Résultats Parcoursup

Dès le 15 mai, Parcoursup a débuté à afficher les offres d’orientation faites aux lycéens. Un an après son déclenchement, des enseignants racontent les effets de la nouvelle plate-forme dans le quotidien des résidences et des élèves.

Le 15 mai, Parcoursup version 2 a débuté à rendre ses premiers résultats aux quelque 900 000 candidats qui avaient posé un dossier pour une formation d’enseignement supérieur. Professeurs, enseignants, principaux et proviseurs s’attellent désormais à accompagner et à rassurer les élèves de terminale qui n’ont pas encore reçu d’offre ou qui n’ont pas réussi l’un de leurs vœux.

Cet instant, rempli en stress, forme la fin d’une année où Parcoursup, après son baptême du feu en 2018, s’est établi dans les lycées. Qu’ils soient satisfaits ou non de la réforme, nombre d’enseignants en conviennent : en classe de terminale, les choses ne sont plus tout à fait les mêmes.

C’est d’abord dans le rapport des établissements et des enseignants à leurs homologues de l’enseignement supérieur qu’on aperçoit déjà, dans certains lycées, un « effet Parcoursup ». La requête faite aux professeurs primordiaux du secondaire de donner leur avis sur tous les vœux de leurs élèves s’est traduite par une évolution naturelle des actions d’information auprès des élèves, mais aussi des enseignants.

Ce changement amène chacun « à connaître et à comprendre les filières du supérieur », analyse Christophe Barrand, directeur du lycée Turgot, à Paris, où les parents d’élèves et les professeurs principaux « ont très spontanément décidé d’organiser, ensemble, une série de conférences » sur les métiers de la médecine, des arts, du droit, etc., en effectuant appel à d’anciens élèves.

Même initiative au lycée René-Cassin de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques), où l’on dit s’être senti imposé « de s’intéresser un peu plus à l’“après” », déclare le proviseur adjoint Ronan Minier. Ici, Parcoursup a « suscité des rencontres » entre enseignants du secondaire et du supérieur lors de réunions structurées pour mieux connaître les attentes des uns et des autres, désormais liés par cette fiche avenir de l’élève par laquelle se fait, entre autres, la sélection. « Ces réunions ont débouché sur des actions intéressantes abordant les différences de pédagogie entre le lycée et l’enseignement supérieur », déclare-il.

Le « stress » des notes

Des pensées d’autant plus sérieuses que les professeurs de lycée doivent actuellement faire avec des élèves chez qui le « stress de la note est un peu plus important qu’avant, car ils ont l’impression qu’il y a de la sélection partout », déclare Ronan Minier. De là à penser que le léger « phénomène d’évitement et d’absentéisme » enregistré dans son établissement cette année lors des devoirs sur table en est une suite, il n’y a qu’un pas.

 

Étonnante mise à pied d’une responsable d’agence de Pôle emploi

« Alors qu’elle exerçait dans ce Pôle emploi depuis deux ans, Nora Rousselin a été sommée de quitter l’agence, sans explications. Elle est depuis privée de salaire, la mise à pied à titre conservatoire valant suspension du contrat de travail. »
« Alors qu’elle exerçait dans ce Pôle emploi depuis deux ans, Nora Rousselin a été sommée de quitter l’agence, sans explications. Elle est depuis privée de salaire, la mise à pied à titre conservatoire valant suspension du contrat de travail. » JULIEN THOMAZO / Photononstop

La responsable de l’agence des Mureaux, dans les Yvelines, a vu son contrat de travail cruellement arrêté, à cause de cinq plaintes déposées contre elle.

L’affaire a agité la petite ville des Mureaux. Le 2 avril, la responsable de Pôle emploi de cette commune des Yvelines s’est vue mise à pied à titre conservatoire ; une action habituellement mise en œuvre en cas de faute grave. Alors qu’elle exerçait là depuis deux ans, Nora Rousselin a été obligée de quitter l’agence, sans explications. Elle est depuis privée de salaire, la mise à pied à titre conservatoire valant suspension du contrat de travail.

