia, Samsonite, 3Suisses, UPS, Flodor, Coca-Cola, etc., revient sur ses grands dossiers. Chaque affaire est l’occasion de révéler les mécanismes de l’injustice sociale. « Mises bout à bout, toutes ces batailles nous racontent une guerre idéologique. En quinze ans, les gouvernements successifs n’ont pas seulement cherché à démolir le code du travail en réduisant les droits des salariés, mais l’ont remodelé en accordant aux entreprises une multitude de nouveaux pouvoirs. »

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La remise en cause du principe selon lequel l’employeur ne peut licencier que s’il dispose d’un motif valable en est, d’après M. Rilov, la parfaite illustration. La dernière réforme du code du travail par ordonnances a plafonné le montant des indemnités prud’homales accordées aux salariés en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. « Désormais, un patron est donc prévenu du tarif qu’il paiera s’il licencie sans justification. Mais s’il est assez riche pour assumer ce coût, qu’est-ce qui le retient ? »

Dernière autorité étatique

En même temps, l’opacité progresse. La directive européenne sur le secret des affaires, transposée en droit français en 2018, renforce ainsi « le paravent qui escamote les coulisses des entreprises. Parmi de multiples effets pervers, elle risque d’empêcher un peu plus les salariés de distinguer qui est maître de leur emploi, de leur salaire et de leurs conditions de travail. » Comment, dans ces conditions, combattre les décisions de celui dont on ne connaît ni l’identité ni la localisation ?

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Pendant que les camps des entreprises et des financiers prennent du poids, les contre-pouvoirs s’affaiblissent. « L’organisation au sens syndical du terme était traditionnellement faite d’une stratégie globale de combat pour une amélioration immédiate et générale des conditions de travail, d’une présence massive dans les entreprises, d’une formation politique solide, de réunions régulières et d’échanges permanents. Tout cela s’est disloqué. »