Quand les entreprises choisissent de verdir les salaires pour afficher leur exemplarité

Quand les entreprises choisissent de verdir les salaires pour afficher leur exemplarité

Dans le but de montrer qu’elles prennent au sérieux les besoins de l’économie durable, plusieurs multinationales intègrent des objectifs chiffrés écologiques dans le calcul des rémunérations.

Par Publié aujourd’hui à 07h00

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« Mieux vaut mettre la barre haut si l’on veut que l’intéressé s’attelle sérieusement à la tâche. »
« Mieux vaut mettre la barre haut si l’on veut que l’intéressé s’attelle sérieusement à la tâche. » Mike Kemp/Tetra Images / Photononstop

Quand Sunny George Verghese se rase, il ne laisse plus couler l’eau du robinet. Le dirigeant d’Olam, entreprise de négoce de denrées alimentaires, basée à Singapour, désire être un exemple aux yeux de ses 39 000 employés. Le patron économise son eau. Tout un symbole pour cette multinationale qui se veut à l’avant-garde de l’économie durable, même si elle est mise en cause par certaines ONG dans la déforestation du Gabon. « Nous devons réimaginer l’agriculture, afin de nourrir une population croissante sans détruire la planète », déclare-t-il, de passage à New York, à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations unies ouverte le 17 septembre. M. Verghese affiche des objectifs écologiques et sociaux très ambitieux, applicables à chaque salaire, à chaque usine et à l’ensemble des 4,7 millions d’agriculteurs qui travaillent avec Olam.

Afin de transmettre le message, le PDG lie la rémunération de 1 500 cadres supérieurs aux progrès réalisés en matière d’émissions de carbone, de réduction des déchets ou encore d’utilisation des énergies renouvelables : 10 % à 20 % de leurs revenus dépendent de la réalisation de cet objectif.

C’est ainsi que l’irrigation des vergers d’amandiers en Australie est en train de se convertir à l’énergie éolienne. De même, le groupe encourage, depuis plus de dix ans, ses partenaires paysans à produire des denrées de meilleure qualité, grâce à des formations et à des microcrédits. Et Olam est dorénavant capable d’offrir à ses clients une information détaillée sur l’impact environnemental de ses produits, de la ferme aux rayons des magasins.

Mettre la barre haut

Selon M. Verghese, l’écologie n’est pas une préoccupation « après coup », c’est toute une culture dont il veut imprégner le groupe. D’où la mise en place d’une incitation financière particulièrement efficace avec les salariés d’un certain âge. « Les jeunes comprennent, ils savent bien qu’ils vont hériter de cette planète, avoue le PDG. Mais les employés matures n’ont pas cette sensibilité. Ma génération a besoin d’un coup de pouce financier pour s’aligner. Il faut que les cadres sentent que la réussite écologique a un impact sur leur carrière. »

Cette approche n’est pas encore très répandue dans les entreprises. « Moins de 5 % des groupes incluent le critère environnement dans l’évaluation des performances », assure Jenny Davis-Peccoud, l’experte en économie durable du groupe consultant Bain & Co. « La première fois que j’en ai parlé aux conseils d’administration, tout le monde s’en fichait, renchérit Blair Jones, de la société de conseil Semler Brossy. Il y a cinq ans, dans le secteur de l’énergie et des mines, les administrateurs étaient beaucoup plus sensibles aux risques encourus par les personnels. Ils voulaient éviter les poursuites en justice. »

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LJD

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