La dureté de cette mise à pied a choqué beaucoup d’acteurs municipaux et associatifs de la ville, célèbre pour ses quartiers sensibles. Afin de soutenir la directrice, une pétition a été lancée par le pôle territorial de coopération économique (PTCE) Vivre les Mureaux. Marianne Cantau, adjointe au maire des Mureaux qui s’occupe de la formation et de l’insertion, qualifie la directrice de « très impliquée » : « Ce qui me choque surtout, c’est la façon dont ça a été fait, ajoute-t-elle. Le maire n’a même pas été prévenu ! On était en train de travailler sur le projet “territoire zéro chômeurs”. Désormais, nous n’avons plus d’interlocuteur. »

Management « sévère »

Ce n’est que le 9 mai que Mme Rousselin a pu apprendre les raisons de sa mise à pied. Lors de son entretien disciplinaire, la directrice a appris que cinq plaintes avaient été faites contre elle. « La directrice adjointe et des responsables d’équipe se sont plaints de la sévérité de son management », dévoile Aïssa Djehiche, délégué Force ouvrière (FO).

Aux yeux du délégué syndical, qui a agréé de défendre la directrice, l’affaire ne tient pas debout : « Quand on examine le dossier, il y a très peu d’éléments factuels, affirme-t-il. Par exemple, une déclaration accuse Mme Rousselin d’être une personne “méchante”. Vous voyez le niveau ! »

Selon M. Djehiche, la direction territoriale de Pôle emploi accuserait aussi Nora Rousselin de dresser un « management communautaire » : d’origine maghrébine, la directrice recouvrirait les faits et gestes de conseillers de la même origine. « Mais ça n’a pas de sens, puisque l’une des plaignantes est aussi d’origine maghrébine ! », déclare-t-il.

De l’avis du délégué FO, l’affaire a tout du complot : « On veut se dégager de la directrice parce qu’elle gêne », dit-il. Quelque temps avant, cette dernière n’aurait pas accepter la mutation d’un agent que lui avait sollicitée la direction territoriale de Pôle emploi, ce qui aurait provoqué cette affaire.

Les mauvaises conditions des salariés de Rayanair

Des salariés de Ryanair débraient à l’aéroport de Charleroi Bruxelles-Sud, en septembre 2018. Sur la banderole, on peut lire : « Ryanair en grève. Ryanair doit changer. »
Des salariés de Ryanair débraient à l’aéroport de Charleroi Bruxelles-Sud, en septembre 2018. Sur la banderole, on peut lire : « Ryanair en grève. Ryanair doit changer. » Yves Herman / REUTERS

Les hôtesses et stewards des bases de Bordeaux et de Marseille sont dans l’instabilité. La compagnie à bas coûts se pose malgré cela en modèle.

Des « rémunérations » de moins de 500 euros par mois, des hôtesses et des stewards forcés de se loger à cinq dans une chambre d’hôtel, des personnels imposés de « choisir de manger ou de payer leur loyer »…C’est le sort peu désirable d’une centaine de personnels navigants commerciaux (PNC) installés sur les deux nouvelles bases en France – à Bordeaux et à Marseille – de Ryanair, la compagnie irlandaise à bas coût. Habituée à flirter avec les limites des législations sociales en Europe, déjà mise en cause en 2014 pour travail escamoté, elle est une nouvelle fois vilipendée pour ses mauvaises pratiques.

La torture de la centaine de PNC de la compagnie sous la direction de Michael O’Leary a commencé début avril, quand elle a fait son retour en France, avec l’ouverture de ses deux premières bases, à Bordeaux et à Marseille. Pour l’occasion, la compagnie a offert à des PNC postés en Grande-Bretagne de rejoindre ses deux nouvelles escales françaises. Une offre alléchante au premier abord, mais qui s’est vite transformée en cauchemar.

C’est le Syndicat national du personnel navigant commercial-Force ouvrière (SNPNC-FO) qui a levé le lièvre. « Nous avons voulu voir si, cette fois, Ryanair estimait la législation comme elle s’y était engagée », déclare Christelle Auster, secrétaire générale du SNPNC-FO et hôtesse de l’air chez Air France. Cette démarche ne doit rien au hasard. L’organisation a collaboré à la création, en 2014, du Syndicat européen des personnels navigants commerciaux, l’European Cabin Crew Association (EurECCA), et avait assisté, la même année, au procès qui avait fini à la condamnation de Ryanair.

A Bordeaux et à Marseille, les hôtesses et stewards de Ryanair « pensaient pouvoir jouir de de la protection sociale française », bien plus propice qu’en Irlande ou même en Grande-Bretagne, souligne Mme Auster. Il n’en a rien été. Depuis bientôt deux mois, les équipages de la compagnie low cost vivent dans une extrême précarité. « Après un mois de travail complet, en avril 2019, les PNC sont rémunérés très en deçà du salaire minimum et de la rémunération minimale applicable aux salariés français », déclare la syndicaliste.

« Choquée par son salaire »

« En avril, je n’ai encaissé qu’un peu plus de 400 euros », se lamente Claire (le prénom a été changé). Une énorme déconvenue. Installé à Londres durant six mois, elle percevait « en moyenne entre 1 000 et 1 200 livres par mois [de 1 140 euros à 1 370 euros] ». Mais « je ne crois pas avoir atteint une seule fois cette somme », remplacement la jeune femme. Elle n’est pas la seule. La centaine de PNC des deux bases n’auraient « gagné que de 540 euros à 620 euros et certains d’entre eux n’auraient même pas été payés du tout », fustige la responsable syndicale.

Le chef de la Société Générale sous pression

Le directeur général de la Société générale, Frédéric Oudéa, à Paris, en mai 2016.
Le directeur général de la Société générale, Frédéric Oudéa, à Paris, en mai 2016. THOMAS SAMSON / AFP

En passe d’être mené pour un autre mandat de quatre ans, celui qui conduit la Société Générale depuis plus que 10 ans préside une banque de plus en plus carbonisée.

La scène a exprimé au sein de la (SG), et pas uniquement parce qu’elle s’est déroulée la suite de l’incendie de Notre-Dame. Le 16 avril, la banque assemblait à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) plus d’un millier de cadres pour sa grand-messe interne annuelle, nommée « journée des ambassadeurs ». Un « must ».

Sauf qu’en 2019, d’après plusieurs personnes présentes, un bon tiers des participants se sont dissimulés avant la séance rituelle de questions-réponses avec Frédéric Oudéa, le directeur général. « Dans un groupe aussi légitimiste, c’est du jamais-vu », s’ahurit un habitué.

La débandade de l’auditoire trahit l’abattement des troupes au sein d’une banque en passe de reproduire le mythe de Sisyphe. Depuis ce jour fatal de janvier 2008 où elle s’est réveillée avec un trou de 4,9 milliards d’euros à la suite de la fraude commise par le tradeur Jérôme Kerviel, l’institution n’est jamais arrivée à affermir la pente.

En cause, un entourage infernal, bien sûr. En punition de leurs péchés passés, toutes les banques européennes sont grillagées à petit feu par des taux bas et des codifications de plus en plus lourdes, mais la SG apparaît la plus carbonisée.

Elle considère en Bourse près de 21 milliards d’euros, soit la moitié de sa valeur d’actif net : selon les calculs au 17 mai de JPMorgan, la banque française se révèle la plus décotée parmi 62 acteurs européens, hors les deux grands malades allemands, Deutsche Bank et Commerzbank.

A 55 ans, M. Oudéa, DG depuis plus que de 10 ans, est le patron d’une grande banque européenne le plus ancien à son poste. Mardi 21 mai, l’alerte inspecteur des finances sollicite un nouveau mandat de quatre ans auprès de l’assemblée générale. Certes, il s’est consulté avant de rempiler, a-t-il révélé aux « ambassadeurs » assidus, mais il s’est dit prêt à adoucir le défi. « Et vous, l’êtes-vous ? », a-t-il lancé en substance à ses équipes. « Cela a beaucoup ému », expose un témoin.

« Une vraie lassitude »

Le vote des propriétaires n’offrant rarement de suspense, M. Oudéa devrait conserver les rênes. « Le conseil d’administration estime que Frédéric est le meilleur dirigeant pour les prochaines années. Personne au sein du conseil n’a parlé « de réserve. Nous distribuons sa vision très claire des grands défis du système bancaire et il a la vraisemblance interne », déclare l’Italien Lorenzo Bini Smaghi, le président du conseil d’administration.

Le droit les laborieux des plates-formes digitales d’être montrés

Un ensemble d’acteurs et d’experts du changement digital présente, l’ouverture d’un véritable dialogue social entre plates-formes et envoyés élus des laborieux ubérisés.

Le droit de reproduction et de négociation collective des travailleurs constitue un pilier de notre droit du travail et de notre modèle social. Il ne saurait souffrir d’exception. C’est pourquoi il est temps que la loi admette le droit les travailleurs des plates-formes digitales d’être représentés et de négocier avec les plates-formes auxquelles ils se connectent.

Alors qu’ils n’en sont pas employés, les travailleurs de plusieurs plates-formes d’intermédiation, comme Uber ou Deliveroo, voient en effet leurs conditions de travail largement déterminées par les plates-formes, comme le soutenu de la prestation, son prix et sa durée. C’est la raison pour laquelle la loi du 8 août 2016 a posé le principe d’une imputation sociale de ces plates-formes et a ouvert aux travailleurs le droit de se syndiquer et celui de faire grève sans sanction. Il n’y a, cependant, à ce jour aucun outil de représentation ni de dialogue social.

Le projet de loi d’orientation des changements (LOM), en débat à l’Assemblée nationale, doit être l’occasion d’introduire le principe d’un mécanisme de représentation et de dialogue social pour les travailleurs des plates-formes digitales, dont les modalités concrètes seraient précisées à l’issue d’une concertation avec les acteurs concernés. L’enjeu est de créer les conditions d’un dialogue constructif, de mieux égaliser les relations entre la plate-forme et ses contributeurs, et de protéger l’émergence progressive d’un modèle social conciliant le développement économique des plates-formes et le respect des droits et intérêts des travailleurs.

De fait, cette mesure répond à la requête de organisation des espaces de dialogue social exprimée tant par les laborieux que par les plates-formes. Depuis deux ans, plusieurs débats et groupes de travail entre parties captivantes ont été organisés dans l’espace public, comme dans le cadre des Etats généraux des nouvelles normalisations digitaux, de l’Agora du travail en Ile-de-France, de plusieurs think tanks comme #Leplusimportant, la Fondation Jean-Jaurès, l’Acadi, ou des groupes de travail IGAS-France Stratégie-Sharers & Workers et avec la Confédération européenne des syndicats.

Transport et livraison

Beaucoup de lignes de force se débarrassent, qui présentent que le sujet est assez mature et cadré pour que l’origine de ce dialogue social soit inscrit dans la loi et serve d’aiguillon aux acteurs afin que les concertations recrutées finissent sur des accords et sur une mise en place effective d’un dialogue social formel et entouré par le droit.

 

« Un premier pas pour l’assistance sociale des indépendants »

« A travers l’adoption d’une « Charte sociale », chaque plate-forme pourra proposer aux travailleurs indépendants qui utilisent son service des dispositifs de responsabilité sociale adaptés à leur activité. »
« A travers l’adoption d’une « Charte sociale », chaque plate-forme pourra proposer aux travailleurs indépendants qui utilisent son service des dispositifs de responsabilité sociale adaptés à leur activité. » Philippe Turpin / Photononstop

Chef de la Fédération nationale des autoentrepreneurs et gestionnaire de la Sécurité sociale des indépendants

Grégoire Leclercq, président de la Fédération des autoentrepreneurs, reporte les imputations de « régression sociale » tenues contre les Chartes d’implication attendues par l’article 20 de la loi d’orientation des mobilités, en débat à l’Assemblée nationale.

Observée par les députés depuis le 14 mai, la loi d’orientation des mobilités (LOM) entre dans l’ultime ligne droite. En tant qu’acteurs aussitôt majeurs de la mobilité, les plates-formes figurent au cœur du projet : l’article 20 – conduit dans le projet de loi initial – se saisit du sujet crucial de l’implication sociale des plates-formes, y compris celles agissant hors du secteur des transports.

L’idée est simple : à travers la cooptation d’une Charte sociale, chaque plate-forme pourra présenter aux laborieux indépendants qui utilisent son service des dispositifs d’implication sociale ajustés à leur activité.

L’article 20 est un premier pas essentiel et espéré depuis longtemps par l’ensemble des acteurs (plates-formes françaises comprises) et le fruit d’un dialogue social durable entre plates-formes, envoyés des autoentrepreneurs et services de l’Etat. C’est surtout une première pierre au chantier ambitieux et complexe de la protection sociale de tous les actifs.

Un dispositif vertueux

En tant que président de l’organisation spécifique des autoentrepreneurs, je suis actuellement confiant dans la capacité du légiste à prévoir un dispositif exactement défini et assez réduit pour affirmer aux laborieux indépendants de meilleures conditions dans leur relation avec les plates-formes.

Soyons clairs : l’article 20 de la LOM n’est pas le blanc-seing attribué aux plates-formes que certains ordonneraient laissé croire. C’est un dispositif vertueux car la charte sera contrôlée, controversée et enrichie. Elle devra au préalable être homologuée par l’administration chargée d’en doser la pertinence. La députée (LRM, Gironde) Bérangère Couillard, rapporteure du texte à l’Assemblée, a précisé qu’un « socle de règles obligatoires » serait imposé aux plates-formes et devrait figurer dans leurs chartes.

La charte pourra aussi être controversée entre laborieux et plates-formes, par exemple une fois par an dans une forme de dialogue social recommencé. Elle aura, enfin, vocation à s’enrichir : pour rester attachante, chaque plate-forme sera incitée à offrir à ses partenaires une charte avantageuse, générant un effet vertueux sur l’ensemble du secteur. Grâce aux planchers proportionnellement bas définis dans la loi El Khomri, les indépendants n’auront aucun frein à aménager une activité « multi-plate-forme » : ils pourront facilement profiter de droits sur l’ensemble des attentions où ils engendrent un chiffre d’affaires.

Les récentes formes d’activité du XXIe siècle

« Quant à la flexibilité des horaires censée les attirer, il convient de préciser que les créneaux les plus rentables poussent à se connecter quand l’algorithme de la plate-forme le décide… »
« Quant à la flexibilité des horaires censée les attirer, il convient de préciser que les créneaux les plus rentables poussent à se connecter quand l’algorithme de la plate-forme le décide… » Philippe Turpin / Photononstop

Un ensemble de six syndicats de laborieux de plates-formes digitales, dont CGT-Services à la personne ou encore Bikers nantais, s’élève contre la constitution de « chartes », prévue par la loi d’administration des mobilités (LOM).

Après avoir été examiné en 2018 par le Conseil constitutionnel dans le cadre de la loi Avenir professionnel, la constitution de « chartes » censées régir les rapports entre les plates-formes digitales et leurs laborieux « indépendants », refait son apparition dans le cadre de la discussion à l’Assemblée nationale de la loi d’orientation des mobilités (LOM). Ces dernières ont malgré cela été écartées par le Sénat à la suite d’un vote inédit de sénateurs de droite comme de gauche.

Leur accomplissement arbitraire par les plates-formes elles-mêmes fait débat : en premier lieu, il est certain qu’un tel appui de la majorité constitutionnel vise à contrecarrer les conclusions rétablies de plusieurs juridictions qui ont requalifié en relations salariales les contrats commerciaux qui assemblaient des travailleurs ubérisés à ces dernières.

Flexibles à la validation du ministère du travail, c’est bien leur loi d’airain, surtout en matière de rétribution, source de plusieurs conflits ces dernières années, que le légiste pourrait graver dans le marbre de la loi, bornant ainsi principalement la liberté des juges. N’en offense aux dirigeants de plates-formes qui poussent à l’adoption de la LOM, ce que les livreurs redoutent le plus n’est pas de devenir salariés mais de se voir imposer une rétribution constamment en baisse et l’abrogation de leur contrat à tout moment et sans aucune justification.

Le mythe du « travail indépendant »

Quant à la flexibilité des horaires acceptée les attirer, il convient de expliquer que les créneaux les plus rentables poussent à se brancher quand l’algorithme de la plate-forme le décide… En outre, quand l’accès de cette dernière n’est pas soumis à inscription, un sureffectif ubuesque crée une inflation qui fait baisser le nombre de prestations et leur prix.

D’autres part, il est émouvant de voir que, quand ces laborieux sont immédiatement invités à se formuler, comme ce fut le cas lors de l’examen organisée par le Conseil national du numérique (CNNum), les conclusions sont plus radicales puisque le CNNum s’oppose nettement à la mise en place de telles chartes et « appelle plutôt à l’instauration d’un véritable dialogue social ».

Plutôt que de poursuivre à nourrir le mythe du « travail indépendant » alors que les effectifs de porteurs des géants Deliveroo et Uber Eats tutoient les 20 000 livreurs et que les situations d’exploitation de plus en plus cruelles, dont le travail des migrants et des enfants, indemnisent l’actualité, il est essentielle d’administrer précisément sur ces questions et tenant compte de la diversité des autres métiers existants (guides touristiques, chauffeurs, chargeurs de trottinettes électriques, services à la personne…).

Une chorégraphie de robots pour une inexhaustible recherche de rendement

Dans ce hangar, des robots organisent et expédient des centaines de milliers de produits par jour, sous la supervision humaine. Amazon prévoit d’en ouvrir un en France en 2019.

C’est un pantomime où tous les artistes sont habillés de jaune, une chorégraphie aussi coulante qu’obscur qui se joue sur un infini terrain de jeu. Bienvenue à JFK8, l’un des plus modernes entrepôts d’Amazon. Dans ce hangar de 80 000 mètres carrés savent passer chaque jour plusieurs centaines de milliers de produits ordonnés par les habitants de New York au géant d’e-commerce américain. Indépendance du lieu, les robots – ce sont eux, les danseurs – y interprètent un rôle essentiel. JFK8 est en effet l’un des 26 centres de réception (sur un total de 175) dits mécanisés dont dispose Amazon dans le monde, et bientôt la France aura le sien. Il délacera à l’été à Brétigny-sur-Orge, dans l’Essonne.

Ces sites distraient un rôle essentiel dans la stratégie d’Amazon, et surtout dans sa capacité à livrer ses clients dans les délais les plus diminués possible. Introduits près de grands centres urbains, ils stockent la plus vaste nomenclature de références, puis attestassent leur emballage et leur expédition.

Depuis 2012, les robots ont débuté à saisir leur place dans les entrepôts d’Amazon et celle-ci ne cesse d’augmenter. La preuve la plus certaine en est faite au cœur du hangar de Staten Island, où certains milliers de petits appareils roulants intelligents garantissent l’agencement de cette vaste caverne d’Ali Baba. Quand de nouveaux produits arrivent sur le site, ce sont eux qui vont apporter aux personnes empilées de les consigner les étagères où les entreposer. Un système d’éclairage indique alors à l’employé quel est la principale subdivision où les déposer.

Recherche de productivité

Une fois sa mission terminée, le robot transporte le rayonnage à l’endroit de la zone de stockage qui lui semblera le plus approprié. Pas question ici de ranger les PlayStation avec les PlayStation, les couches avec les couches : la douteuse est jugé meilleur et si un produit est populaire, mieux vaut qu’il soit dispersé aux quatre coins de l’espace de stockage.

Contradictoirement à ce qui se passe dans les entrepôts traditionnels, ce n’est plus ensuite l’assistant qui va chercher le produit ressemblant à une commande, mais le robot qui lui soutient l’étagère où il se trouve. Et si son accès est bloqué par d’autres étagères, les robots s’arrangent entre eux pour lui trouver un chemin. Comme celui-ci n’est pas prédéfini, ils transmettent entre eux pour ne pas se heurter et découvrir continuellement la trajectoire la plus rapide.

La grande progression de l’enseignement supérieur privé

Depuis deux décennies, le secteur privé monte en force : les familles sont de plus en plus abondantes à admettre de payer le prix fort contre la promesse d’une insertion professionnelle rapide.

Le succès scolaire est, en France, une affaire particulière. Plus d’un demi-siècle après les pavés dans la mare faite par les sociologues Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron (Les Héritiers, en 1964, et La Reproduction, en 1970), la situation n’a, au mieux, guère développé, au pire, s’est augmentée. Plus que jamais les différences de naissance sont calquées, voire appuyées, par les parcours scolaires et universitaires. Stabilisées dès les années collège, elles dominent dans l’enseignement supérieur où la règle est aussi constant qu’au tarot : moins l’on dispose d’atouts maîtres – ici sociaux et scolaires – dans son jeu, plus l’effort requis pour gagner la partie est pénible.

Dans un système méritocratique dirigé par la règle du concours, il est important d’aller chercher le point qui fera la différence dans la multitude de prépas privées.

Quel a été l’impact de l’extraordinaire accroissement de l’enseignement supérieur privé depuis vingt ans (+ 76 %) dans cette privatisation du succès scolaire ? Le premier est d’avoir engendré une voie nouvelle et conciliatrice entre filières sélectives (prépas, BTS, DUT, etc.) et non élitistes (licence universitaire) pour les familles qui ont les reins suffisamment solides pour garantir des frais de connaissance en moyenne de 8 000 à 10 000 euros annuels. Deuxième effet : une contribution nette à l’accroissement de la pression scolaire avec la multiplication de prépas en tout genre. Dans un système méritocratique régi par la règle du concours, il est tentant d’aller chercher le point qui fera la différence dans la multitude de prépas privées entraînant les jeunes là où la pression est la plus intense – médecine, droit, Sciences Po, études artistiques, etc. L’offre, en la matière, a éclaté.

Ces deux phénomènes, qui participent à affermir le poids des ressources financières dans les études, coexistent avec des effets plus favorables. Ainsi, inversement à une idée répandue, les clients de l’enseignement supérieur privé ne se mobilisent pas exclusivement entre les classes les plus aisées : 22,7 % des étudiants y sont boursiers (40 % dans le public). Les élèves financent leurs études grâce à des jobs d’appoint, des prêts, les dispositifs sociaux créés par les écoles ou, formule encore plus économique, en choisissant pour l’éducation.

Le privé a plus d’accessibilités que le service public à assembler son offre à la demande du monde économique. Sans lui, des secteurs aussi dynamiques que le luxe, le sport, l’animation, la mode, le jeu vidéo et la digitale seraient en peine de découvrir toutes les compétences dont ils ont besoin. Il s’est aussi ajusté aux évolutions des conduites des jeunes en soignant ses approches pédagogiques et en quêtant, de plus en plus, l’aval de l’Etat, quitte à banaliser son offre. Enfin, de manière plus structurelle, les écoles de management, d’ingénieurs ou de design ont souvent été motrices dans la constitution de ces écosystèmes associant universités, institutions de recherche et entreprises – il en existe dans toutes les régions, et on les dit essentielles dans la course à l’innovation et à la propagation internationale de notre enseignement supérieur.